« T‘es genre une fille ET un garçon ? »
En primaire, j’étais seule à jouer au foot avec les garçons. À toutes les récrés, toujours la seule fille. Je jouais plutôt bien, mais je me souviens qu’un garçon me disait que je n’avais pas ma place sur le terrain, qu‘une fille ne devait pas jouer pas au foot, mais s‘occuper de la cuisine et du ménage. Il est resté scié quand je lui ai dit que chez moi, mon père faisait le dîner et ma mère montait les meubles. Il faut dire que j’ai une famille très ouverte, avec une mère islandaise (le pays le plus égalitaire d’Europe !).
C‘est vers cette période que j‘ai découvert les notions de sexisme, de féminisme et avec ça d‘homosexualité, bisexualité, transexualité. Plus tard j‘ai ressenti cette différence quand je me suis coupé les cheveux. Une coupe courte, « masculine ». Avec un corps pas encore très « féminin ». Et un style tout à fait androgyne. Deux jours plus tard, je me prenais des remarques : « T‘es gouine ? », « Est-ce qu‘il y a des garçons qui te draguent ? », « Des filles ? », « T‘es genre une fille ET un garçon ? ». Certains pensaient que j’étais un garçon efféminé.
De la curiosité à l’homophobie
Une fois, à la cantine, je me suis disputée avec un garçon qui nous avait doublés. Il m’a dit : « Vas-y, c‘est pas un pédé qui va me dire quoi faire. » Ses amis ricanaient. Un de ses potes a demandé : « Eh mec t‘es sûr que c‘est un gars ? » J’ai répondu avec un grand sourire : « Devine ! » J’aimais bien jouer ce jeu pour voir la réaction des gens. Le mec a répondu : « Je sais pas, c‘est un mec même s‘il s‘habille un peu comme une fille. » Quand une fille a dit tranquillement que j’étais une fille, il a éclaté de rire : « Sérieux ? Mais t‘as pas de formes ! Pas de cul, pas de seins ! » Ses amis riaient avec lui.
Un autre jour, dans les toilettes des filles, une fille m’a carrément demandé : « T‘es un mec ? » Toutes celles qui étaient là ont dit : « Sérieux ? T‘es une fille ? On dirait pas… » Puis, une m’a dit : « Prouve-le. Montre tes ongles. » Je riais parce que je trouvais la situation assez comique. Je trouvais aussi très décevant qu’elles pensent qu‘il n‘y a qu‘une façon d‘être une fille. J’ai répondu : « Vous n‘allez quand même pas me demander de baisser mon pantalon, si ? C’est pas parce que je ne me maquille pas que je ne suis pas une fille, je n‘ai pas votre look, c‘est tout. Maintenant, arrêtez de penser comme ça, ça vous fera du bien, ciao, merci… » Après ça, plus aucune fille du collège n‘est venue m‘expliquer comment je devais m‘habiller ou me maquiller.
Aujourd‘hui, je suis dans un super lycée, qui me correspond. J‘ai grandi. Les gens ne se posent plus de questions. Sauf en hiver parfois, quand tout le monde porte un gros manteau, les gens se rapatrient sur les cheveux ou la couleur du manteau. Et pour moi, c‘est souvent « jeune homme ». J‘aimerais bien qu‘il existe un genre neutre en français, que les gens n‘aient plus envie de s‘insulter, de se critiquer, de donner leur avis. Je porte tel jean parce que je l‘aime bien et qu‘il est confortable, tout comme je me suis coupé les cheveux parce que j‘aime bien et que c‘est pratique !
Solrun, 16 ans, lycéenne, Paris
Crédit photo © Pyramide Distribution // Tomboy de Céline Sciamma (film 2011)
Pour moi une fille et un garçon c’est pareil. Il n’y a pas de différence.
Solrun, je te comprend. Bien que l’hiver je me laisse pousser les cheveux et que j’met des bonnets; autant l’été, j’me coupe les cheveux (parce que ça me va bien et que j’me sens bien), en mettant aussi des casquettes. J’ai toujours été « hors mode ». J’m’habille comme je me sens bien, chemises, jeans, t-shirt, short/bermuda, basket/bottes, mais ce n’ai pas parce que j’ai mon look de « garçon manqué » que je ne suis pas une fille. Puis, concernant les « formes », nous ne nous développons pas toutes de la même manière. J’vous donne un exemple : les joueuses de l’équipe de france féminine de football, sont toutes féminines, et pourtant, elles n’ont pas de poitrine pour la plupart; et ce n’est pas pour cette raison qu’elles sont masculines. D’ailleurs, ce n’ai pas non plus parce qu’une fille joue au foot, qu’elle aime la mécanique ou les belles voitures de sport, qui fait d’elle une fille et un mec ! De toute façon, que nous ayons une sexualité différente, un look différent, un physique différent, des origines, un handicap, des passions différentes, nous seront toujours jugés, donc, à quoi bon s’prendre la tête sur ce que pensent les gens, nous vivons pour nous mêmes et ceux qui nous acceptent, des autres ont s’en bats les steacks !!! Vivez pour vous et emmerdez les autres ! La différence est une belle valeur, ceux qui nous jugent, n’en ont aucune 😉
Il y a des looks qui sont proches de ceux masculins mais, qui restent de la féminité. Ce qu’il y a au-delà, je crains que cela ne recèle un reniement de sa féminité ou autre. Mais, peut être que je me trompe.
Salut Solrun!