Hippolyte N. 11/01/2021

Neuilly c’est pas comme on pense

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Le quotidien d’Hippolyte, à Neuilly-sur-Seine, n'est pas tout à fait comme on pense, ou en tout cas, ce dont on pourrait croire.

Je me lève, il est 11 heures, on est dimanche. Je suis bien content, j’ai fini tous mes devoirs du week-end, je suis donc libre. Lorsque je prends mon petit-déjeuner, deux choses se questionnent dans ma tête : que faire ? Aller voir des amis ? À ce moment-ci, on se dit que c’est curieux : « Normalement, en tant que bon résident de Neuilly, il devrait certainement aller faire du shopping sur les Champs ou même faire un golf avec son père. » Et bien non.

Trente minutes après, je suis prêt, j’ai pris une bonne douche, j’attrape mes clés et m’en vais. J’ai prévu d’aller voir des amis pour faire un foot ou un basket, pas pour aller sur les Champs-Élysées faire du shopping. Je vais simplement m’amuser avec mes potes autour d’un panier de basket, comme aimeraient le faire la plupart des adolescents de mon âge. Je me suis éclaté.

Non, nous n’allons pas au Ritz

Je rentre, il est 19 heures. Il fait super chaud en plus, en raison de la canicule. J’arrive chez moi, ma famille est là. Pour tout vous dire, je suis vraiment affamé. Je demande à ma mère : « On a prévu quoi pour le dîner ce soir ? » Elle me répond : « Pavé de saumon, riz. » Je suis content, c’est un de mes plats préférés, surtout quand le saumon est très peu cuit. Non, nous n’avons pas prévu d’aller au Ritz sur la Place Vendôme ou de dîner dans un restaurant gastronomique comme apparemment pourrait le faire une famille de Neuilly.

J’ai, en quelque sorte, une famille ordinaire, sans vie de millionnaire. Certes, je vis dans de très bonnes conditions comme la plupart de mon entourage, mais je ne suis pas richissime.

Plus tard dans la soirée, je reçois un message d’un de mes potes. Apparemment, ils sont déjà ensemble. Je décide de les rejoindre, ils sont à peu près une dizaine. J’ai pris mon enceinte et mes clés. Lorsque j’arrive là-bas, ils m’accueillent super bien : petit check, petite musique et compagnie. Encore une fois, on s’amuse et on rigole comme n’importe qui. Certes, nous sommes à Neuilly, donc sommes privilégiés et avons des avantages que n’ont pas d’autres, j’en suis conscient, mais cela ne veut pas dire qu’il s’agit d’une soirée mondaine où sont présents de nombreux digestifs.

Une vie comme tous les ados de France

En fait, ce qui m’affecte vraiment et me fait de la peine, c’est le principe du préjugé : c’est quelque chose que j’ai beaucoup de mal à supporter. Pour parler précisément et savoir débattre sur un sujet, il faut le connaître. C’est la base. Et moi, justement, le sujet de Neuilly-Sur-Seine, je le connais. Alors moi, à tous ces gens, je leur demande de venir à Neuilly, pour leur montrer que ce n’est pas tout à fait ce à quoi on pourrait penser.

Cela m’attriste vraiment que l’on se fasse des idées sur ma personne : le bon catho de Neuilly, blindé, habillé hors de prix et coiffé comme il faut. Alors, j’ai peut-être cette apparence, mais je reste un être humain comme les autres et j’ai des sentiments, comme n’importe qui. C’est comme le racisme et la discrimination, c’est juste moins courant et moins grave.

J’ai une vie comme tous les adolescents qui vivent en France mais j’ai conscience que je fais partie des plus privilégiés car j’ai des possibilités, des avantages et des moyens. Mais cela ne veut pas dire que Neuilly doit subir autant de préjugés.

 

Hippolyte, 14 ans, collégien, Neuilly-sur-Seine

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