Lola L. 20/04/2022

1/2 Trop à gauche pour ma famille, trop à droite à la fac

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Lola pioche ses idées politiques à droite et à gauche. Alors sa famille et ses ami·es la mettent tantôt dans une case, tantôt dans l'autre.

J’étais à table avec mes parents et mon frère. Nous regardions un débat politique à la télé. Sur le plateau, deux hommes, porte-paroles du Rassemblement national, face à deux autres hommes de La République en marche. Nous écoutions tous les quatre et je ne pouvais m’empêcher de penser que, forcément, nos avis seraient différents. J’avais hâte de connaître les idées politiques de mes parents et de mon petit frère qui, du haut de ses 17 ans, commençait à s’y intéresser. Mais rien.

Personne n’a renchérit et nous sommes passés sur un autre programme. Perplexe, j’ai demandé : « Pourquoi nous ne parlons que rarement de politique ensemble ? » Je n’ai eu comme réponse que les airs surpris de mes parents. Mon père a fini par me répondre qu’il y a des sujets qu’il est préférable de ne pas aborder en famille. Et qu’il ne voulait pas que l’on « se dispute ».

Pour mon père, je vis dans « le monde de Oui-Oui »

À ce moment-là, notre débat a commencé. D’habitude, nous parlons plutôt librement de sujets que je qualifierais de plus « tabous ». Pour moi, le cadre familial est un cercle où les paroles sont libres et les jugements proscrits. Parler ensemble d’argent ou de sexe n’est pas quelque chose de complexant chez nous. Je ne comprenais donc pas pourquoi la politique devait être un sujet plus sensible.

J’ai exposé mes idées. Et surtout les difficultés que j’avais à me catégoriser dans un parti plutôt qu’un autre. Expliqué que pour certains points, notamment les politiques sociales et humanitaires, mes idéaux se rapprochaient davantage des partis socialistes. Cependant, mon avis sur les politiques économiques était davantage en corrélation avec les idées des Républicains. Après ma longue tirade, personne ne m’a répondu, et mon père a souri.

J’étais vexée. Je m’attendais à ce qu’il me répète les mots qu’il m’avait déjà dit plusieurs fois. Que ma vision des choses est trop idéaliste, que je suis jeune et que je vis encore dans « le monde de Oui-Oui ». Que mon avis n’est que temporaire et que les difficultés de la vie vont faire varier mes opinions.

À chaque fois que l’on me répète cela, j’ai l’impression que mon avis n’est pas pris au sérieux. Et que mes opinions ne sont qu’un rite de passage qu’apparemment tous les jeunes vivent. C’est exactement la même chose quand il me dit que « le féminisme n’est qu’une mode temporaire et que cela va partir aussi vite que c’est venu ». Comme s’il existait un chronomètre et que, passé un certain âge, toutes mes idées allaient changer.

Mes idées politiques, de droite ou de gauche ?

Comment pouvons-nous penser que la tolérance, la solidarité et l’égalité entre les Hommes ne peuvent être que des rites de passage ? Cela me rappelle quand j’étais enfant et que l’on me répétait : « Tu verras quand tu seras grande… » ; « Tu comprendras plus tard… » Sauf que je suis grande maintenant, et que je ne comprend toujours pas.

J’entends dire que de plus en plus de jeunes se désintéressent de la politique. Seulement, avant de nous dire que les jeunes sont « trop jeunes pour être capable de bien voter », il faudrait commencer par écouter nos idées.

Ma famille n’est pas la seule avec qui mes avis divergent. À la faculté, je suis en sciences humaines et sociales. Et, conformément aux clichés, beaucoup d’entre nous s’identifient à des partis politiques plus socialistes, sans faire l’unanimité. Ce qui m’est le plus dérangeant est que l’on se sente obligé de catégoriser les personnes. « Plus de droite » ou « plus de gauche ». Comme si la politique se résumait à des « je suis pour l’immigration, je suis de gauche » et des « je ne suis pas une Gilet jaune, alors je suis de droite ».

Quand je parle à mes ami·es, certains me catégorisent plus de droite car je n’approuve pas certaines « idées de gauche », comme certains actes syndicaux. Certains m’ont même déjà dit qu’ils ne comprenaient pas pourquoi j’étais en sociologie. Et pas en droit ou en école d’ingé. Comme si tes opinions politiques devaient guider ton choix d’études ! Je me retrouve alors « le cul entre deux chaises ».

