Du violon au MMA
Mes premières séances de violon, c’était compliqué. Il n’y avait pas le feeling entre lui et moi, et il n’a jamais voulu se soumettre bien longtemps. J’en faisais quand j’étais en CM1. J’avais des préjugés, notamment sur cet instrument.
C’est ma mère qui voulait que je fasse du violon, pour faire comme les riches. Je pensais que ça ne se résumait qu’à ça, mais l’idée derrière c’était aussi de m’éloigner de la rue. Comme elle travaillait, je rentrais tout seul de l’école avec ma sœur et on allait au parc du quartier. Elle n’aimait pas ne pas savoir quel genre de fréquentations je pouvais avoir là-bas.
En vrai, ce n’est pas donné d’en faire. Là, il y avait l’occasion, c’est l’association de quartier qui proposait des cours. C’était limité niveau places alors, quand elle a vu ça, elle m’a inscrit. C’est quelque chose qu’elle n’aurait pas pu se permettre de m’offrir. Pour autant, je ne me suis jamais senti pauvre. Ma mère nous faisait garder les pieds sur terre en nous racontant la vie dans son pays. Elle vient du Sénégal, et le confort d’ici n’est pas comparable avec le quotidien de là-bas.
Chez moi, je me faisais tailler parce que je faisais du violon, surtout par ma petite sœur. Je n’en parlais pas à mes potes non plus, mais une autre fille de mon quartier suivait les cours, donc ça n’a pas tardé à se savoir. À chaque fois que j’y allais, j’avais l’impression de perdre du temps.
Une toute autre voie
C’est là que j’ai commencé à m’intéresser aux sports de combat. Un ami avait mis en place une ligue de MMA au sein de son propre lycée. C’était des matchs clandestins à la IbraTV, en plein stade avec un arbitre. Moi, j’ai trouvé mon club en allant manger dans un kebab où j’ai l’habitude d’aller. Il y avait un prospectus sur une salle qui venait d’ouvrir. Je me suis renseigné et j’ai fait un cours d’essai.
Ce que j’aime par-dessus tout dans le MMA, c’est que tu te découvres toi-même. On ne pratique pas ce sport comme on s’entraîne au foot. Chaque combat peut être le dernier. Si tu abandonnes à l’entraînement, ça veut dire que tu vas abandonner le jour du combat, et même dans la vie de tous les jours. Alors je donne tout. Le MMA, c’est ce qui est le plus proche d’un affrontement dans la vraie vie. Il y a très peu de règles. Que tu sois au sol ou debout, tu dois combattre en continu. C’est ce qui en fait un « mix » de tous les arts martiaux.
Aujourd’hui, j’ai arrêté le violon, mais c’est une expérience qui m’a fait grandir et qui m’a appris à être ouvert d’esprit : je vais toujours chercher à comprendre avant de critiquer. Ma mère ne sait toujours pas que je fais du MMA. Elle le saura le jour de mon premier combat et, ce jour-là, je ne pourrai pas perdre.
Nabil Ali, 19 ans, en formation, Paris