Après trois filières à la fac, j’ai enfin trouvé ma voie
En terminale S, j’avais pour projet de devenir médecin militaire. J’aurais aimé qu’on me parle davantage du « post-bac » que du bac en lui-même, ça m’aurait certainement évité de me chercher autant. Parce que me réorienter, je l’ai vu comme un échec.
L’armée m’a toujours attirée. Le métier de médecin militaire m’aurait permis d’allier ma passion pour les sciences et mon amour pour l’armée. J’avais entendu parler du concours permettant d’intégrer l’École de santé des armées grâce aux différents fascicules ONISEP mis à la disposition des lycéens. J’ai préparé ce concours avec rigueur car il est exigeant : sur 1800 à 2000 demandes, seuls 150 à 200 élèves sont retenus pour faire leur rentrée à l’école. Pour mettre toutes les chances de mon côté, mes parents se sont endettés pour me payer une prépa privée assurant une bonne préparation au concours. Mais malgré mon investissement, j’ai échoué.
N’ayant pas envisagé l’échec, je me suis retrouvée en licence de biologie à Paris Diderot. Je voulais me familiariser avec le monde biologique en attendant de retenter mon concours. Mais plus j’avançais en bio, plus je me rendais compte que je ne voulais pas faire des sciences toute ma vie. Un domaine comme les sciences nécessite une véritable passion et un projet d’avenir concret. Mais moi, je ne me voyais pas continuer dans cette voie.
La réorientation, c’est un sujet tabou, une honte
J’ai envisagé la réorientation, même si c’est tabou. C’est vu comme un échec, voire une honte. C’est le droit qui m’attirait mais je n’ai pas eu le courage de me lancer. Surtout en raison des remarques de mes anciens profs de français et de mon entourage. Ajoutez à cela l’échec du concours (qui était encore douloureux), j’ai repoussé l’idée d’être juriste.
Tous mes profs de français sans exception m’ont toujours dit que je ne pourrai pas envisager de filière « littéraire » en raison de ma mauvaise expression. Et mes proches trouvaient que le droit était trop exigeant et que je n’avais pas les capacités que cela nécessitait. Je n’aurais peut-être pas dû accorder trop d’importance à leurs mots. Malheureusement, j’ai fait mes études dans un collège ZEP [actuel REP] dans le 19e arrondissement. J’avais donc tendance à penser que ces profs avaient raison : je venais d’un milieu populaire et par conséquent, j’avais moins de savoir qu’eux.
C’était une erreur, le milieu social ne donne pas moins de légitimité à la réussite. D’où je viens ne détermine pas où je serai. J’avais d’ailleurs pu décrocher une place dans un lycée prestigieux, Hélène Boucher à Paris, grâce à mes bons résultats !
Plutôt qu’en droit, je me suis retrouvée en gestion. Les premiers mois, je me forçais à m’accrocher. Je me disais que l’amour pour la filière viendrait à force de travail, mais je me trompais. Les mois ont passé et les résultats du premier semestre sont tombés. Ils étaient bien évidemment catastrophiques. Malgré ça, j’ai quand même continué à m’accrocher pour le deuxième semestre. Puis j’ai fini par réaliser que cette voie ne me permettait pas non plus de m’épanouir.
J’ai caché que j’allais en droit, le temps de réussir
Deux jours avant la fermeture des voeux sur Parcoursup, je suis revenue à mon choix de départ : j’ai proposé mon dossier pour différentes licences de droit. En septembre dernier, j’ai fait ma rentrée (pour la troisième fois) en L1, à La Sorbonne. C’était déjà une pression pour moi alors j’ai préféré m’éviter celle de mes proches : je leur ai caché mon cursus jusqu’à la fin de l’année scolaire. Je les ai laissés croire que je poursuivais toujours ma licence de gestion.
On a tendance à dire que la fac de droit, c’est très dur, remplie d’élèves hautains et compétitifs mais toutes ces étiquettes je ne les ai pas vues. Pour avoir fait trois filières différentes, la L1 de droit n’était pas si difficile ! Elle demandait simplement beaucoup de travail, un travail régulier et rigoureux.
La preuve ? C’est celle où j’ai obtenu les meilleurs résultats, en comparaison aux autres L1 que j’ai faites (et pourtant on avait tendance à me dire que c’était des filières « faciles »).
Samy a lui aussi enchaîné les formations et les boulots avant d’être épanoui dans sa voie professionnelle. Au total, il aura mis huit ans à trouver son futur travail !
Dernièrement, je suis rentrée en L2. Cette discipline me passionne toujours autant, bien que la deuxième année semble plus dure. Mes proches sont à présent au courant et sont heureux de mon épanouissement. Pour l’instant, je n’ai pas de réel projet professionnel. Je sais simplement que je souhaite continuer jusqu’au master pour pouvoir, par la suite, tenter les différents concours et examens proposés aux juristes.
Alors, ne vous fiez pas à ce que l’on vous dit, croyez simplement en vous-même, en vos capacités. Nul ne vous connaît mieux que vous-même. Il vaut mieux perdre quelques années et décider que ça change que de continuer à en perdre non ? Une fois que vous trouverez votre voie, ce qui vous viendra à l’esprit n’est pas « mince j’ai perdu X années avant d’y arriver », mais « heureusement que je l’ai fait ».
May, 21 ans, étudiante, Paris
Crédit photo Unsplash // CC Ashley Batz