Brytanie T. 25/02/2022

Ma peur de l’échec m’empêche d’avancer

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Brytanie s’est retrouvée submergée par ses angoisses pendant sa première année d’études. Quatre ans plus tard, sa peur de l’échec persiste.

Je n’aurais jamais pensé qu’une année scolaire puisse avoir autant d’impact sur ma santé mentale et sur mes projets d’avenir. Dès la journée de présentation de ma première année de diplôme de comptabilité et de gestion (DCG), j’ai senti que je n’allais pas réussir. J’ai regardé autour de moi pour observer mes futurs camarades, la grande salle dans laquelle j’étais et je me suis sentie déconnectée. Mon instinct me criait que je n’allais pas réussir, que c’était voué à l’échec et que je n’allais pas valider. Ce n’était basé sur rien, c’était seulement une sensation bizarre de peur de l’échec.

C’est mon professeur de gestion financière en terminale STMG qui m’a poussée à me lancer. Depuis la troisième, je rêve d’ouvrir mon entreprise pour fabriquer des peluches. Devenir experte-comptable constitue une première étape pour pouvoir financer mes débuts dans l’entrepreneuriat. En sortant du lycée, je n’ai jamais redoublé et j’ai toujours eu des bonnes notes. Mais les études supérieures, ce n’est pas la même chose. Je vais me rendre compte que je ne suis pas prête pour ça.

Dissertation, ce mot qui ne voulait rien dire pour moi

En DCG, une formation en trois ans après le bac, je retrouve toutes les matières de STMG. Sauf en économie, où je suis totalement perdue. Les cours ne ressemblent absolument pas à ceux que j’avais eus auparavant. J’apprends à faire des dissertations. DI-SSER-TA-TIONS, ce mot qui ne voulait rien dire pour moi à part en philosophie, où je me suis ramassée des 8 tout au long de mon année de terminale. J’ai des difficultés à travailler dans cette matière, je me force à retravailler chez moi mais je n’y arrive pas. J’ai comme un blocage.

Les mois passent et je vois mes notes se dégrader, ça me sape le moral. Je me retrouve dans un gouffre dans lequel je m’enfonce sans jamais atteindre le fond. Le temps continue de défiler et j’essaie de demander de l’aide à mes camarades. On se retrouve à travailler tous ensemble, ça m’aide un peu au début, je me remotive, je fais des fiches en me disant que c’est bon je vais y arriver, mais non : j’ai encore des sales notes. Ma prof ne m’aide pas et continue de me descendre mois après mois. Comme si je ne me sentais pas déjà mal, il faut qu’elle en rajoute une couche. J’en parle avec ma mère, mais elle ne connaît pas vraiment le système français et trouve que je ne fais pas d’efforts alors que je mets tous les moyens possibles et inimaginables pour réussir.

Des mauvaises notes aux angoisses

Trois mois avant la fin d’année, je me résigne. Je sais que je vais échouer, mais je continue à aller en cours, et je continue de subir les remarques désagréables de ma prof que je finis par ignorer totalement. Je me relance dans le processus Parcoursup mais je rate la première session d’inscription, faute de retrouver mon relevé des notes du bac. Avril arrive et je me retrouve en quête de soutien et d’attention auprès de mes amis et de ma famille, mais personne ne remarque mon mal-être. Je me renferme sur moi-même et je continue de plonger dans mon gouffre sans fin.

Mai est là, je reçois les résultats du second semestre. Comme je m’y attendais, ils sont catastrophiques, je repasse le permis pour la deuxième fois, je reçois les résultats comme un coup de massue pour m’achever : je l’ai encore raté. Ma mère se plaint, elle dit être déçue de moi. Je fais une demande de stage pour la fin d’année. Refusée. Je ne vais plus en cours. Tous mes camarades sont en pleine révision de l’examen final. Moi, je ne sors plus de chez moi, ni même de ma chambre et je me retrouve face à moi-même.

Le cercle vicieux de l’angoisse

Je suis paralysée de peur et d’angoisses. Je me vois sans avenir, tout se noircit autour de moi, je ne vais pas bien, je n’ai plus envie de sortir. Alors je refuse d’aller à l’anniversaire de ma cousine alors que, depuis quelques années, c’est l’évènement que j’attends le plus avec mon anniversaire, et je refuse de voir mes amis.

