16 ans après, j’ai retrouvé ma sœur par hasard
J’ai eu très peu l’opportunité de connaître ma mère avant son décès, en 2017. J’ai été placée dans des foyers et des familles d’accueil jusqu’à presque ma majorité. J’avais à peu près 13 ou 14 ans quand j’ai rencontré ma mère. Je vivais en foyer depuis mes 2 ans et demi car elle avait des problèmes d’alcool et un mari violent. Les jours où on parlait famille, elle n’avait jamais évoqué l’existence d’un autre enfant que mon petit frère. J’ai aussi des demi-frères et sœurs avec qui je suis en contact.
Jusqu’à l’hiver 2014. Je me trouve à la gare Montparnasse avec des amis. On boit un coup et on décompresse de la semaine de formation, et des cours pour certains. Un groupe d’amis nous rejoint pour qu’on parte en discothèque. Parmi eux, il y a une fille et deux autres personnes que je ne connais pas. Pendant la soirée, on s’entend bien avec cette fille.
Amies pendant plusieurs années
Je garde le contact avec elle. Pendant de nombreuses années, je reste amie avec elle et on se voit régulièrement. Au fur et à mesure, on s’est trouvé plusieurs points communs : notre folie, nos crises de nerfs, nos goûts pour la même cuisine, la même manière de se coiffer…
Jusqu’au jour où on revenait de soirée. Je l’ai raccompagnée et j’ai dormi chez elle. Le lendemain, on est allées chez sa mère adoptive pour lui ramener des courses. Elle m’avait déjà parlé de sa vie, du fait qu’elle ne connaissait pas sa vraie famille, qu’elle avait un fils et que son père vivait au Comores mais qu’elle ne le connaissait pas. Avec sa mère, on s’est bien entendues. Au bout de la troisième visite, elle nous a demandé à toutes les deux de nous réunir pour un dîner. Je trouvais ça normal, on mangeait souvent ensemble. Mais elle nous a dit qu’on devait savoir certaines choses, qu’on était en âge de comprendre. Je me suis sentie frustrée. J’ai cru que c’était une blague, enfin je sais pas, un sentiment bizarre. Elle avait l’air émue et elle a ajouté que c’était Dieu qui avait fait en sorte qu’on se rencontre.
Une petite fille et un bébé sur la photo
Pendant le dîner, elle m’a soudainement posé un tas de questions. Elle m’a demandé d’où je venais, où j’avais grandi et si j’avais connu mes parents biologiques. C’était bizarre. Ma copine lui a dit : « Arrête, parle pas de notre vie privée, c’est notre invitée ! » Elle ne voulait pas me mettre mal à l’aise. J’ai répondu que j’avais grandi avec la DDASS et que ma vraie mère était décédée. La mère de ma pote est partie je ne sais où et est revenue avec un carnet de photos.
Elle m’en a montrées plusieurs, assez anciennes. Des photos de ma vraie mère. J’ai cru à une blague mais non, c’était réel. Il y avait aussi la photo d’une petite fille et d’un bébé plus petit. Elle nous a expliqué que c’était moi et ma sœur, qu’on avait été séparées à la naissance. Notre mère était très jeune et elle n’avait pas les moyens de s’occuper de deux enfants, elle-même étant dans la galère.
Ça a été un choc. Je n’avais pas de mot. Deux ans plus tard, on a fait des tests ADN, récupéré les actes de naissance et tout. Effectivement, c’était ma sœur.
La chance de connaître ma sœur séparée
On est restées en très bon contact. On reparle de ça très souvent, c’est un truc de ouf pour moi, je ne m’attendais pas à ça. Aujourd’hui, j’ai 24 ans et elle 29. On en profite pour rattraper toutes ces années où on nous a séparées. Après tout ce que j’ai vécu pendant mon enfance, je remercie Dieu de m’avoir fait ce cadeau. Il y a beaucoup de frères et sœurs séparés, abandonnés, adoptés, qui se cherchent pendant des années sans arriver à se retrouver. Moi, j’ai eu la chance de rencontrer ma sœur sans la chercher et sans savoir qu’elle existe. Je souhaite à beaucoup de gens de vivre ce moment. Grâce à elle, je suis la tata de son fils de 7 ans, il est très content d’avoir une tante.
J’ai ressenti de la joie, mais aussi une part de tristesse, en voyant qu’elle n’a pas pu connaître sa mère biologique. Mais au moins, elle m’a rencontrée moi. Je lui ai raconté les souvenirs que j’ai eu avec elle et ce qu’elle m’a dit avant de partir.
Lola, 24 ans, en formation, Paris