Manon L. 19/01/2018

Un jour, j’espère, je dirais : ça n’a pas été facile, mais j’ai réussi…

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J'avais 9 ans quand mes parents ont divorcé. D'un seul coup, seule avec ma mère, j'ai dû assumer pleins de responsabilités. Tout ça pour finalement, à 14 ans, me retrouver dans un foyer...

Aujourd’hui, j’ai 14 ans et je suis en foyer. Pourquoi ? Parce qu’à 9 ans, j’avais déjà des responsabilités.

J’avais 9 ans quand mes parents ont divorcé. Je suis allée vivre avec ma mère dans le 91. Elle a un gros handicap au niveau des jambes. Pendant un an, je n’ai pas vu mon père et j’ai dû m’occuper de ma mère toute seule. Je devais préparer à manger tous les soirs, sortir le chien tard, même en hiver, et faire le ménage. Je trouvais ça normal de l’aider.

Je me couchais vers minuit, car je n’arrivais pas à dormir plus tôt. Au début, je faisais des cauchemars, je n’aimais pas ce petit appartement où on était. Je n’étais pas habituée.

Du coup, en cours, j’étais fatiguée. Je n’arrivais plus à suivre et je ne faisais plus mes devoirs. Je ne trouvais pas le temps de les faire car j’essayais de m’amuser et je n’en avais plus envie. Lorsque mes profs me rendaient mes évaluations, j’avais l’habitude d’avoir de mauvaises notes.

J’avais besoin d’aide

Après deux ans comme ça, ma mère a repris une vie normale, malgré sa maladie. Quand elle regardait mes notes, je me faisais engueuler. Elle me disait de lui demander de l’aide ou d’aller voir d’autres membres de ma famille pour qu’ils m’aident. Mais je n’osais pas lui demander, parce qu’elle rentrait tard le soir, elle se posait devant la télé et elle regardait les infos.

À cause de sa nouvelle compagne, mon père nous a délaissés pendant un an et demi, ma sœur de 20 ans et moi. Après une dispute avec ma sœur, ils se sont réconciliés et elle a continué à habiter chez lui.

Arrivée malgré tout en 6ème, j’étais assez rassurée, car j’ai retrouvé ma meilleure amie. Et puis je me suis disputée avec elle car elle m’a ridiculisée devant tout le monde. Alors jusqu’à ma cinquième, je suis restée toute seule. Je me suis réfugiée de plus en plus dans mon travail, même si mes notes n’en témoignaient pas. Je passais des heures entières à regarder mes cours, sans comprendre, car j’avais besoin d’aide.

Mon père qui revient, ma mère qui retombe

Après avoir décroché de l’école, j’ai décroché tout court. J’allais de moins en moins bien. Quand je rentrais le soir, ma mère me demandait comment s’était passée ma journée. Je lui répondais que ça c’était bien passé et que j’allais bien. Elle me demandait si j’avais fait mes devoirs. Je lui disais oui, même si je ne les avais pas fait. Je mentais, je disais que les insultes des autres ne m’atteignaient pas, mais à force de tout garder pour moi, je me suis mutilée puis j’ai eu des envies suicidaires.

Ça n’a pas échappé à l’assistante sociale du collège. Elle a tout de suite prévenu mon père et ma mère. Puis le juge qui s’est occupé du divorce de mes parents.

Quand mon père s’est séparé de sa copine, il est redevenu présent. Il est redevenu un père. Ça s’est passé beaucoup mieux avec lui, et ça m’a permis de changer. J’entrais en quatrième. Maintenant je suis en troisième, et ça va beaucoup mieux avec mon père mais… beaucoup moins bien avec ma mère. Les rôles se sont inversés ! On a commencé  à s’engueuler toutes les semaines, puis tous les jours. J’ai fini par faire une crise d’angoisse. Je me souviens seulement qu’elle m’a dit : « Tu es folle, je vais appeler les pompiers ! » Elle ne comprenait pas ma souffrance, ma colère. Des membres de ma famille sont venus me chercher, je me suis fait engueuler pour rien, on ne me comprenait toujours pas.

Placée en foyer d’accueil

Le 29 août 2017, mes parents et moi avons été convoqués par le juge pour me dire que j’allais être placée en foyer. C’est là que le cauchemar a recommencé. Au lieu d’être directement placée en foyer, j’ai été en famille d’accueil pendant 2 mois. Dans une première où ça se passait mal, puis dans une autre pour les vacances. C’était déjà mieux. Et enfin, je suis arrivée dans mon foyer le 26 octobre 2017. À cause des visites de collèges, j’ai loupé plus de deux semaines de cours. Aussi à cause des visites médiatisées. 2h de trajet pour aller voir mes parents chaque semaine.

Cherine a connu la vie au foyer pendant quelques mois. Elle en garde un bon souvenir et en est sortie grandi.

Mon arrivée dans ce foyer a été horrible. Je ne me suis pas du tout sentie à l’aise. Je partageais ma chambre avec une personne pas vraiment facile à vivre et je n’ai eu le choix de rien du tout.

Je n’ai pas eu le choix d’être ici avec cette personne, pas le choix de changer de collège plusieurs fois, pas le choix d’avoir ce moment de ma vie là tout simplement. Je garde une phrase dans mon portable, et dans un coin de ma tête, qui dit qu’un jour, je dirai : « Ça n’a pas été facile, mais j’ai réussi. »

 

Manon L., 14 ans, collégienne, Orsay-Ville

Crédit photo Max Pixel // CC0 Water Woman

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1 réaction

  1. Mon frère je te comprends car nous avons presque la même histoire est foi en Dieu… j’ai été abondonez par mon père Mais 2015 j’ai vécu dans la rue jusqu’à ce que j’ai décider d’y me rendre à brazzaville chez ma mère 16 février 2016 ! j’ai hâte de raconté mon histoire .

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