Des colis entre mes deux pays
Quand j’étais en Côte d’Ivoire, ma mère envoyait des habits et des chaussures. On allait récupérer ses cartons à l’aéroport. Des cartons très gros avec plein de choses dedans. Ça pouvait être un, deux ou trois cartons. On avait un carton chacun, ma soeur jumelle, mon frère et moi. Mon père, lui, récupérait seulement l’argent.
Après les avoir ouverts, je la remerciais sur WhatsApp. On l’appelait en vidéo et elle nous disait : « Ça c’est à toi, ça c’est à elle, ça c’est à lui. » C’était un peu comme un anniversaire. Alors que je ne le fêtais pas en plus.
Maintenant que je suis en France, c’est à moi de faire tout ça.
L’argent d’ici c’est beaucoup pour là-bas
Hier, on a fait quatre cartons parce que ma mère continue à envoyer de l’argent et des habits en Côte d’Ivoire pour ma sœur et mon frère. En 2019, je suis venue en France, ma mère y était déjà depuis quatre ans. Je suis restée tout ce temps avec mon père à Abidjan. Mes parents sont séparés. Ma jumelle est restée là-bas, en Côte d’Ivoire, à cause du Covid. Elle va bientôt me rejoindre. J’aime la France parce qu’ici, on ne frappe pas. En Côte d’Ivoire, on frappe comme on veut et on tue les gens sans raison et c’est trop dangereux. J’ai demandé à ma mère de la rejoindre pour quitter tout ça.
Ahouefa, née au Bénin, est aussi arrivée en France quand elle était enfant. Pour elle, il a été difficile de trouver un équilibre entre culture d’accueil et culture d’origine.
On fait des cartons parce que, là-bas, les habits sont chers ! Et surtout que l’argent d’ici c’est beaucoup pour là-bas, mais tout le monde ne le fait pas. 1 euros c’est 650 francs CFA. Avec ça, on peut acheter des habits et des chaussures !
Des pagnes, des jus, des baskets…
Du coup, je ne sais pas pourquoi on fait des cartons… Peut-être pour mettre des choses qu’on n’a pas en Côte d’Ivoire ? Ma mère y met des pagnes, des jus (sodas), des baskets et habits de toutes les marques (Pumas, Nike, Adidas, Lacoste, Zara, Shein, Zalando…). Moi, quand j’en recevais et que j’allais les chercher à l’aéroport, c’était cool, j’aimais bien ça.
Avant de venir en France, j’ai donné tous ces habits à mes copines, parce qu’il fallait que je prenne une petite valise. Elles étaient très contentes. Après, je me suis fait des amis et j’ai oublié ceux en Côte d’Ivoire. Mais, tous les jours, j’appelle mon père et ma sœur sur WhatsApp. Ma jumelle, j’ai hâte qu’elle voit les habits que ma mère et moi avons choisis pour elle.
Massatié, 13 ans, collégienne, Paris
Crédit photo : Pexels // CC Cottonbro
Les transferts d’argent à la famille
Ils font vivre des millions de foyers
L’argent envoyé par les personnes des diasporas africaines à leurs familles constitue la principale source de revenus de millions de citoyen·ne·s. Les trois-quart de ces sommes sont en effet utilisées pour des dépenses de première nécessité.
Les trois-quart des diasporas africaines envoient de l’argent
Dans certains pays, ces transferts représentent jusqu’à 10 % du PIB. Sur l’ensemble du continent, ils rapportent plus d’argent que l’aide au développement fournie par les pays riches… et sont indispensables à l’économie du continent.
Les pays d’Afrique sont les plus taxés
Ces opérations représentent beaucoup d’argent, et les sociétés privées l’ont bien compris ! Les deux plus grosses, Western Union et MoneyGram, appliquent des taxes plus hautes pour les transferts vers les pays d’Afrique. Résultat, 680 millions d’euros sont prélevés en un an, soit 6 % de l’argent envoyé.