Sarah G. 30/06/2022

Père agriculteur, mère PDG : les regards changent selon le métier

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Sarah a toujours vécu au milieu des champs, et des préjugés des autres enfants. Mais quand elle parlait du métier de sa mère, les opinions changeaient.

Mon papa a été agriculteur pendant plus de 15 ans. Je vis à la campagne depuis toujours. Et ma maman est une femme d’affaires, directrice générale d’une entreprise depuis environ 20 ans.

Petite, les opinions, les clichés et les réflexions étaient multiples, surtout en rapport avec le métier de mon papa et là où je vis : au beau milieu de nul part, entourée de vastes champs de blé. Mes voisins sont principalement des vaches et des moutons.

Tout de suite, la vision des gens, surtout ceux qui habitaient dans le bourg, en centre-ville ou dans les lotissements, était très péjorative. Ils me voyaient comme une fille qui vivait avec les cochons, dans la boue, dans la saleté et qui n’avait ni internet ni la télé. Alors que la réalité était très différente. Je vis dans une maison assez grande, plutôt moderne, bien rangée et très propre. Et OUI, j’ai internet et la télévision.

Redoubler d’effort pour rester à la pointe

La vision des enfants sur moi était différente de celle des adultes. À l’école, les enfants du bourg s’étonnaient souvent que je n’ai pas de paille dans les cheveux ni de boue sur mes chaussures, et que je m’habille à la mode.

Alors dès petite, il fallait à tout prix s’intégrer aux autres enfants, faire de nombreux efforts pour paraître « stylée » à leurs yeux, et faire disparaître les préjugés. Bien sûr, il y avait d’autres enfants qui venaient de la rase campagne. Je les connaissais souvent grâce à nos parents agriculteurs. Je pouvais parler avec eux sans avoir peur de leurs jugements, car eux aussi vivaient la même chose.

Ma mère est cheffe d’entreprise

Les adultes, eux, se souciaient tout de suite plus de ma situation sociale, de l’impact que j’aurai sur leurs enfants, de mon éducation, de ma politesse. Cependant, tout changeait quand je disais le métier de ma maman, que ce soit chez les adultes ou chez les enfants. Leurs opinions étaient positives. Je paraissais tout de suite plus classe, plus aisée financièrement, vue comme une fille de bonne famille, polie, courtoise et avec une bonne influence.

Et même parfois quelques personnes pouvaient se demander comment une femme d’affaires avait pu se marier avec un agriculteur. Comme si les gens devaient obligatoirement se marier avec une personne de la même classe sociale.

Des préjugés sur l’agriculture qui persistent

Les gens ne se rendent pas forcément compte de l’impact de leurs jugements et de leurs réflexions, que ce soit sur un enfant de 6 ou de 15 ans. Cela entraîne un manque de confiance en soi, ne même plus avoir envie de dire le métier de nos parents quand on nous le demande, peut-être par honte. Que ce soit aujourd’hui ou avant, j’ai toujours été fière du métier de mon papa, car l’agriculture est un magnifique métier.

Aujourd’hui il n’est plus agriculteur, et je peux voir que le regard des gens a changé, a évolué, a mûri et que les préjugés n’ont pas disparu mais se sont atténués vis-à-vis de moi. Cependant, ils sont encore très présents, et encore de nombreux enfants les subissent aujourd’hui.

Sarah, 15 ans, lycéenne, Saône-et-Loire

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