Courir vers la confiance en soi
« Vous voyez ça ? C’est absolument pas ce genre de passe qu’il faut faire. » Voilà ce qu’a dit ma professeure d’EPS devant tous mes camarades, en cinquième, quand j’ai montré comment faire une passe en volley. J’ai eu honte. J’ai rougi. Au collège, les cours d’EPS m’ont persuadée que le sport, ce n’était pas pour moi.
Chaque séance se passait de la même manière. Les garçons étaient constamment nommés chef d’équipe. Même s’il ne fallait pas « que ce soit toujours les mêmes »… Ensuite, chaque capitaine choisissait les plus forts. Les autres soufflaient à leur chef des remarques comme : « Choisis lui, ça se voit qu’il est plus fort que l’autre. » Puis, je voyais bien qu’ils ne choisissaient plus en fonction des critères sportifs, mais de l’apparence. « Je préfère elle que les deux autres »… J’avais l’impression qu’on était dans une compétition de beauté malsaine.
Lorsque les matchs démarraient, il fallait des remplaçants. Aucun garçon ne voulait être au banc. Ils demandaient à chaque fille : « T’es sûre que tu veux jouer, toi ? » On avait hâte d’être sur le terrain, mais on finissait sur le banc des remplaçants. Je me disais que je n’étais sûrement pas douée. Quand l’équipe avait besoin de remplaçants, je n’attendais plus qu’on me pose la fameuse question : j’allais directement sur le banc. J’y retrouvais mes copines de banc. Elles me disaient souvent en plaisantant : « Ça va être l’heure de permanence. » Jusqu’à la fin de mes années collège, je n’ai joué qu’un match sur quatre.
15 au bac de sport
Mes rares fois sur le terrain, si je faisais des mauvaises passes, c’était la fin du monde. Les garçons me prenaient de haut : « T’es sûre que tu connais les règles de ce sport ? » ; « Je vais te montrer c’est quoi une vraie passe. » Lorsqu’un garçon ratait son coup, les mêmes le rassuraient en affirmant que c’était une situation « qui pouvait arriver ». Et l’enseignant n’intervenait presque jamais. Je me suis investie en maths et en français. Là, personne ne me disait que je n’avais pas ma place.
En troisième, dès que les barrières sanitaires ont été assouplies, j’ai eu envie de faire de la course. Je ne voulais pas de sport collectif. Je me suis tout de suite sentie plus libre. Personne ne m’imposait le nombre de kilomètres à réaliser ou d’aller plus vite. J’étais comme les garçons hyper confiants de ma classe de collège. Au fil des courses, j’étais capable de faire le tour du parc départemental. Ça m’a pris un peu plus d’un an et demi, mais j’étais assez fière de moi.
En arrivant en première, je n’avais plus le temps de me consacrer à la course. Mais en terminale, j’ai retrouvé le demi-fond parmi les différents menus proposés au baccalauréat d’EPS. Les courses en seconde m’avaient donné confiance en moi. Dans les sports collectifs, j’ai réalisé que je pouvais tenir quatre matchs d’affilée sans aller sur le banc. Puis, j’ai fini par avoir 15 au bac de sport. Je n’étais plus la remplaçante pour les garçons, plus la nulle au cours d’EPS.
Catrine, 18 ans, étudiante, Paris
Crédit photo Pexels // CC Tirachard Kumtanom
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