Moussa T. 06/01/2024

Mes réseaux, de plus en plus trashs

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Sur les réseaux sociaux, Moussa voit régulièrement passer des vidéos de viols, meurtres ou mutilations. Un espace virtuel de plus en plus violent qu’il a du mal à éviter.

Des vidéos étranges qui tournaient dans des groupes Snap. Ça a commencé cette année, au moment des vacances de la Toussaint. C’était une nouvelle option. Dessus, on voyait des Palestiniens et des Ukrainiens se faire tuer… sans aucune censure. Et quand je dis sans censure, je veux dire qu’on voyait des trucs comme une femme ukrainienne se faire couper la tête par deux hommes russes. J’ai aussi vu une autre femme, toujours en Ukraine, se faire violer et tuer par un Russe. Une autre fois, c’était une femme palestinienne qui se prenait une balle dans la tête avec un bébé dans les bras. Le sang giclait de partout. Ce n’était pas beau à voir.

C’était la première fois que je voyais des personnes mourir en vrai. C’était inquiétant et ces vidéos m’ont marqué pendant toutes les vacances. Elles tournaient en boucle dans ma tête et je ne savais pas quoi faire de ces images. J’en ai parlé à des amis qui, eux aussi, recevaient le même genre de vidéos. Ils étaient tout aussi choqués. Par contre, je n’arrivais pas à parler de ça aux adultes autour de moi. J’étais trop mal à l’aise.

Pris au piège de la boucle

Sur ces groupes, les gens envoient des vidéos toujours plus horribles. Des personnes qui se mettent des cuillères dans les fesses. Un gars qui se coupe le gland avec un couteau. Des femmes et des enfants violés en Ukraine, en Palestine, des suicides, du porno, un père qui viole son bébé… À chaque connexion, une nouvelle vidéo, sans que je ne puisse l’empêcher d’arriver jusqu’à moi.

Ces stories sont envoyées sur des groupes créés par des personnes qu’on ne connaît pas forcément. Elles ajoutent des gens au hasard et ces gens-là peuvent en ajouter d’autres et ainsi de suite. Les participants peuvent envoyer des vidéos mais seul le propriétaire du groupe peut expulser des gens. Chaque story dure 24 heures. Longtemps, je n’ai pas compris comment quitter ces groupes pleins de choses dégueulasses qui me donnaient envie de vomir. Une pote m’a finalement montré comment faire pour sortir de cet enfer.

Maissa reçoit souvent des messages lui proposant de l’argent en échange d’insultes ou de photos de ses pieds. Un jour, elle a dit oui.

Capture d'écran de l'article "Gagner de l'argent en les insultant", illustré par une photo sur laquelle on voit les mains d'une jeune femme, en train de prendre en photo ses pieds avec son téléphone.

J’ai signalé les personnes qui postaient ces stories bizarres. Je pense que je ne suis pas le seul, mais je n’ai jamais su ce qu’était devenu mon signalement. C’était trop pour moi. J’ai préféré arrêter X complètement.

Ces vidéos hyper violentes, elles sont partout sur les réseaux. Ils essaient de ban les comptes qui postent ces vidéos, mais ce n’est pas assez rapide et ça cause des dommages sur les jeunes. Aujourd’hui, je reçois moins de contenu de ce genre-là, mais des choses ont changé en moi. Je suis par exemple moins choqué qu’avant devant la vidéo d’une personne qui se tue.

Moussa, 15 ans, collégien, Aubervilliers

Crédit photo Pexels // CC Ron Lach

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