Face à un avis complètement différent, je bloque

Mon opinion est trop idéaliste et socialiste pour mes parents. Mais, à la fac, je ne suis pas assez retranchée dans mes opinions. Et mon point de vue sur l’économie est trop républicain. Pourquoi ne pouvons-nous simplement pas écouter les avis de chacun sans nous sentir obligés d’allumer des sonneries d’alarme ? Et de juger que nous sommes « trop ceci… mais pas assez cela… » ?

À force d’en discuter, je me suis rendu compte que mêmes les personnes les plus ouvertes d’esprit peuvent avoir du mal à concevoir qu’une personne puisse avoir des opinions politiques différentes des siennes. Moi la première. Je suis quelqu’un qui écoute beaucoup. Mais, malgré tout, sur certains sujets sociétaux, quand une personne expose un avis complètement différent du mien, je bloque.

Je sais que je ne suis pas la seule à me sentir délaissée et non écoutée. La preuve, quand j’ai dit que je devais écrire un article sur les différences politiques intrafamiliales, bon nombre sont ceux qui m’ont souhaité du courage. Ce n’est pas dramatique me direz-vous. Mais je crois qu’en discuter et échanger sur ces sujets fait avancer. Cela nous fait réfléchir sur nos idées et les fait évoluer. C’est aussi une manière de s’améliorer.

Lola, 21 ans, étudiante, La Londe-les-Maures

Crédit photo Pexels // CC William Moreland

 

Débat de l’entre-deux-tours, entre tradition, punchlines et tensions

1974 : date du tout premier débat télévisé organisé entre les candidats du second tour de l’élection présidentielle, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand. 25 millions de personnes sont devant leur télé. « Vous n’avez pas le monopole du cœur », lance Giscard à Mitterrand, une phrase qui marquera les esprits.

Sept ans plus tard, pour la présidentielle de 1981, les deux hommes s’affronteront une nouvelle fois sur un plateau de télévision, puis dans les urnes pour le second tour. Une première dans l’histoire de la Ve République.

1988 : François Mitterrand, le président sortant, face à son Premier ministre, Jacques Chirac. Punchline du débat signée François Mitterrand :
– Chirac : « Ce soir, je ne suis pas le Premier ministre, et vous n’êtes pas le président de la République, nous sommes deux candidats à égalité. »
– Mitterrand : « Mais vous avez tout à fait raison, monsieur le Premier ministre. »

1995 : Jacques Chirac contre Lionel Jospin. Le candidat du PS est partisan du quinquennat et, pour appuyer ses arguments, il lance : « Il vaut mieux cinq ans avec Jospin que sept ans avec Jacques Chirac, ça serait bien long. » En face, Chirac est mort de rire.

2002 : pas de débat de l’entre-deux-tours pour la première fois depuis vingt-huit ans. Le président sortant Jacques Chirac refuse de débattre avec son adversaire, le candidat du Front national, Jean-Marie Le Pen, qualifié à la surprise générale au premier tour.

2007 : Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, face à face. Un débat marqué par la colère de la candidate socialiste au sujet de la scolarisation des enfants en situation de handicap : « Non, je ne me calmerai pas ! Il y a des colères qui sont saines. »

2012 : François Hollande face à Nicolas Sarkozy, pendant deux heures et cinquante minutes, ce qui en fait le plus long débat à ce jour. Hollande lance un prophétique « Moi, président » répété plusieurs fois pendant un monologue de trois minutes, sans être interrompu une seule fois par son adversaire.

2017 : Emmanuel Macron face à Marine Le Pen, devant 16,5 millions de téléspectateurs et téléspectatrices, la plus faible audience enregistrée depuis l’organisation de ces débats. Pendant, beaucoup de tensions, et après, beaucoup de détournements.

2022 : Pour la première fois depuis 1981, les deux candidat·es qui vont s’affronter ce soir dans le débat de l’entre-deux-tours sont les mêmes que lors de la précédente élection présidentielle : Emmanuel Macron face à Marine Le Pen.

 

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