Mes parents et ma campagne m’ont rendue écolo
En septembre dernier, j’ai candidaté au projet proposé par le théâtre de La Colline « Ceux qui brûlent. Carte blanche à la jeunesse #2 ». Pendant une journée de spectacle, la parole est donnée à la jeunesse. En participant, j’avais en tête une grande préoccupation : l’écologie. Parce que depuis toute petite mes parents m’ont transmis l’impression d’une urgence écologique. Parce que j’ai grandi dans le Lot-et-Garonne.
Mes parents sont plutôt écolos et connus dans la région pour ça. Quand j’étais plus jeune, j’étais un peu vue comme une fille de babas cool, on ne savait pas trop encore ce qu’était l’écologie. J’ai grandi dans une maison à économie d’énergie : on n’a jamais payé de facture d’électricité ou d’eau. On avait des panneaux et des batteries solaires. C’est maintenant plutôt accepté – on en fait même des champs – mais à l’époque, c’était pas très répandu. En fait, j’ai grandi avec l’énergie du soleil ! L’eau venait d’une source dans notre forêt. J’ai su très tôt qu’il était possible d’avoir un autre mode de vie énergétique.
Lutter contre le nucléaire
À l’époque, mon père était engagé dans un parti écologique. Des luttes internes l’ont poussé à en sortir mais il a collaboré avec quelques conseillers environnementaux et il a bossé dans l’associatif contre le nucléaire. Depuis toute petite, mes parents m’ont trimballée dans toutes les manifs écolos de la région donc… j’ai plein de souvenirs de manifestations, d’assemblées générales. Ça m’a donné un bagage militant ! Quand j’étais petite, j’ai vu ces portraits d’enfants déformés par Tchernobyl et j’ai toujours trouvé qu’il y avait un écart entre les discours des politiques et l’usage fait de cette énergie.
En tant que jeune, je me vois mal faire grandir une jeunesse dans le système écologique tel qu’il est. Je vois que la France est encore une puissance qui repose sur le nucléaire et je regarde les infos, j’ai vu ce qui se passe à Fukushima… Mes questionnements ont dû intéresser Wajdi Mouawad [auteur, metteur en scène et comédien, directeur du théâtre de la Colline], puisque c’est le cœur du projet que je vais présenter à la Colline.
J’ai grandi en forêt et dans les champs !
Mais il n’y a pas que mes parents qui m’ont donné une conscience écologique, c’est aussi toute une éducation ! J’ai grandi dans une petite école avec cette notion de nature. Dans les champs, j’ y ai travaillé jusqu’à mes 17 ans et à l’école, on avait toujours des activités vertes. J’ai grandi au milieu de quatre hectares de forêt ! J’ai besoin de nature et j’estime que l’humain en a besoin. Et puis le Lot-et-Garonne est le premier département bio de France : c’est là que les agriculteurs sont en premier passés au bio. L’écologie est aussi un enjeu de santé quand on voit tous les cancers qui se déclarent, la malbouffe…
Le spectacle à La Colline « Ceux qui brûlent », c’est ce samedi 13 avril 2019 ! Dès 14h, retrouvez-y, sur scène, sept jeunes. Une galerie de portraits pour raconter leurs visions de leur génération !
Pour me faire des sous j’ai travaillé tous les étés de mes 14 à 17 ans dans des champs cultivés en bio. J’ai vu que le bio, c’était du boulot : quand on met pas de Roundup, il faut bêcher, arracher les mauvaises herbes ! Et puis, j’ai assisté à tout le cycle de production alimentaire. Quand j’ai atterri à Paris – parce que je suis vraiment une campagnarde à la base – j’ai vu tous ces supermarchés et… la population est certes supérieure, mais on surproduit ! Y a un truc qui cloche.
En venant de ma campagne, j’ai vu ce qu’on peut produire à échelle humaine. Ce que j’ai fait pendant mon adolescence, à l’échelle régionale. Il faut revenir au local pour une logique énergétique dans la consommation. En fait, je me définis clairement comme décroissante !
Prendre la parole sur scène, un engagement écologique
Je suis partie à 17 ans de chez moi, mais ma prise de conscience écologique est liée à mon enfance ! Aujourd’hui, pour la première fois, j’ai décidé de prendre la parole et on m’a permis de le faire au théâtre de La Colline. Toutes les marches pour le climat de ces dernières semaines montrent une prise de conscience et je suis contente de prendre part à ce phénomène très récent.
Avec Chine Modzelewski, une autre jeune participante, on a voulu mettre le sujet en scène de façon un peu détournée, un peu humoristique, pour pas déprimer les gens. C’était important. On a demandé à plusieurs jeunes d’inventer un logement du futur en imaginant que toutes les catastrophes écologiques étaient déjà passées. C’était un moyen de voir comment se situaient les jeunes par rapport à la menace d’une fin des ressources, voire d’une fin de notre planète. Depuis quelques années maintenant, le GIEC a fait prendre conscience au monde politique que ce n’était pas un fantasme baba cool comme mes parents, mais que ça allait vraiment se passer. On s’est dit qu’il valait mieux en rire qu’en pleurer et c’est ce qu’on a essayé de faire dans notre spectacle.
Fanny, 26 ans, journaliste, Paris
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