On m’avait dit : « Travaille bien à l’école, tu auras un bon job… »
On me l’a répété, rabâché, presque promis depuis tout petit : « Travaille bien à l’école, tu auras un job ! Fais des études, tu pourras choisir ton travail ! » Ces phrases, je les ai entendues pendant toute ma scolarité, dans la bouche de mes professeurs, mais aussi de mes parents. À tel point que j’ai fini par me dire que c’était la seule voie possible : école, études, travail. Cependant, la réalité est toute autre.
Avec un master, on m’avait promis un job ! Alors avec deux…
J’ai eu un parcours scolaire des plus classiques : j’avais plus de facilités pour les sciences que pour les lettres. Du coup, je me suis naturellement orienté vers un parcours scientifique au lycée. Puis, le bac en poche, je me suis dirigé vers une licence physique/chimie à la fac (choix par défaut, mais je l’assumais). Six ans plus tard, je suis sorti de la fac avec deux masters, un master Matériaux Minces et Divisés en 2009 et master Matériaux Organiques en 2010.
J’étais encore naïf : avec un master, on m’avait promis un job à coup sûr, alors avec deux, imaginez… Un concours de circonstances a fait que j’ai trouvé un poste assez facilement, directement à la sortie de mes études (poste que j’aurais pu occuper même sans aucun diplôme). Coup de chance ? Déjà à ce moment-là, je me disais que oui.
Ce boulot n’avait pas vraiment de rapport avec la thématique de mes études. Cependant, je me suis dit : « Ce n’est pas grave, je trouverai comment valoriser cette expérience. » Mais quelque chose commençait à me travailler : sur mes deux promotions de master, la moitié des personnes de chaque promo (peu nombreuses, certes) n’avaient alors pas trouvé de poste dans le domaine de nos études. En discutant avec des personnes de mon entourage, je me suis rendu compte que ce n’était pas un phénomène isolé.
Trois années ont passé, j’ai fini par quitter mon boulot, car il ne m’intéressait pas vraiment et je n’arrivais pas à m’y épanouir. Je me suis donc lancé dans la phase de recherche d’emplois (phase par laquelle j’aurais normalement dû passer en sortant de mes études).
Sommes-nous trop de diplômés ?
Je me souviens qu’à la fac, on nous avait dit qu’avec un master, nous pouvions viser un poste de cadre. Mais à l’heure où le chômage explose, où les postes de cadres sont rares, annoncer cela à des étudiants sur le point d’être diplômés, sonne comme les diriger droit dans un piège.
Margaux raconte cette période de transition entre la fin des études et le début du salariat, dans ce flou administratif qui accompagne la première recherche d’emploi…
Car malgré tous mes envois de lettres de motivations et de CV, je n’ai reçu quasiment aucune réponse, à l’exception de quelques refus. Du coup, je me suis dit : « Tant pis, je vais viser un poste de technicien, niveau licence ». Mais non, ça aurait été trop simple. Car le résultat n’a pas été plus probant : aucune réponse. Et d’après ma conseillère APEC, « les recruteurs n’embauchent pas des personnes ayant un master pour des postes niveau licence, car ils ont peur que ces personnes démissionnent plus tard, après avoir trouvé mieux ». Qui peut le plus peut le moins ? Pas cette fois-ci en tout cas.
Par la suite, je me suis mis à croiser de plus en plus de gens diplômés d’un master, occupant pourtant des emplois précaires, en vacation ou hors de leurs domaines d’études. Je pose donc la question : comment en est-on arrivé là ? Sommes-nous trop nombreux à être diplômés ? Obtenir un master est-il devenu si peu sélectif que tout le monde y arrive ? Les diplômes sont-ils devenus trop spécialisés, créant ainsi des jeunes diplômés dans des filières bouchées ? Ces questions, je continue encore à me les poser actuellement… Et je n’ai pas encore trouvé de réponses.
Johann, 29 ans, médiateur scientifique, Marseille
Crédit photo SDE Europe
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