Béatrice J 11/01/2021

Le jour où j’ai dit stop à la violence

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Béatrice pensait que c’était de sa faute, jusqu’à ce qu’elle en parle. Devrait-elle porter plainte pour les coups de son père ?

Pour une histoire de charge de mon téléphone sur une prise restée allumée trop longtemps… je me suis disputée avec mon père. Il s’est énervé, m’a traitée de menteuse, puis… il m’a frappée. J’étais sous le choc, je n’arrivais même plus à parler, je voulais juste partir mais, au final, je me suis sentie coupable de ce que j’avais fait. J’ai rejeté la faute sur moi comme si j’avais fait quelque chose de mal.

J’en ai parlé à ma grand-mère, mais elle le défendait. Elle ne se rendait pas compte de ce que ça pouvait me faire. Plus tard, il m’a encore frappée deux fois. J’en ai parlé à ma mère. Elle a voulu porter plainte. Je devais faire une main courante, mais je n’avais pas la force. Dès que j’allais chez mon père le week-end, ma mère se faisait du souci pour moi. Elle m’envoyait un message en me demandant comment j’allais, si ça se passait bien avec lui.

Elle m’a annoncé qu’elle allait appeler mon père

Ma prof de français s’en est aperçue et en a parlé à une surveillante de mon établissement. Elle m’a proposé d’en parler à l’infirmière scolaire. Sauf que si elle lui en parlait, elle allait me convoquer pour tout lui expliquer et je n’aime pas en parler. Je souffre à cause de ça. J’ai fini par parler avec l’infirmière. Elle m’a demandé de lui expliquer le contexte avec mon père, ma mère, la relation entre mes frères et sœurs. En sortant, je ne me sentais pas bien, je n’arrêtais pas de penser à ça, même la nuit je faisais des cauchemars de lui.

Je suis retournée la voir. Elle m’a expliqué que j’allais devoir porter plainte contre mon père, si je voulais. Mais je n’avais pas la force de le faire. C’est quand même mon père. Elle m’a dit de lui expliquer toutes les phrases qu’il m’avait dites, qui m’avaient blessée. Elle les a notées et m’a annoncé qu’elle allait l’appeler. Je lui ai dit : « Non, vous pouvez appeler qui vous voulez mais pas mon père, s’il vous plaît. » Elle était obligée de faire un courrier donc il allait forcément être au courant. Je lui ai dit : « D’accord, je comprends. »

J’avais une boule à la gorge

Un mois s’est écoulé. L’infirmière a appelé mon père. J’étais dans son bureau et on est tombées sur sa messagerie car il était au travail. Il a aussitôt rappelé. Elle lui a dit qu’il m’avait frappée à plusieurs reprises et que ça m’avait touchée, même de me dire que j’étais une menteuse. Il a répondu que c’était pour rigoler et que ce n’était pas vrai. Que, dans tous les cas, il ne voulait pas me faire du mal.

Elle m’a demandé si je voulais bien lui parler. J’ai accepté, j’avais une boule à la gorge. Après quelques secondes, je me suis lancée. Il m’a dit qu’il n’avait pas vraiment eu l’intention de faire ça, qu’il ne ferait jamais ça. Puis, il m’a proposé qu’après son travail, on aille discuter dans un parc. J’ai dit que je voulais mettre tout ça au clair, puis il m’a dit : « Je t’aime ma fille. » Je me suis effondrée en larmes, ça m’a fait tellement bizarre qu’il me le dise. Ça faisait des années qu’il ne me l’avait pas dit.

Je me méfie quand même

Arrive l’heure où nous avions rendez-vous : 17 heures. Il m’a demandé comment j’allais, puis nous avons abordé le sujet. On a parlé de mes frères et sœurs, de la relation avec ma mère et mon beau-père, de beaucoup de choses. Puis, il m’a pris dans ses bras, mais je ne savais pas quoi faire alors je lui ai quand même fait un câlin. Le soir, il m’a envoyé un message pour me souhaiter une bonne nuit.

Le vendredi, je devais aller chez lui pour le week-end. Il ne s’est rien passé de spécial. Il m’a juste dit que si je n’en avais pas parlé au collège, il me serait « tombé dessus ». Je n’ai retenu que cette phrase. Alors quand je suis retournée chez ma mère, je lui ai expliqué la phrase que j’avais retenue. Et l’infirmière n’en a pas compris le sens. Elle a encore essayé de joindre mon père. Le soir même, mon père m’a rappelée. Il m’a dit qu’on avait dû mal à se comprendre tous les deux. Mais maintenant j’ai toujours un peu de stress quand je dois aller chez lui : je me méfie.

 

Béatrice, 15 ans, collégienne, Yvelines

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