Un psy pour canaliser sa colère
« Arrête de frapper ! Tu vas le tuer ! » Ce soir-là, j’ai su que je ne contrôlais pas ma force.
C’est un vendredi. Avec des potes, on part au restaurant en voiture. On s’arrête à la banque pour retirer de l’argent. Un gros van nous dépasse. Ils sont armés et nous disent de descendre. Alors on sort, et ils nous prennent notre voiture. Du coup, on appelle nos potes pour qu’ils viennent nous aider. On part, cagoulés, pour les frapper. On met un mec du quartier ennemi dans le coma .
J’ai enchaîné les guerres de cité entre mes 15 et mes 16 ans. Je mettais ma sœur et ma mère en danger. Quand je faisais les courses avec elles, ça leur apportait des problèmes. Pareil quand elles allaient en cours, au sport…
J’ai eu des problèmes à la maison avec ça. Je frappais… Alors ma mère m’a dit : « Faudrait que t’ailles voir un psy pour contrôler ta force. » Au début, j’étais vraiment contre. Je séchais des jours de cours pour ne pas y aller.
Trouver son punching-ball
J’ai dû prendre un rendez-vous. Enfin, c’est ma mère qui l’a pris. C’était le 16 octobre 2021. J’ai parlé de mes problèmes au psy et, pendant un mois, il a trouvé les mots pour m’aider. Il me disait : « Qu’est-ce qui t’énerve à ce point-là ? »
Je lui ai expliqué avec du mal que j’avais un ami décédé à cause des histoires comme ça. Il arrivait à me détendre. Il m’aidait en appel quand je commençais à m’énerver.
Je me suis aussi excusé auprès de ma mère. Pour tout ce que j’avais fait, les problèmes que je lui avais amenés. Pour tous les moments où je n’avais pas contrôlé ma colère, quand je n’allais pas à l’école et que ça partait vraiment loin. L’école disait même qu’elle allait contacter l’assistante sociale.
J’ai arrêté d’aller voir le psy parce que ça me saoulait d’y aller… Ce n’était pas à côté de chez moi. C’était à 15-20 minutes à pied. Je suis un très gros flemmard. Et il y a des trucs que je n’avais pas envie de lui dire. Je n’avais pas envie de lui expliquer plus l’histoire de mon pote. Je n’aime pas pleurer devant les gens. Alors il m’a donné une petite balle antistress si jamais je m’énervais. Je l’ai eue pendant deux mois.
Le jour où j’y suis retourné pour lui rendre, il m’a demandé : « Comment ça va depuis le temps ? Est-ce que ça allait avec la balle ? » Je lui ai dit que, depuis, j’avais une balle de foot. Dès que je sentais que ça montait, je tapais dessus. Il m’a dit que c’était une très bonne idée. Aujourd’hui, j’ai toujours la balle. Elle est toute dégonflée.
Naël, 18 ans, en formation, Essonne
Crédit photo Pexels // CC MART PRODUCTION
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