Mohamed A. 20/02/2024

Islam-MMA : 1-0

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Mohamed ne vivait que pour sa seule et unique passion : le MMA. Avant de découvrir que ce type de combat va à l'encontre de ses convictions religieuses.

Quand mon prof m’a demandé si je pratiquais un sport, j’ai répondu : « Oui, du MMA. » Il a fait une drôle de tête. Il était très surpris. Je suis allé dans une école privée musulmane durant trois ans. Nous étions seulement 80, collège et lycée mélangés. Mes professeurs étaient très proches des élèves et se souciaient beaucoup de ce que nous faisions en dehors de l’école.

A côté de l’école, je pensais MMA, je dormais MMA, je me réveillais MMA et je respirais MMA. Je m’entraînais quotidiennement pour percer : je voulais devenir champion dans la plus grande organisation au monde, l’UFC (Ultimate Fighting Championship).

Ce jour-là, j’ai appris par l’intermédiaire de mes professeurs d’arabe que la religion interdit de porter atteinte au visage d’autrui. Porter atteinte, ça veut dire frapper quelqu’un sur son visage avec un de ses membres ou un objet. Ça ne veut pas forcément dire le blesser. Étant donné que le MMA est un sport où l’on doit gagner principalement par K.O. ou soumission, la majorité des coups sont justement donnés au niveau du visage : on peut en porter à la tête de son adversaire même quand il est par terre.

Tout arrêter du jour au lendemain

J’ai quand même continué durant plusieurs mois. J’avais commencé les sports de combat à l’âge de 4 ans. J’avais fait du judo jusqu’à mes 13 ans et du MMA à partir de mes 15 ans. J’ai tout de suite aimé ce dernier. Parce qu’il demande beaucoup d’aptitudes physiques, comme de la force, de la vitesse, de l’agilité et de l’endurance. Et aussi pour son côté violent, et en même temps bienveillant, envers ses partenaires d’entraînement. Tous les coups y sont permis, à part bien sûr ceux dans les parties, derrière la tête et dans le dos, et les doigts dans les yeux…

Ça m’est déjà arrivé de blesser quelqu’un et aussi de me blesser, mais jamais rien de grave. Juste des traces rouges ou des petites ouvertures au niveau de l’arcade et des joues. Lorsque je blessais quelqu’un, ça m’arrivait parfois de me sentir mal, j’avais des remords après l’entraînement. Par contre, lorsque j’étais blessé, j’étais heureux car, pour moi, avoir des traces au niveau du visage était un signe de virilité.

Et puis, il y a une semaine, je suis tombé sur Instagram sur la vidéo d’un imam qui parlait du jour du jugement dernier. Il parlait du fait que l’on devra rendre des comptes un jour aux gens à qui on a causé du tort. Je ne suis pas trop du genre à regarder ce type de vidéo mais, cette fois-ci, j’ai décidé de la regarder jusqu’à la fin. Ça a été un déclic. J’ai alors pris la décision d’arrêter immédiatement le MMA et je me suis mis uniquement à la pratique de la lutte, un sport recommandé dans ma religion.

Ma foi, c’est ma priorité

Il existe différents sports recommandés en islam, comme la gymnastique ou encore la course. La lutte en fait partie car elle fait acquérir de la force, renforce le corps et la santé, sans pour autant porter atteinte à une autre personne. Malgré les projections parfois violentes dans la lutte, nous ne frappons pas directement notre adversaire sur une partie du corps. En plus de ça, en islam, nous croyons au prophète Mohammed et il pratiquait la lutte. J’ai appris tout cela par le biais de mon père, qui est très religieux.

Yanis est né dans une famille musulmane non pratiquante. C’est avec ses amis qu’il a commencé à aller à la mosquée, et sur YouTube qu’il a appris à prier.

Capture d'écran de l'article "Mes potes et YouTube m'ont initié à la religion". Sur la photo, on voit deux garçons avec un kufi sur la tête. Ils penchent la tête en avant.

Le fait d’arrêter le MMA a été extrêmement difficile. Comme je vivais pour ce sport, je n’arrivais plus à penser à autre chose. J’étais submergé par l’idée de devenir champion, je passais la plupart du temps à regarder des vidéos de combats ou d’entraînements. Le plus gros travail que j’ai effectué pour arrêter a surtout été mental. Ce qui m’a aidé, c’est de ne plus les regarder. J’ai décidé de me désabonner de toute personne qui en fait. J’ai réussi à faire passer ma foi avant toute passion. Comme c’est quelque chose d’assez frais, il me faut encore un peu de temps pour digérer tout ça, et enfin pouvoir oublier ce sport à tout jamais.

Mohamed, 17 ans, en recherche d’emploi, Romainville

Crédit photo Pexels // CC Pavel Danilyuk

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