Sans assistance, je n’aurais pas eu mon bac
Quand je n’ai pas mes lunettes, je distingue à peine les objets. Depuis tout petit, j’ai eu beaucoup de rendez-vous médicaux, d’opérations. Maintenant je vois mieux, je porte des lunettes spéciales, alors qu’avant, même avec des lunettes je voyais flou.
Quand j’étais bébé, j’ai subi des opérations pour un problème de vue, la cataracte congénitale. En gros, j’ai l’œil gauche qui voit de loin mais pas de près et l’œil droit qui voit de près mais pas de loin. C’est héréditaire. J’ai une sœur et trois frères. On a tous le même problème dans la famille, eux et mes parents. Ça aide à être en confiance. On se comprend.
À l’école, mon handicap m’a beaucoup impacté, surtout avec des matières comme le français. Lire me fatiguait tellement les yeux que je ressortais de cours épuisé. D’ailleurs je ne pouvais lire que si les photocopies étaient faites. C’est des photocopies écrites en gros, avec la police Arial pour que je voie. Quand les photocopies n’étaient pas faites, les professeurs venaient me lire le document.
Mes camarades ne pouvaient pas m’aider durant les cours car ils devaient suivre. Ils ne se sont jamais moqués de moi. Ils m’ont encouragé parce qu’ils savaient que c’était dur. Quand la prof de français nous donnait un livre à lire, j’utilisais une loupe en longueur qui me permettait de mieux voir. La lecture m’a toujours fatigué les yeux. À part en cours de français, je n’ai jamais ouvert un livre.
Une scolarité aménagée et apaisée
Heureusement, en cours, j’avais une personne à côté de moi durant toute la journée. Elle m’aidait énormément. Depuis la maternelle, j’ai une dame qui m’accompagne à l’école. Une ASEM, c’est une personne qui est avec toi durant tous les cours de la journée : elle m’aide à faire des activités, elle fait les photocopies pour que je puisse lire.
Pour les contrôles elle m’aidait, elle ouvrait une page Word sur un ordi, en gros caractères, je répondais à l’oral et elle écrivait pour moi. À la fin du contrôle, le prof venait avec une clé USB pour récupérer ce que j’avais fait. J’ai eu quatre ASEM durant toute ma scolarité. Grâce à elles, j’ai pu avoir une scolarité plus apaisée.
Pour avoir une ASEM, il faut remplir des dossiers. Ma mère, pour les remplir, a demandé de l’aide à l’infirmière du collège parce que c’est un peu compliqué quand on connait pas. Elle a dit à ma mère qu’elle pouvait faire un Plan d’accompagnement personnalisé (PAP), un dispositif pour les élèves qui ont besoin d’aménagements particuliers.
Ma mère s’est donc déplacée au lycée pour constituer mon dossier. En plus de l’accompagnement de ma mère dans les démarches administratives, c’est l’infirmière qui prévenait tous les profs de mon handicap. Elle a eu un rôle très important dans ma scolarité. Si elle n’avait pas été là, ma mère n’aurait pas pu remplir le dossier pour obtenir de l’aide.
Le PAP, ça m’a beaucoup aidé pour obtenir mon bac car j’avais du temps en plus pour les évaluations. J’ai eu le bac malgré mon problème de vue, je me suis battu. Malheureusement, toutes les personnes en situation de handicap n’ont pas accès à ces aides. L’école peut être adaptée aux personnes en situation de handicap, mais tous ceux qui ont un problème n’ont pas la chance d’avoir une ASEM car il en manque énormément en Île-de-France. Sans ASEM je n’aurais pas pu suivre en cours et je n’aurais pas obtenu mon brevet ni mon bac.
Brice, 18 ans, en recherche d’emploi, Romainville