Safiayyah G. 25/09/2024

La double culture plutôt qu’un camp

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En France comme en Algérie, Safiayyah ne se sent jamais pleinement chez elle. Ce que lui renvoient les autres n’empêche pas la lycéenne de prendre peu à peu conscience de la richesse de sa double culture.

« Tu es blanche pour une Algérienne. » « Je suis sûr que tu t’inventes une vie, t’es blonde aux yeux bleus… » « C’est toi Safiayyah ?!? » Ce sont les questions qu’on me pose à chaque fois que j’arrive dans un nouveau lieu ou dans une nouvelle classe. Moi, si pâle, blonde et… franco-algérienne.

Je suis née en France d’un père algérien et d’une mère française. Mes traits maghrébins ne se voient que très peu. J’ai grandi majoritairement avec ma famille paternelle, la famille de ma mère habitant à plus de 500 kilomètres. Quand je retourne voir cette dernière, j’ai la nette impression d’être différente. De ne pas être à ma place.

Parfois, le fossé se creuse tellement que je me demande si j’ai réellement ma place auprès d’eux. Ils boivent de l’alcool, mangent du cochon, parlent de tous les sujets sans tabou. Les femmes et les hommes sont dans une même pièce. Tout cela ne se passerait jamais dans la famille de mon père. Parfois, en y réfléchissant, je culpabilise un peu de ne pas me sentir à ma place dans une famille et une culture qui sont aussi les miennes.

Les femmes d’un côté, les hommes de l’autre

J’ai toujours grandi dans les cultures algérienne et maghrébine. Elles me paraissent normales et évidentes. Les femmes d’un côté, les hommes de l’autre, le respect infini accordé aux anciens, les tabous sur certains sujets, la dignité et l’immense pudeur, mais aussi les fêtes et les grands repas.

En revanche, je ne parle pas arabe. Je suis incapable de faire une phrase. Même si, avec le temps, j’ai acquis un minimum de vocabulaire. Mes difficultés à m’exprimer créent une barrière entre ma famille restée en Algérie et moi. Cette famille que je ne connais que très peu et avec qui j’ai l’impression d’avoir passé toute ma vie.

Je suis très fière de mes origines et je ne perds pas une occasion de parler de mes pays. Mais je me sens trop française en Algérie et trop algérienne en France… Lorsque j’arrive en Algérie, je suis la Française qui vient passer ses vacances, qui est la bienvenue, mais qui ne doit quand même pas trop penser qu’elle est chez elle. Et en France, je suis la petite fille d’immigré algérien qui, bien qu’elle soit française, reste tout de même et avant tout algérienne.

Des chances inestimables

Plus je grandis, plus je réfléchis et plus je me pose des questions. Comment me positionner quand d’une manière ou d’une autre les deux pays me montrent que je ne suis pas tout à fait des leurs ?

Malgré tout, ma double nationalité et donc ma double culture sont des chances inestimables. Combiner l’ouverture d’esprit de la culture française et le respect des traditions algériennes est un vrai atout pour moi dans la vie. Pourquoi choisir un « camp » finalement ? Est-ce que je ne pourrais pas être autant française qu’algérienne et fière de chacune de mes deux nationalités ?

Safiayyah, 16 ans, lycéenne, Firminy

Crédit photo Unsplash // CC Hailey wright

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