À 15 ans, j’ai pris mon indépendance à Paris
Je viens d’un bled paumé dans le 78. Pour me permettre de suivre un double cursus danse et m’éviter des heures de transports en commun, mes parents ont tenu à me loger sur Paris. La décision a été prise vers le mois de février 2017. Je montais déjà régulièrement sur Paris le week-end pour prendre des cours de danse. Mes profs m’ont conseillé ce double cursus. J’ai accepté.
C’est la veille de la rentrée, demain j’entre au lycée George Brassens, en seconde. Aujourd’hui c’est dimanche, lourde journée : j’emménage, dans un studio en plein Belleville, seule. La nuit arrive à grand pas, je décide de me coucher. Une fois allongée , je découvre le bruit, qui s’intensifie au fil de la nuit. Entre les ivrognes, les bars au pied de mon immeuble, la musique, les camions poubelles qui passent, là c’est clair, impossible de dormir. Le lendemain matin, je suis vraiment mal, épuisée et surtout choquée par le spot où j’ai mis les pieds. La nuit d’avant, chez moi, c’était des petits oiseaux.
Jour de rentrée après une nuit blanche.
Arrivée au lycée, je fais le maximum pour me concentrer et ne rien oublier, mon stylo tient à peine dans ma main tremblotante. Les premiers jours, ne connaissant pas le métro, je me perds dans les couloirs. Il m’arrive d’être en retard. Pareil dans le quartier pour trouver le lycée, au début je demandais la direction aux passants.
Ma mère a un parcours similaire au mien, elle me soutient. Comme moi, elle aussi a commencé à vivre seule à l’âge de 15-16 ans. Sa situation était pire, car ses parents vivaient à l’étranger, au Maroc. Mon père, lui, m’a clairement énoncé que j’avais intérêt à travailler, à réussir scolairement. Sinon c’était « retour à la case départ » dans mon lycée de secteur, avec une scolarité normale. J’ai la pression avant même de savoir si ça va bien se passer.
Un quotidien à Paris très intense
Je cuisine seule, repas simples : pâtes, steak haché. Quand j’ai pas le temps je descends au kebab ou chez un italien pour les pizzas, il m’arrive fréquemment de ne pas manger le midi. Une fois, j’ai mangé une pizza au chorizo, raviola, sans boire d’eau, puis j’ai dansé 3 heures. En sortant, j’ai vomi dans la rue.
Je n’ai pas de budget fixe, tout dépend de la semaine. En général, je fais mes courses le week-end avec ma mère. Je n’ai pas de machine à laver : le lundi matin, je dépose toute mes affaires à la laverie vers 7h. Le matin : réveil vers 6h pour rentrer le soir vers 19h30. Sachant que je dois faire mes devoirs, manger, me doucher, Je suis toujours très occupée. J’ai un quotidien très intense, je n’ai donc pas beaucoup de temps libre. Je regarde rarement la télé par manque de temps. Ce rythme entraine beaucoup de fatigue, physique et morale. En plus, je ne dors pas très bien, ce qui ne me facilite pas les choses.
Charline a quitté le foyer familial et pris son indépendance à 18 ans. Elle est mitigée sur cette expérience, entre avantages et galères, elle verra !
Je rentre tous les vendredis soir chez moi. Après la danse, je prends le train et je retrouve mes amis et ma famille.
Le fait de vivre seul en étant mineur n’est pas courant, surtout à l’âge de 15 ans. Même si j’ai énormément de chance, c’est difficile. Mais c’est aussi le prix à payer pour vivre ma passion.
Leana, 15 ans, lycéenne, Paris
Crédit photo Pixabay // CC0
Hihi moi aussi je suis du 78 zoo