1/2 Sexologue absent, Google en remplaçant
J’ai eu mon premier vrai petit-copain à 14 ans. Et qui dit premier copain, dit premier réel bisou. Je ne savais pas du tout comment m’y prendre. « Langue, pas langue ? » ; « Est-ce qu’il faut la tourner ? » J’étais perdue donc j’ai voulu trouver des réponses à mes questions. Je n’allais pas demander à mes parents (tout simplement parce que… c’est mes parents !) ou à mes amis. Ils l’avaient tous fait et je pensais qu’ils allaient se moquer de moi. Se moquer parce que j’étais « en retard » par rapport aux autres. Je sentais une espèce de pression, que je m’étais inventée. Je n’ai donc pas eu le choix et me suis tournée vers internet.
J’ai suivi leurs conseils
Je suis tombée sur des vidéos douteuses avec des gens qui s’embrassent de manière écœurante et choquante ou des témoignages sur YouTube, comme dans les chaînes de Manaïs World ou Babké 974. Mais en aucun cas ils expliquent comment faire. J’ai donc laissé tomber.
Le moment fatidique arriva. C’était moins pire que je ne l’avais pensé. C’était même agréable et naturel. J’étais très stressée et je pense que mon copain l’a ressenti, mais c’est lui qui a pris les devants et je me suis laissée aller. Quand on a terminé, j’étais soulagée de ce poids sur mes épaules.
Comme j’étais plus à l’aise, j’en ai parlé à mes amis qui m’ont expliqué comment faire. À ma grande surprise, ils ne se sont pas du tout moqués de moi. Ce n’était pas exactement ce que j’avais fait, mais les prochaines fois, j’ai suivi leurs conseils et c’était encore mieux.
Erreur : chercher sur internet
Après cinq mois ensemble, les questions sont revenues. J’avais 15 ans. Cette fois sur un sujet encore plus tabou que les baisers langoureux… Le fameux SEXE. Surtout que je suis en retard par rapport à mes amis. J’ai l’impression qu’ils me voient comme la petite fille sage de service qui n’ose rien faire. Et je sais que mon copain en a envie. Ses amis me l’ont rapporté. Je veux le faire pour être comme mes amis, pour arrêter de psychoter à propos du regard qu’ils ont envers moi, et pour faire plaisir à mon copain, par peur qu’il me quitte. Je sais que c’est totalement débile de raisonner comme ça mais j’en ai marre de me prendre la tête.
Pour répondre aux questions que se pose Norah, ainsi que de nombreux·se·s autres jeunes, la plateforme éducative de France Télévisions, Lumni, a lancé Sexotuto, une web-série qui parle contraception, porno, ou encore cunnilingus.
J’ai fait la même erreur que la première fois : je n’en ai pas parlé à mes amis, ni à quelqu’un de confiance. J’ai encore cherché sur internet parce que j’ai tout simplement peur de faire n’importe quoi. « Est ce qu’il faut que j’enlève tous mes vêtements ? » ; « Je dois me mettre au-dessus ? » ; « Est-ce qu’il faut que je le laisse faire ? »
J’aurais aimé avoir des sites questions/réponses
Il y avait des vidéos pornographiques, qui ne reflètent pas du tout la réalité (comme me l’a dit un copain). D’ailleurs, lui s’attendait à beaucoup mieux quand il l’a fait. Je n’ai même pas voulu regarder… Enfin, je suis tombée sur une mais c’était un accident. C’était en allant sur un site de vêtements, et ça m’a emmenée sur une autre page où j’ai vu des choses qui m’ont limite traumatisée parce c’était violent et juste… c’était beurk. Sinon, encore des témoignages sur YouTube (mais cette fois-ci il y en avait beaucoup plus que pour le premier bisou), mais toujours pas les réponses à mes questions. Je n’ai donc pas voulu le faire… jusqu’à ce jour.
J’aurais aimé avoir des sites questions/réponses, des sexologues dans l’école comme dans Sex Education, ou des vidéos qui expliquent comment faire avec des mots, et non pas avec des images. Il y a un tabou sur ces sujets : on n’en parle pas assez donc on n’a pas de moyen de savoir comment s’y prendre.
Norah, 15 ans, collégienne, Neuilly-Sur-Seine
Crédit photo Hans Lucas // © Jeanne Fourneau