Nathan P. 08/03/2023

HPI, et toujours en décalage

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Nathan a été diagnostiqué HPI et HPE à 9 ans. Une particularité qui lui crée des difficultés avec ses camarades et ses profs.

J’ai été diagnostiqué HPI (haut potentiel intellectuel) et HPE (haut potentiel émotionnel) à 9 ans. Je me souviens des tests de la psychologue. Il y en avait un avec des cubes rouge et blanc. Mon meilleur ami avait été diagnostiqué, donc j’ai eu envie de savoir à mon tour. Mes parents étaient d’accord. Du coup, je comprends maintenant pourquoi on s’entend si bien avec mon meilleur ami.

Mes camarades, eux, me trouvent assez bizarre. Ils disent que je suis trop sérieux, que je ne réfléchis pas comme eux. Que je parle de choses qui ne sont pas de mon âge. Quand j’essaie de me joindre à eux, ils n’ont que des sujets de conversations obscènes. Et vu que je ne rigole pas à leurs blagues, que je ne participe pas aux discussions, ils s’éloignent de moi ou se moquent.

Le HPI et le HPE, c’est quelque chose qui ne part pas, qui ne se soigne pas. Si on l’a, c’est pour toujours. Moi, je le vois comme un handicap. Avant mes 9 ans, tout se passait plutôt bien avec mes anciens camarades. On jouait aux billes ou à la marelle. C’est quand je suis arrivé au collège que tout a vraiment basculé. Les regards portés sur moi étaient différents. Un grand écart s’est formé entre moi et les autres. J’ai dû m’adapter à eux, vu que j’avais bien compris qu’eux n’essayeraient jamais de s’adapter a moi.

Heureusement, mon meilleur ami était là. On arrivait à se comprendre. On était inséparables, jusqu’à ce que je déménage de la Touraine pour la Corrèze, en fin de cinquième. Je ne voulais pas du tout partir. J’allais perdre mon pote et j’aurais dû de nouveau m’adapter aux autres. J’en avais un peu marre de me cacher, de devoir me changer et faire semblant pour plaire aux autres.

Je me contente du minimum

Arrivé dans mon nouveau collège, à Brive, je suis resté seul la plupart de mon année de quatrième. J’avais peur de faire l’objet de regards méfiants. J’ai donc commencé à écrire, composer beaucoup de poèmes et de textes sur la vie, la vie qui m’entoure et celle que je parcours.

J’ai du mal à suivre les cours. Enfin, j’arrive à tout retenir en une écoute ou en ayant vu un document une seule fois. Je sais que j’ai des capacités élevées, du coup je ne révise pas. Je me contente du minimum. J’ai quand même de très bonnes notes à mes contrôles, genre 15. Mais si je révise un peu, je pense pouvoir viser plus haut. Mais je n’en vois pas l’utilité.

Cela m’énerve quand les professeurs répètent les mêmes choses. Pas besoin de le dire 30 fois ! C’est comme quand ils me disent que je ne travaille pas et que je peux mieux faire… Je le sais très bien, je n’ai juste pas envie ! Je sais que j’énerve les profs. Surtout quand je leur pose des questions incessantes. Par exemple, en maths. Comment a-t-on pu décider que des choses étaient impossibles ? Les professeurs me répondent sans arrêt : « C’est comme ça ! »

Pour l’instant, je vis le moment présent

Depuis que je suis en troisième, j’essaie de me rapprocher des gens. Quand je rejoins les groupes dans la cour, je me concentre sur chaque mouvement, chaque son. Le point fort de cela, c’est que je sais quand quelqu’un va mal juste avec sa posture ou sa façon de parler. Je ne sais pas si c’est la troisième, ou si ce sont juste mes camarades actuels, mais cela parle moins de sujets obscènes que l’année dernière. J’arrive du coup à m’intégrer. Il le faut bien, rester seul n’est pas vraiment bon pour le moral.

Certains de mes professeurs sont au courant de ma situation, et ils essaient de m’aider pour avancer dans mes révisions. Ça ne me dérange pas que d’autres enseignants ne le sachent pas.

Je ne sais pas encore ce que je vais faire plus tard. Pour l’instant, je vais aller en seconde générale. Le problème, c’est que si je ne travaille pas, je risque de décrocher. Si je vois que la seconde se passe mal, je partirai dans un lycée professionnel. Après, j’ai plusieurs métiers en tête comme ingénieur en informatique ou animateur radio.

Pour l’instant, je vis le moment présent. Je fais halluciner mes camarades avec deux projets que je suis en train d’inventer. Je conçois deux moteurs révolutionnaires qui ne pollueront pas. Je garde ces idées pour moi, il m’a fallu faire quelques recherches pour pouvoir commencer à les développer. J’avais quelques connaissances en la matière mais internet m’a beaucoup aidé. Je n’ai aucune idée de pourquoi j’ai envie de construire ces moteurs. C’est juste pour le fun et la fierté d’innover.

Réussir tout ce que j’entreprends

J’ai toujours préféré sortir avec des filles plus âgées que moi, deux ou trois ans de plus. Je tombe rarement amoureux mais je ne pense pas que cela ait un rapport avec le HPI. Quand cela arrive, ce n’est pas réciproque… Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai toujours préféré discuter avec les filles que les garçons. C’est un vrai mystère. J’ai été en couple seulement trois fois, c’est déjà bien. Mais ce n’est plus arrivé depuis mon déménagement. Je n’y voyais pas d’intérêt, du moins jusqu’à récemment, car une fille de ma classe me plaît.

Je n’envisage pas une vie future avec une personne, avoir des enfants ou me marier. Cela ne m’intéresse pas. Ce dont j’ai envie pour plus tard c’est de réussir tout ce que j’entreprends. Je veux dire au monde que j’ai réussi ma vie. Cela voudra dire être heureux, avoir un salaire correct ou élevé, être en forme et voir ma famille réussir.

Nathan, 13 ans, collégien, Brive-la-Gaillarde

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