Gatien C. 11/03/2024

Une semaine dans un lit d’hôpital

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Un matin, dans la salle de sport du collège, Gatien tombe sur une barre en fer. Il est transporté rapidement à l’hôpital, mais est loin de se douter que son séjour sera plus long et douloureux que prévu.

J’ai bien douillé ce jour-là. Je crois que je n’ai jamais autant douillé de ma vie. J’étais en sixième, en cours de sport, quand je me suis pris une des barres en fer du gradin en plein dans le ventre. Avec mes potes, on s’amusait sur des tapis, on rebondissait dessus comme sur un trampoline. Sauf qu’à un moment, je me suis propulsé trop loin, en dehors du tapis. J’ai fait un aller simple vers le gradin d’à côté. Par chance, ma tête n’a pas été touchée. Sur le moment, je n’ai pas senti une extrême douleur au ventre. Je me suis levé, j’avais juste le tournis. Je me suis empressé d’aller aux toilettes pour vomir. Ce qui est sorti ressemblait plus à du sang qu’autre chose. Ma vue est devenue floue et j’ai failli m’évanouir.

Je suis revenue dans la salle, j’étais totalement sonné. Je me souviens juste qu’on m’a fait marcher un peu pour ensuite me raccompagner en voiture vers le collège, pour voir l’infirmière. Ce dont je me souviens, c’est qu’une fois arrivés, elle a appelé ma mère pour la prévenir de la situation et une ambulance. Les pompiers m’ont pris en charge et amené à l’hôpital le plus proche. Comme j’étais dans la lune, je me suis endormi dans le camion malgré le bruit intense des sirènes.

Retour à l’hôpital

À mon arrivée, on m’a assis dans une chambre, sur un petit lit, histoire de patienter. On m’a posé des questions sur l’accident et, après au moins une heure trente, on m’a donné une compote et on m’a dit que je pouvais sortir. Je marchais comme une personne de 90 ans. J’étais tout penché en avant, incapable de me redresser sans que ça me fasse mal au ventre. Mon père m’a ramené chez moi. Une fois rentré, je me suis fait mon meilleur sandwich jambon-fromage pour le déjeuner.

Sauf que, une fois assis dans le canap’, j’ai commencé à hurler de douleur. C’était indescriptible tellement ça faisait mal. Mon épaule gauche me faisait tellement souffrir que, premier degré, j’ai cru crever. J’avais l’impression que plus je criais fort, moins j’avais mal. J’ai hurlé tous mes poumons. Je n’ai jamais vu mes parents décrocher aussi vite leur téléphone pour appeler les urgences. Ils m’ont probablement entendu crier à travers leur téléphone car, deux minutes après, ils étaient déjà là. Ils m’ont pris en charge instantanément et, à l’hôpital, on m’a directement mit sous perfusion, probablement pour faire passer des antidouleurs.

Début d’un long calvaire

J’ai dû attendre au moins une heure avant la première prise en charge, une échographie. Quand ça appuyait sur le côté gauche de mon ventre, la douleur s’intensifiait. J’ai attendu encore une fois sur une chaise dans le hall principal, à côté d’autres personnes souffrantes. C’était une ambiance vraiment particulière. Vers 14 heures, on m’a palpé le ventre pour savoir où précisément j’avais mal. Cette fois, quelques heures sont passées. À 17 heures environ, et on m’a annoncé que je devais faire une radio. Je commençais à en avoir marre, il était maintenant 20 heures et je n’avais rien avalé depuis 9 heures du matin. J’avais faim, soif, j’étais claqué. Je voulais rentrer.

Enfin, à 21 heures, on m’a fait faire un scanner. Quand j’en suis sorti, on m’a amené dans une chambre. Je ne suis pas débile, j’ai compris instantanément que j’allais passer la nuit là-bas. On m’a dit que je pouvais boire un peu d’eau, mais pas trop, au cas où je devais me faire opérer en urgence… Là, j’ai bugué : « Attendez, comment ça « opérer » ? Je ne suis pas au courant moi ? » On m’a alors dit que ma rate, un organe similaire au foie, avait été fissurée pendant le choc. J’étais tellement fatigué que je me suis endormi. Avant de fermer les yeux, j’ai vu ma mère parler avec une personne du personnel, elle avait un regard inquiet.