Le mois de juin arrive à son terme, j’essaie de me reprendre en main mais je ressens comme un blocage, un mal-être, j’ai peur de quelque chose, mais je ne sais pas de quoi. Je le cache à tout le monde. Quand on me demande si ma recherche de formation avance, je mens en disant que tout va bien, alors que je sais très bien que je n’ai encore fait aucune candidature. Plus je pense à postuler, plus je culpabilise de mentir à mes proches. Et plus j’angoisse, plus mon blocage grandit, pour ne laisser place qu’à une coquille vide et perdue, qui ne sait plus quoi faire et qui attend seulement en silence.

Peur de l’échec

Le temps passe et je finis par reprendre l’avantage sur mes angoisses, parce que je ne veux pas me retrouver sans diplôme. Je reprends la procédure Parcoursup, je ne fais que quatre vœux. Dans l’attente des résultats, je me retrouve submergée par toutes mes émotions et sans énergie. Quelques jours plus tard, je reçois une bonne nouvelle : je suis admise en DUT gestion des entreprises et des administrations (GEA). Je me sens soulagée et libérée d’un énorme poids. Tout s’éclaircit autour de moi et je peux enfin évacuer tout ce stress et profiter de mes vacances en commençant par une petite fête avec mes meilleurs amis.

Je finis par me confier à ma meilleure amie que je considère comme ma psy. Je lui raconte tout, absolument TOUT, et je sens un poids de mes épaules me quitter. Elle m’écoute comme elle l’a toujours fait. C’est à ce moment là que j’ai compris que j’étais effrayée, moi qui me pensais sans crainte. J’ai peur de l’échec et c’est ce qui a détruit ma confiance en moi.

De nouveau paralysée

Alors que j’ai finalement compris et accepté mon mal-être, il refait irruption lorsque je dois me réinscrire pour la deuxième année de mon DUT. Je me retrouve une nouvelle fois submergée par ma peur. Mes angoisses me paralysent et m’empêchent de candidater. Une nouvelle fois, je me renferme, je parle très peu à mes amis et à ma famille, je ne sors plus de ma chambre.

Je me rends compte que mon échec en DCG m’a totalement traumatisée. Je dois continuer à vivre avec cette peur même en ayant surpassé mes échecs : j’ai validé ma première année de DUT, j’ai obtenu mon permis, j’ai réalisé un semestre Erasmus. Mais, même après ces petites victoires, je finis toujours dans le même état, j’ai une nouvelle fois peur d’échouer.

Omar était en décrochage scolaire. Grâce à son service civique et son action auprès des jeunes, il veut aujourd’hui devenir éducateur.

deux points serrés qui se checkent

Je rate une nouvelle fois les premières sessions d’inscription et je me retrouve à postuler pour seulement trois écoles. On m’accorde un entretien téléphonique, qui ne se passe pas comme prévu. Ma confiance en moi, déjà si faible, se retrouve balayée par les questions du jury auxquelles je ne m’étais pas préparée. La rentrée est là, je tente ma chance à l’université. Sans succès. J’arrive trop tard. Ma mère me parle du service civique et je me lance.

Nous sommes en juin 2021. Et je dois essayer à nouveau de trouver une école pour l’année prochaine, et je n’ai commencé aucune démarche. Je me retrouve à nouveau à mentir à ma famille. Je suis paralysée par la peur d’échouer à nouveau. Une histoire qui se répète, une peur qui me bloque et avec laquelle je dois apprendre à vivre.

Brytanie, 22 ans, volontaire en service civique, Drancy

Crédit photo Pexels // CC Keira Burton

 

Atychiphobie [a.ti.ki.fɔ.bi], nom féminin :

1. Peur irraisonnée, exagérée et persistance de l’échec. C’est un trouble qui peut créer de l’anxiété, des maux physiques, une sensation de danger imminent et un isolement social. Une personne qui souffre d’atychiphobie est souvent amenée à se dévaloriser, et refuse de prendre des risques.

2. Étymologiquement, l’atychiphobie est la peur d’être malchanceux.

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1 réaction

  1. Pareille quand j’étais en première année de médecine
    Mais bon , on n’abandonne pas . Et essayons de surmonter nos peurs

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