Cheick G. 11/01/2021

Guinée confiné au Maroc, en Espagne et en France

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Arrivé de Guinée en période de Covid-19, Cheick a été confiné dans trois pays différents. Après des mois de stress intense, sa vie commence à se stabiliser, doucement.

Quand j’ai quitté la Guinée, il n’ y avait pas la maladie. C’est arrivé un mois après mon arrivée au Maroc. J’ai commencé à entendre parler de la maladie, du virus qui commençait à tuer des milliers de personnes en Chine et en Europe. On nous a confinés,  j’étais dans un foyer. Mais au Maroc, les gens ne respectent pas les consignes données, le port des masques, la distance barrière, de rester confiné à la maison.

Un mois après, je suis rentré en Espagne. Et là aussi : confiné. Mais là, c’était respecté. J’ai fait trois mois confiné dans un foyer pour mineurs dans la capitale espagnole : Madrid. Pendant les trois mois passés dans le foyer, on dormait, deux personnes par chambre dans un lit superposé. On ne sortait pas dehors, on devait rester dans la cour. Sauf quand on était malade, là, on nous emmenait en voiture dans un hôpital. J’y ai été deux fois, à cause d’hémorroïdes. J’étais triste et stressé. Trois mois dans un foyer, c’était très difficile pour moi.

Je voulais quitter le plus tôt possible l’Espagne. On nous disait : « On est rentrés dans une mauvaise période. Le moment est très dangereux. La maladie a fait beaucoup de dégâts en Europe et beaucoup en Espagne. Les frontières sont fermées. Même les lieux de travail, les lieux publics. » On nous disait donc d’attendre jusqu’à la fin du confinement.

Bordeaux, grâce à un joueur de foot guinéen

Après les trois mois de confinement, j’ai pris le bus pour la frontière entre l’Espagne et la France. C’est l’association espagnole qui nous a acheté les billets. On était cinq. Je ne voulais pas rester en Espagne parce que je ne comprenais pas l’espagnol, le français oui. J’ai passé la nuit là-bas, à la frontière, à la Croix-Rouge. Le lendemain, j’ai pris le train pour la France. Je suis venu à Bordeaux. Je connaissais la ville parce que je regarde les matchs des Girondins de Bordeaux depuis le pays, à cause d’un joueur guinéen qui joue dans le club des Girondins de Bordeaux. Il se nomme François Kamano.

Je ne connaissais personne. Je me suis dirigé vers la police pour me présenter : « Je suis un jeune mineur migrant, je viens d’arriver à Bordeaux. Je connais personne. J’ai pas là où dormir. » On m’a bien accueilli.

On m’a dirigé vers l’association qui s’occupe des jeunes mineurs à Bordeaux. Arrivé là-bas, on m’a posé des questions. J’ai répondu. On m’a bien accueilli aussi et bien logé dans un hôtel à côté de la Gare Saint-Jean. On était deux personnes dans la  chambre, on dormait dans un lit superposé. Moi je me couchais en bas, mon ami pakistanais dormait en haut. Il parlait un tout petit peu français. Parfois, on parlait avec des gestes. Il y avait une télé dans notre chambre. La télé nous permettait de rester à la maison sans sortir. On sortait juste pour aller prendre à manger dans un restaurant. On prenait deux fois par jour à midi et à 19 heures. On mangeait très bien.

La fin de plusieurs mois de stress total

Quelques mois après j’ai été reconnu comme un jeune mineur. On m’a transféré à Libourne dans une autre association : Don Bosko. Arrivé à Libourne, le 13 janvier, on m’a… confiné ! Deux semaines dans un appartement. Je ne sortais pas. C’est eux qui faisaient nos courses pour la maison. J’étais trop stressé. Je ne faisais rien : manger, dormir, regarder la télé. Après les deux semaines de confinement,  j’ai commencé les cours de français et de mathématiques au bureau de l’association. Il y avait une dame qui me donnait les cours deux fois par semaine.

Moi, je pensais arriver en France et que tout allait se passer vite pour moi pour commencer les cours, la  formation, les stages, mais c’était la merde pour moi. Le stress total. J’ai passé des mois très difficiles, mais aujourd’hui, les choses commencent à aller bien. J’ai commencé les cours au lycée Jean Monnet de Libourne et bientôt je vais commencer les stages aussi. Je me sens un peu bien pour le moment.

 

Cheick, 17 ans, lycéen, Libourne

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