Je me suis réveillé pendant la nuit, en plus de ma perfusion au bras droit, j’avais des appareils inconnus sur mon ventre et un autre, sûrement pour prendre ma tension, branché au bout de mon index. Ma mère était à côté de moi, endormie. J’ai essayé de me rendormir, en me disant que demain était un autre jour. Sauf que j’ai eu énormément de mal à dormir cette nuit-là. Normal quand tu es entouré d’appareils que tu ne connais pas, dans un lit pas confortable et que tu entends des « bip » sortir de je ne sais où.

L’annonce du diagnostic

À mon réveil, une infirmière est enfin passée pour me parler de ce qui s’était passé la veille. Elle m’a dit que, suite à mon choc avec les gradins, du sang s’était propagé dans mon corps, probablement parce qu’on m’avait fait marcher, et que je devais rester ici pendant quelques jours. Après, on m’a apporté un petit-déjeuner. Il était composé d’un petit croissant assez dur, un peu de pâte à tartiner et une compote de pomme. J’ai juste mangé la compote, je n’arrivais pas à avaler quoi que ce soit d’autre.

Plus tard, elle m’a aussi expliqué que, suite à la propagation de mon sang dans mon corps, du sang avait touché un nerf relié à l’épaule gauche. C’est pour ça que j’avais hurlé de douleur la journée d’avant. Elle a aussi dit qu’il avait touché un de mes poumons, ce qui aurait pu être très dangereux. Elle m’a demandé de faire une sorte de rééducation, trois fois par jour. Je devais souffler dans une bouteille avec une paille pour faire des bulles. C’était drôle en vrai.

Lassé mais bien entouré

Qu’est-ce que c’était long d’attendre dans un lit sans rien faire. Les pires moments, c’était la nuit. Les bips constants et le mal de ventre qui perdure… C’était si dur de patienter jusqu’à ce que le jour se lève enfin… À force de rester allongé et immobile sur un lit, j’ai attrapé des sortes de bouton dans le dos. Il a fallu actionner le mode « vagues » avec le matelas. C’était tellement désagréable, imaginez dormir sur un matelas qui bouge mais avec des grandes vagues dans le dos. Comment font les gens pour dormir avec ça en fait ?

Heureusement, j’ai reçu de la visite, de mes frères et sœurs. Ils m’ont encouragé et sont restés avec moi pour jouer aux cartes, ça m’a détendu, parce que mine de rien j’avais encore mal. Quelques amis sont aussi venus pour prendre de mes nouvelles. J’ai même reçu une lettre d’encouragement de toute la classe avec des petits mots de chacun. C’était gentil de leur part vu que je n’avais pas beaucoup d’amis. J’ai aussi vu des clowns solidaires, je crois qu’ils s’appellent comme ça. Ils passent de chambre en chambre pour donner le sourire aux enfants. J’ai un peu ri avec eux mais pas grand-chose de plus, je n’avais plus 8 ans.

Petit à petit, une routine s’est installée. Les jours se ressemblaient. Le réveil, le petit-déjeuner que je mange à moitié, le déjeuner pas très bon mais faut bien manger, le petit moment jeu vidéo, et le soir où je dors vraiment peu à cause de la douleur et de l’ambiance.

« La plus longue semaine de ma vie »

J’attendais patiemment le jour où je pourrais sortir. C’est arrivé au bout du septième jour. Les infirmières sont venues me voir en disant que je pourrais probablement sortir cet aprèm si je me sentais bien. Il fallait juste que je réussisse à marcher. Je ne m’étais pas levé depuis une semaine donc je n’étais pas trop confiant. J’ai mis mes pieds au sol et j’ai forcé sur mes jambes avec l’aide des infirmières. J’ai tout de suite eu la nausée et je me suis assis. Quelques minutes plus tard, j’ai réessayé et ça s’est bien mieux passé.

J’ai donc enfin pu sortir ! Bon, sous certaines conditions, rester en fauteuil roulant pendant sept jours, puis en béquilles pendant sept autres et interdiction de sport pendant deux mois. C’était vraiment très long. Enfin bref, j’ai passé la semaine la plus longue de ma vie à l’hôpital. Ça m’a appris à faire bien plus attention. Parce que je n’ai aucune envie d’y retourner.

Gatien, 18 ans, volontaire en service civique, Lille

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