Noire, dois-je rentrer au pays pour trouver du travail ?
J’ai toujours rêvé de continuer mes études en France, comme la plupart des jeunes au Sénégal. Aujourd’hui, être venue ici est mon plus grand regret : si je devais revenir en arrière, je serais restée là-bas. C’est vrai que, dans mon pays, il n’y pas de travail et beaucoup de diplômés chôment. C’est l’une des raisons qui m’ont poussée à venir d’ailleurs. Mais je n’ai eu que des déceptions.
Je suis à la recherche d’une alternance. J’ai envoyé beaucoup de CV à plusieurs entreprises, plus de 500 en quatre mois. Et je continue d’en envoyer. Mais jusque-là, je n’ai eu aucun retour satisfaisant. Je ne perds pas espoir, je continue d’en envoyer et j’essaie de me perfectionner au fur et à mesure. Je décroche un ou deux entretiens par semaine, mais ça ne débouche jamais.
Mon accent du Sénégal est « trop prononcé »
On me sort plein d’excuses bidons comme : « Vous êtes trop qualifiée pour le poste » ; « Pour un poste de commercial, vous avez un accent trop prononcé » ; « Vous ne posez pas assez de questions » ; « Vous posez trop de questions. » Je ne sais plus comment me comporter en entretien. Pour remédier à cela, j’ai décidé de poser cinq questions pertinentes au recruteur et d’essayer de travailler mon accent et ma présentation. Sans succès pour le moment.
Mon accent ne me complexe pas. C’est juste que, pour les postes de business developer, les entreprises recherchent des profils qui s’expriment bien. Je parle bien, mais mon accent du Sénégal, je ne peux pas le changer du jour au lendemain. Cela ne fait qu’un an que je suis en France, donc il me faut du temps pour travailler dessus.
Mon titre de séjour refroidit les recruteurs
J’ai tout de même reçu deux propositions de CDI, sauf que j’ai un titre de séjour étudiant. Quand je l’explique aux recruteurs, ils se montrent réticents, alors qu’il suffit juste de ramener le contrat de travail à la préfecture pour pouvoir bénéficier d’un changement de statut et avoir un titre de séjour qui me permette de travailler.
Anas est arrivé en France pour travailler. Il raconte comment à 16 ans, il est parti du Maroc, envoyé par son père, pour trouver un emploi.
Cette situation m’angoisse beaucoup. Je pense même parfois à quitter la France, une fois que j’aurai terminé mon master. Avec mon diplôme, si je décide de rentrer au Sénégal, je pourrais avoir un poste de cadre. Alors que je ne sais pas ce qui m’attend ici.
J’en ai assez de voir des gens se faire refuser certains postes parce qu’ils sont musulmans, voilées, qu’ils ont une longue barbe, ou qu’ils s’appellent Mouhamad, Fatima ou… Anissa.
Anissa, 24 ans, volontaire en service civique, Romainville
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