Cyril I. 12/06/2020

Hyperactif, le diagnostic a été un déclic

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Incapable de tenir en place sur les bancs du collège, Cyril était la cible des professeurs. Jusqu’à ce qu’on diagnostique son hyperactivité.

Au collège, j’étais un élève pas comme les autres. J’étais très turbulent. Quand j’allais en cours, les profs avaient un air de dégoût. Ça arrivait qu’ils disent « oh non, pas lui ! ». Ou alors ils avaient une mine qui voulait dire la même chose. Ils ne me parlaient pas de la même manière qu’ils parlaient aux autres. J’avais l’impression qu’ils avaient moins de patience : pour les autres c’était au coin ou des retenues, pour moi c’était dehors direct. Tous les jours, je me faisais virer de cours. Je trouvais ça injuste.

C’est vrai que j’aimais faire rire mes potes et la classe, que j’étais souvent agité. Mes amis ne comprenaient pas pourquoi j’étais comme ça. Pour eux, je faisais exprès. Mais à l’intérieur de moi, j’étais comme une pile électrique. Je ne pouvais pas rester assis ! C’était plus fort que moi : quand je n’arrivais pas à faire un exercice, je déchirais ma feuille et je partais du cours. Me concentrer pendant deux heures, c’était impossible. Trop de trucs se passaient dans ma tête en même temps. Je me disais que ça me demandait trop d’efforts d’être là, à faire un truc que je n’aimais pas. J’avais plus envie de bouger que de travailler.

« Si t’es agité comme ça, c’est que t’es hyperactif »

Avec les profs, c’était catégorique, dès que je parlais c’était « dehors ! ». Et dans les rapports ils abusaient. Ils disaient « élève très insolent », « perturbe les cours », « manque de respect envers les profs et les élèves ». Un jour, j’ai eu un rapport très chaud de la part d’un prof, et à la suite de ça j’ai été convoqué. Il disait que je l’avais insulté, que j’étais insolent, alors que je n’avais rien dit et puis il a fait un geste pour dire que j’avais des problèmes psychologiques. Ça m’a tellement énervé : il ne me croit pas et en plus il me prend pour un mec fou ?

« Plongez en nos troubles » est un web-documentaire sur les enfants atteints de TDAH (Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité). L’équipe du film a suivi des jeunes de tout âge dans leurs établissements.

Je n’avais plus envie de venir à l’école. Mais mes parents me forçaient à y aller. Ma mère, elle était stricte avec moi et me faisait la morale : « C’est important l’école, comment tu vas faire dans la vie si t’as pas de culture générale ? » ou « C’est pas normal que tu sois comme ça à l’école alors qu’à la maison ça se passe bien. » Mes parents, ils savaient que j’étais embêtant pour les profs, mais pour eux j’étais comme tous les autres.

Au bout d’un moment, le CPE a dit à ma mère que ce n’était pas normal que TOUS les jours je sois agité, que TOUS les jours j’aie des rapports, que TOUS les jours je me fasse virer… Il lui a dit de me faire suivre pour voir s’il n’y avait pas de problèmes. Ma mère m’a emmené voir un spécialiste ; une sorte de médecin traitant qui gère les cas comme moi. Il m’a posé des questions genre : « Tu dors à quelle heure ? », « T’as un train de vie normal ? » Et à la fin, il m’a dit : « Si t’es agité comme ça, c’est que t’es hyperactif. » J’avais déjà entendu parlé de l’hyperactivité mais je ne savais pas ce que c’était donc je ne m’étais pas senti concerné.

Mon hyperactivité me rendait parfois plus fort

Mais c’est vrai que je n’étais pas comme les autres. Au collège, à 10h, tout le monde était fatigué, en avait déjà marre. Moi, j’étais toujours en pleine forme ! Des fois je faisais des nuits blanches, et j’allais à l’école à 7h. J’avais trop d’énergie. Vers la fin de la journée, mes amis me demandaient toujours pourquoi moi j’étais en pleine forme alors que la veille j’étais sur WhatsApp jusqu’à 4h du matin.

Sur ça, j’avais l’impression d’être plus fort que les autres. D’ailleurs en sport, j’ai toujours été le meilleur de la classe. En dehors de l’école, c’était différent. Je me sentais libre. J’pouvais faire ce que je voulais sans que personne ne me dise quoi que ce soit. J’traînais avec mes potes du quartier. Eux, ils ne me voyaient pas comme quelqu’un de différent parce qu’ils savaient pas ce qu’il se passait dans mon collège.

Il n’y a pas que l’hyperactivité qui peut handicaper. Multi-dys, Lise a pris du temps à s’adapter au système scolaire. Aujourd’hui, elle a trouvé sa voie professionnelle : être maquilleuse.

Finalement, mon médecin traitant m’a proposé de prendre des traitements, mais il a dit qu’on pouvait régler ça autrement parce que les médicaments étaient très forts. Il m’a conseillé de faire beaucoup de sport. Il m’a dit que ce n’était pas un truc grave, que ça pouvait arriver à n’importe quel jeune : « C’est juste que t’as beaucoup d’énergie ». Ça m’a rassuré, et ma mère aussi. Elle m’a dit de ne pas m’en faire, et que c’était comme ça. Elle m’a donné des conseils : partir dès que je ne peux plus tenir mais surtout, prévenir les profs pour qu’ils soient plus compréhensifs. Avoir mis des mots sur mon hyperactivité m’a permis de continuer mes études : aujourd’hui je suis en première, et je gère.

Cyril, 18 ans, lycéen, Montreuil

Crédit photo Unsplash // CC Max Bender

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