M’orienter à 20 ans, il n’était pas trop tard
Tout ce que je voulais, moi, c’était du temps. À la fin du collège, je ne savais pas où m’orienter et ma mère me répétait qu’il était important d’aller en filière générale. Alors je l’ai fait. Et là, tout s’est déroulé de manière mécanique.
À 15 ans, je suis rentrée en seconde. Je préférais ma vie sociale à l’école et je séchais les cours, mais ce n’était pas grave. J’avais le temps.
À 16 ans, j’ai redoublé. J’étais encore moins motivée que l’année d’avant, mais ce n’était pas grave. J’avais le temps.
À 17 ans, je n’avais pas d’orientation. Je me suis fait virer du lycée et ne savais pas quoi faire plus tard, mais ce n’était pas grave. J’avais le temps.
J’ai tenté l’école de la deuxième chance. Je m’y sentais obligée et, là-bas, je perdais vraiment mon temps, mais ce n’était pas grave. J’en avais encore. Ils finirent par me virer. Quand j’y pense, ça en fait des trucs d’où je me suis fait virer. On m’a envoyée à l’espace dynamique d’insertion. Mais rien ne me convenait.
Donc dès mes 18 ans je suis partie, mais ce n’était pas grave. J’avais le temps. Après, je n’ai plus rien fait de mes journées. Je ne comprenais pas pourquoi mais ma mère avait l’impression que je le perdais, mon temps.
Je serais déjà en train de travailler si j’avais su…
À presque 19 ans, ma copine m’a proposé de la rejoindre à son centre de formation en restauration. C’était mon amie, donc j’y suis allée et là, la révélation ! J’ai découvert que j’aimais la cuisine. Pourtant, avant, je savais même pas faire un plat de pâtes. Mais là, tout était plus concret. Ce n’était plus comme au lycée où on restait assis toute la journée à apprendre des trucs. En formation, tu travailles direct avec de vrais clients, dans une vraie cuisine. Tout va plus vite. Les formateurs sont gentils avec nous et s’adaptent vraiment à nous.
L’emploi du temps est fait en fonction de ce qu’on a besoin d’apprendre. C’est individualisé, pas comme dans le système scolaire classique où on s’intéresse à toi seulement pour remplir ton dossier de suivi. J’ai appris à aimer le contact avec les clients et ce n’était pas facile car, avant ça, j’étais très timide. Impossible d’aller parler aux gens.
« Je n’avais pas d’outils pour m’orienter. » En une phrase, Léopold résume ce qui l’a empêché de travailler dans le secteur automobile, alors qu’il en rêve depuis toujours. À l’école de la deuxième chance, il espère pouvoir se réorienter.
Je connais aussi des recettes maintenant, des choses essentielles qui servent beaucoup plus dans la vie qu’apprendre à devenir banquier. C’est devenu une passion et c’est en obtenant mon premier diplôme professionnel que je réalise aujourd’hui tout le temps que j’ai perdu. Dans mon lycée, il y avait une filière hôtelière que j’aurais pu intégrer plutôt qu’aller en général comme on me l’avait dit. À cette heure-ci, je serais déjà en train de travailler si j’avais su… J’ai eu du mal à m’orienter dès le départ et j’ai perdu du temps… Mais à presque 20 ans, il n’était pas trop tard.
Mélanie, 20 ans, en formation, Melun
Crédit Photo Unsplash // CC Jesús Terrés