J’ai grandi dans un camp rom et je veux avancer la tête haute
Avant, je restais sur les platz, les camps. Je faisais la manche, je volais. Je traînais partout dans les rues avec mes copains. Ma maman faisait aussi la manche. Un bidonville, ça ressemble à la misère. C’est des baraques en bois, 200 baraques donc 200 familles. Avec mes cousins et cousines, on faisait la manche dans les RER et les métros jusqu’à 15-16 ans. Ma mère, c’était avec ma sœur. Je volais des téléphones et des habits dans les magasins. Mon papa était à l’hôpital pour une opération compliquée à la gorge. C’est pour ça que je faisais tout ça : pour payer l’opération. J’avais pas une situation bien.
J’avais pas de domiciliation fixe. C’était un bidonville dans la forêt. C’était pas une vraie maison, un appartement bien. J’ai voulu chercher un travail, mais j’étais trop petit, j’avais 11 ans. J’allais pas à l’école. L’opération était trop chère, je pouvais pas laisser ma mère faire tout toute seule. Il fallait que je l’aide.
Des expéditions punitives. C’est ce qu’ont subi des Roms dans plusieurs villes de la région parisienne. En cause : des rumeurs qui les accusent d’enlever des enfants… Des rumeurs « totalement infondées » selon la Préfecture de police.
Voici l’histoire des Roms. Sans cliché. pic.twitter.com/y5Qo9FL39v
— Brut FR (@brutofficiel) 27 mars 2019
Après un temps, mon frère est décédé, flingué par un Français en Roumanie. Depuis, ma vie a complètement changé. J’avais 17 ans, je me suis dit que je devais pas faire comme lui. Il est mort pour rien à cause des gens avec qui il traînait.
Depuis, je fais attention à ma vie, aux gens avec qui je parle, en qui j’ai confiance. J’ai décidé de chercher un boulot, de rester avec ma famille, d’être moi, de voir ma vie en face. Avec l’asso Hors La Rue, qui vient dans les camps, j’ai fait des activités, des jeux, on a visité des musées. Un autre de mes frères m’a dit d’aller à la mission locale, de trouver un travail, d’habiter avec lui dans un vrai appartement. Lui, il a sa famille, ses enfants vont à l’école, il travaille. On m’a proposé un boulot à Rungis mais j’y suis pas allé. J’ai repensé à mon frère décédé qui m’avait parlé de Romcivic. Il m’avait dit que ce serait mieux pour moi, que j’apprendrais des choses.
Lou a participé dans le cadre de son service civique au programme Romcivic qui vient en aide aux habitants des bidonvilles. La lutte contre les préjugés est loin d’être gagnée, elle en a fait l’expérience en voulant accompagner des enfants roms à la piscine.
Je m’y suis intéressé un peu plus et ça m’a trop intéressé ! À Romcivic, je peux découvrir et savoir beaucoup de trucs. Bien communiquer, écrire, lire, les règles de vie et de comportement. J’y suis 24h/semaine, du lundi au vendredi. On fait des activités, on va dans les bidonvilles. Les responsables nous aident à trouver un travail. Et, après, je pourrai avoir un boulot stable. Être stable moi aussi.
Maintenant, je veux une nouvelle vie, parce que j’ai un passé trop dur. Mais, je remercie Dieu, je suis un peu mieux aujourd’hui. Je suis avec mes parents, j’ai un bon « boulot » et je suis à l’aise. Je peux avancer la tête haute.
Roberto, 18 ans, volontaire, Fresnes
Crédit photo Wikipedia // CC Feigeles-Olko
Bon courage à toi, Roberto. Tu pourras être fier du chemin parcouru et de qui tu es. Opre roma !