Soit je fraude le bus, soit je loupe des cours
Aucun moyen d’y échapper. Ils étaient là. J’étais posé avec mes écouteurs quand, soudain, j’ai aperçu des contrôleurs sur la route du lycée. Je n’avais pas de titre de transport. Je prends le bus tous les jours de Sarcelles jusqu’au Bourget, et tous les jours ça m’angoisse de les croiser.
Fort heureusement, ils ne m’ont mis aucune amende ce jour-là. Ils étaient compréhensifs et savaient que j’allais juste en cours.
Avec un SMIC pour trois, obligé de frauder
Le ticket de transport coûte 1,90 euros. Ça équivaut à environ 100 euros par mois, en comptant un aller-retour par jour. Un pass Navigo pourrait me faire économiser 25 euros, mais ça reste trop cher. Ma famille n’a pas les moyens. À trois, on doit vivre avec un SMIC et des aides…
J’ai d’autres choses à payer, comme la cantine, qui me revient à plus de 100 euros par mois, ou la salle de sport qui, elle, me prend 20 euros. Il y a aussi mon abonnement téléphonique qui, pareil, s’élève à 20 euros le mois. En plus de ça, il y a tout ce qui concerne les besoins de la famille, comme la nourriture. Je me résous donc, malgré moi, à frauder pour aller au lycée.
Avant, j’habitais à Compiègne et le bus était gratuit pour tout le monde. Donc, faire payer les transports, c’est comme faire payer l’eau du robinet alors qu’elle est gratuite ailleurs !
Angoissé, comme si j’étais un criminel
Je dois tout le temps être à l’affût, afin d’éviter tout contact avec les contrôleurs. La plupart du temps, ils ne sont pas présents mais il peut m’arriver d’en voir, en groupe de trois ou quatre. Devoir regarder à chaque arrêt, chaque personne qui attend… C’est à en devenir paranoïaque !
Quand j’en vois, je ne prends pas le bus. Et, du coup, je rate des cours parce que je dois attendre le suivant. C’est embêtant car si cela m’arrive en période d’examen, je peux possiblement louper une heure.
Jérémy habite à la campagne, à 30 kilomètres de Rennes. Entre le lycée, ses activités sportives et sa famille à visiter, il passe sa vie dans les transports.
Pour moi, la RATP a une image de groupe vénal, qui aime l’argent. Ils n’ont pas une très bonne réputation. Une réduction du coût des transports pourrait aider de nombreuses familles qui ont des problèmes financiers ! Moi, je pourrais aller étudier plus tranquillement et, par la suite, travailler sans avoir à regarder à gauche à droite à chaque arrêt. Comme si j’avais commis un crime.
Arko, 18 ans, lycéen, Le Bourget
Crédit photo Unsplash // CC Mediocre Studio
Payer pour aller jusqu’à l’école
En France, l’école publique est gratuite… Encore faut-il avoir les moyens de s’y rendre. Les transports scolaires dépendent des régions, des départements ou des agglomérations. Du coup, quand ils décident de rendre le bus gratuit, c’est bien… mais ça ne concerne pas tout le monde.
La ville de Paris, par exemple, rembourse l’abonnement Navigo des moins de 18 ans. Le problème, c’est que ce dispositif ne concerne que les Parisien·nes… En banlieue, on continue à payer le bus pour aller en cours !