Luka M. 30/10/2018

À mon arrivée en France, je suis reparti de zéro

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Luka est arrivé en France il y a six mois. À 16 ans il a quitté la Guinée pour étudier en France, décidé à trouver du travail rapidement pour aider ma famille.

Je suis arrivé à Paris en décembre 2017, j’avais 15 ans. Je suis venu de Guinée. Là-bas, au bled, j’avais du mal à étudier. Je préférais la France parce que je comprenais un peu le français, je me suis dit « en allant en France, ça va me servir ».

À Paris, comme je ne savais pas où aller, j’ai passé la nuit deux jours dehors. Le lendemain de la deuxième journée, j’ai demandé à quelqu’un dans la rue où trouver de l’aide. Il m’a dit d’aller à la mairie. C’était à côté. Alors j’ai demandé de l’aide. On m’a demandé quel âge j’avais. J’ai répondu « 15 ans ». Le monsieur m’a dit : « Ok, viens, je vais te faire un plan, tu vas aller à la Croix-Rouge. »

Mais comment je fais pour prendre le métro ? Je ne savais pas s’il fallait aller en bas ou en haut, j’ai demandé encore et on m’a expliqué comment faire. J’ai pris le métro pour la première fois. J’avais un peu de stress, mais c’était cool. Quelqu’un m’a amené jusque dans le train et m’a donné le plan pour savoir où m’arrêter. C’était un peu compliqué pour retrouver l’endroit où était le bureau de la Croix-Rouge. J’ai lu le plan et j’ai trouvé.

Enfin je vais dormir à l’abri

À mon arrivée, j’ai vu beaucoup de jeunes dans la même situation que moi. On m’a dit d’attendre dans la salle jusqu’à 16h. J’ai fait l’interview pour parler d’où je venais et de mon trajet et tout. Après on m’a dit : « Ok faut attendre dans la salle » et on m’a amené à l’hôtel. Je me suis dit : « Dieu merci, enfin je vais dormir à l’abri ! » J’ai passé mon entretien direct et après quelqu’un est venu nous chercher pour nous amener à l’hôtel, à Bastille. J’ai passé dix jours là-bas.

La semaine suivante, la Croix-Rouge a envoyé un papier pour me dire d’aller au SEMNA ou à l’ASE. Je suis allé à l’Aide Sociale à l’Enfance et j’ai fait mon entretien. On m’a demandé : « Tu veux aller à l’hôtel ou au foyer ? » J’ai dit que je préférais le foyer parce que j’ai déjà vécu à l’hôtel. Je connais la vie là-bas, c’était un peu compliqué. Il n’y a pas d’habits ni de quoi manger de bonnes choses. Mais j’avais quelques amis. Je leur ai dit que maintenant, je voulais découvrir la vie du foyer. Alors au foyer, j’ai pu avoir des nouveaux vêtements, des nouveaux amis. L’éducatrice m’a donné les habits que je porte encore aujourd’hui, ça m’allait bien et je me sentais mieux !

On parle de la vie au présent maintenant

C’était dans le 18e arrondissement. J’ai trouvé pas mal de gens là-bas. Je me suis dis que c’était bien et que j’allais pouvoir me faire plein d’amis. J’ai commencé à parler un peu avec les gens. On a discuté de comment ça se passait au foyer. « Ouais, ici tout se passe bien. » J’étais un peu rassuré parce que j’ai trouvé des gens de différents pays et de mon pays. Quelques jours après, on a commencé à aller au foot ensemble au stade Dauvin, porte de Clignancourt pas loin du foyer.

Le foot, c’est ma passion préférée, j’aimerais devenir un footballeur professionnel ! Je joue milieu offensif. Mon idole c’est Luka Modric, il joue au Real Madrid en Espagne. Un jour, je serai comme lui ! Hier, j’ai même regardé le match au foyer avec mes amis, le Real a gagné 2-1, j’étais bien, content. Mes amis, c’est  ceux qui viennent de la Guinée avec qui je parle ma langue maternelle, le peul. Les autres qui viennent d’un peu partout, on parle en français. A France Terre d’Asile, je rencontre des Ivoiriens, des Maliens, des Afghans, des Pakistanais… On parle de la vie au présent maintenant ; même si parmi nous y’en a pas beaucoup qui aiment parler du passé.

Lamarana aussi a quitté la Guinée, mais sans savoir où aller. Il est finalement arrivé en France il y a environ un an. Son périple, c’était une vraie torture  : « De Guinée jusqu’en France, j’ai vécu l’enfer. »

On a commencé à aller à Archereau, où on nous a donné des cours de français. Je parlais un peu français en Guinée et j’ai fait un test pour avoir la bonne classe. Il y a trois classes. On fait des dictées, de la compréhension écrite, des conjugaisons et des jeux d’ardoise à la fin des cours.

Avant, j’avais un peu de stress mais maintenant, ça fait quatre mois et je crois que j’ai un peu de niveau en français. Parler français, c’est quelque chose que j’aime beaucoup, ça me sert à communiquer avec les gens qui ne parlent pas la même langue que moi.

Dans quelque mois, je veux commencer l’école professionnelle pour avoir mon diplôme de CAP ou de bac pro mécanique auto. Depuis que je suis petit, je rêve de conduire, d’avoir une voiture. À 18 ans, je vais travailler et avoir de l’argent pour aider mes parents. Depuis que je suis à Paris, je me sens bien, protégé. Et bientôt, je vais réaliser mon rêve.

Luka M., 16 ans, en formation, Paris

Crédit photo Flickr // CC Alternative Libertaire

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