Jeune et femme, qui me représente en politique ?
Petite, je passais déjà pas mal de temps dans les manifs, et les réunions du syndicat. À la maison, c’était débat sur débat, info sur info, et moi, spectatrice de ce monde. J’ai 15 ans et j’ai toujours été sensibilisée à la politique par mes parents.
Mon père et ma mère étaient délégués syndicaux. Un jour, petite, j’avais commencé à chanter à l’école : « Sarko, serre tes fesses, on arrive à toute vitesse ! » Ce n’était rien d’autre que l’une des nombreuses phrases chantées par les manifestants en 2010… À 4 ans, on ne sait pas trop ce qu’est la politique, mais on découvre le monde, on est observateur.
Peu de diversité en politique
Aussi loin que je m’en souvienne, en politique, j’ai toujours vu très peu de diversité. Ce que je voyais le plus souvent, c’était des mecs blancs d’environ 35 à 60 ans. Au début, je ne me questionnais pas trop, mais en grandissant, en aiguisant mon sens critique et ma curiosité, j’ai posé de plus en plus de questions sur ce sujet que j’idéalisais auparavant. Pourquoi est-ce que je ne me sens pas représentée par les politiques actuels ? D’abord en tant que femme, mais aussi en tant que jeune et en tant que personne ?
Naïvement, je pensais que mon bagage politique relativement important m’éviterait ce genre de questionnement, qu’il m’éviterait d’être perdue dans un sujet que je suis censée avoir apprivoisé. Mais j’ai beau lire tout plein d’articles, en passant par Le Monde, Le Monde Diplo ou Libération, mon scepticisme reste de marbre.
Ma génération est oubliée
J’ai beau comprendre et savoir de quoi parlent nos politiques, je garde la même impression. L’impression qu’ils s’adressent à une seule tranche de la population : les 35-65 ans. Par exemple, on interroge très rarement les personnes concernées quand on parle de sujets qui peuvent être jugés « polémiques ». Si je devais prendre un exemple, ce serait les minorités : souvent on voit sur les plateaux TV des hommes blancs de plus de 45 ans en parler, alors qu’ils n’en font pas partie.
Les politiques se mettent à dos le futur de la France : les jeunes. La plupart de mes ami·e·s sont aussi, voire plus, perdu·e·s que moi. Lorsqu’on parle politique, c’est souvent des débats. On a tou·te·s des avis à peu près différents, c’est intéressant. En ce moment, les sujets tournent beaucoup autour des présidentielles, plus précisément autour des polémistes. Mes potes avec lesquel·le·s je me sens autant « sensible » sont souvent celles et ceux qui ont bénéficié d’une éducation politique dès l’enfance.
Ce que je conclus de la politique actuelle, c’est qu’elle n’est pas accessible à tout le monde. Dans tous les cas, ce que je vois chez les jeunes en ce moment, c’est un décrochage de l’actualité politique relativement important dû à cette incompréhension…
Alycia, 15 ans, lycéenne, Paris
Crédit photo Hans Lucas // © Xose Bouzas
Le vote chez les jeunes
Les jeunes votent moins, mais sont tout autant concerné·e·s par la politique
82 % des moins de 35 ans se sont abstenu·e·s lors des élections départementales et régionales de juin dernier. Ils et elles ne sont pas pour autant désintéressé·e·s de la vie politique et citoyenne, puisque cette tranche d’âge est celle qui s’est le plus engagée auprès d’associations ces derniers mois et qui manifeste le plus.
Ils et elles ne se sentent pas représenté·e·s
Si l’abstention est plus forte chez les moins de 35 ans, c’est surtout parce qu’ils et elles ne se sentent pas représenté·e·s par les élu·e·s. Et pour cause : l’immense majorité des représentant·e·s de l’État sont des hommes de plus de 50 ans. À titre d’exemple, les député·e·s français·es ont en moyenne 51 ans, malgré un phénomène de rajeunissement et de féminisation au fil des scrutins.
Le taux d’abstention dépend des enjeux de l’élection
Les moins de 35 ans ne s’abstiennent pas dans les mêmes proportions aux différents scrutins. Ils et elles participent moins aux élections locales (régionales, municipales, etc.), parce qu’ils et elles ont l’impression que les représentant·e·s politiques nationaux et européen·ne·s leur ressemblent plus, et se tournent davantage vers elles et eux. Les jeunes ont très rarement appris le fonctionnement des institutions locales à l’école, et c’est aussi pour cette raison qu’ils et elles ne se sentent pas concerné·e·s.