Sally T. 08/07/2018

J’ai découvert le racisme à l’école et je ne me suis pas laissée faire !

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Quand j'ai quitté Saint-Denis pour aménager du côté de Bastille, à Paris, j'ai tout de suite senti que pour moi, ça n'allait pas être facile. À l'école : insultes et moqueries. Mais je ne me suis pas laissée faire...

Je rentre en CE2 à Bastille, dans un quartier animé. J’ai déménagé il y a deux semaines, à côté de la Garde Nationale. Premier jour d’école : mon père m’accompagne. Je rentre dans l’établissement, très grand et plutôt bien tenu, en pierre beige.Je suis accueillie par la directrice. Elle a le visage fermé. Elle me conduit dans ma classe, au 2ème étage, au bout du couloir. La maîtresse m’accueille gentiment. Dans la classe, les gens me regardent bizarrement. Seul un petit groupe ne me dévisage pas. Je me présente. Certaines personnes se moquent de mon prénom, l’enseignante leur demande d’arrêter. Les jours, les semaines, les mois passent. J’ai quelques amis : Fatim, Enzo, Manon, Lou… Mais plus on avance, plus je découvre le racisme avec les gens de l’école qui m’insultent et se moquent de moi : «Sale africaine», «sale noire», «singe», «retourne dans ton pays». Au début, je ne réponds pas. Mais un jour, ça dégénère.

Ce jour-là, je suis de mauvaise humeur car je viens d’apprendre que ma grand-mère, au Sénégal, a fait une rechute (elle est très malade). Pendant la récréation, deux garçons de ma classe viennent me provoquer. Au début, je les ignore, mais quand ils commencent leurs moqueries pleines de racisme et les railleries sur mon prénom, qui est celui de ma grand-mère, je me mets à les frapper violemment. L’un des deux part en courant, l’autre a la lèvre et le nez en sang, et une bosse.

À Saint-Denis, les gens du quartier étaient comme une famille

C’est depuis ce jour là que j’ai décidé de ne plus me laisser faire. Au début, c’était en les insultant et en étant violente, mais j’ai appris à me défendre en parlant calmement. Cela a plus d’impact sur leur conscience. Après, ils me laissent tranquille.

Pour se défendre et se faire entendre, Youmna a choisi l’arme de son compte Instagram. Elle y partage ses photos et ses coups de gueule contre le racisme, la grossophobie ou encore l’homophobie.

Bizarrement, mes parents n’ont jamais été convoqués et de mon côté, je ne leur ai jamais rien dit. Eux, ils étaient contents de quitter notre ancien quartier à Saint-Denis. Moi, non, car même s’il y avait beaucoup de délinquance, je m’y sentais bien. Les gens du quartier étaient comme une famille qui m’enrichissait, des gens qui ont vécu beaucoup de choses, et des gens de tous horizons. Souvent, je continuais à y aller.

Au milieu de mon année de CM1, mes parents m’ont annoncé qu’on allait à nouveau déménager, dans le 15ème, un quartier plutôt animé et avec de la mixité. Même si ces années à Bastille ont été difficiles, cela m’a fait gagner en maturité et j’arrive beaucoup mieux à canaliser ma colère.

 

Sally, 15 ans , lycéenne, Paris

Crédit photo AdobeStock // © Irina Levitskaya

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