Leonardo A. 04/06/2025

La fin des émotions

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Leonardo est passé de la dépression au vide. Il ne ressent plus rien et singe les réactions attendues par son entourage. Son envie d’avoir envie demeure.

J’ai 23 ans et je ne ressens rien. Rien de positif. Rien de négatif. À tel point que j’en viens à regretter mes émotions négatives.

Tout a commencé quand j’avais 12 ans. Je ressentais déjà peu, voire pas d’émotions positives. Jusqu’à mes 22 ans, âge auquel j’ai commencé un traitement antidépresseur, mes journées étaient remplies d’émotions négatives. 

Ma dépression m’a volé mes souvenirs heureux. À tel point que l’une des dernières fois où je me suis senti bien, c’était après avoir consommé de la kétamine. Mon dernier sentiment négatif, c’était en juin 2023, lorsque j’ai vu ma mère pleurer en apprenant que je m’étais fait virer de mon école d’informatique.

Le manque d’émotions positives, à cause de ma dépression, et l’effacement des émotions négatives, dû aux médicaments, me donnent un sentiment de vide. Tout est fade. 

Avant, quand je jouais aux jeux vidéo, j’arrivais à m’amuser et à me distraire. Maintenant, même mes jeux préférés m’ennuient vite. Je joue par habitude et pour passer le temps. 

Caméléon social 

Une fois, j’étais à une soirée avec un ami proche. Il s’est embrouillé avec sa copine. Lorsque mon ami a exprimé sa tristesse et son agacement, je n’ai rien ressenti. Mon visage était neutre. Je ne voulais pas lui donner l’impression que je m’en foutais, donc j’ai légèrement froncé les sourcils. J’ai dit : « Merde mec, je suis désolé, j’espère que ça va aller mieux. » 

Avec les autres, je deviens ce que j’appelle « un caméléon social ». Je m’adapte à leurs émotions. Je fais ce que je pense que je devrais faire. Je fais semblant. 

Parfois, je me demande si j’ai encore une personnalité. Tout ça, je n’en parle à personne. Pas à mes parents. Pas même à mes amis les plus proches. Je préfère éviter. J’ai peur de leur réaction.

Leonardo, 23 ans, déscolarisé, Paris

Crédit photo Pexels // CC Julia Berdo

 

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