Jule P. 26/01/2024

Cette nuit-là, Marseille s’est embrasée

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27 juin 2023, Nahel Merzouk meurt sous les balles d’un policier à Nanterre. S’ensuit une semaine de révoltes urbaines partout en France. À Marseille, le centre-ville comme les quartiers Nord sont concernés. Jule nous raconte les premières heures de l’embrasement.

Du haut de la rue, je voyais de la fumée au loin. Je me suis rapproché, et là j’ai vu plein de personnes. Ça sentait le feu. Il y avait des fumigènes et des voitures en feu sur les trottoirs. J’ai demandé à un groupe de jeunes : « Il se passe quoi ? » Ils m’ont répondu : « Ce sont les émeutes. »

En juin dernier, je revenais de l’entraînement de foot. J’étais parti faire une détection dans un club. Une détection, c’est un test pour être éventuellement sélectionné dans un centre de formation. L’entraîneur m’avait amené en voiture, mais au retour il m’a déposé au Vieux-Port pour que je rentre en transport au quartier.

Je devais prendre le bus 97 sur la Canebière pour rentrer chez moi, vers l’Hôpital Nord. Mais il n’y avait plus de bus. Le service n’était plus assuré parce que c’était le premier jour des émeutes après la mort de Nahel.

Je suis resté sur un trottoir à regarder. Des policiers frappaient des personnes. J’ai vraiment stressé ! Ça faisait peur. Ça explosait de partout. Il y avait des gros « boum ». Beaucoup de bruit. Je me suis décalé pour appeler mon père, pour qu’il vienne me chercher. Je n’avais pas d’autre solution. En arrivant, il était à la fois flippé et rassuré. Il m’a dit : « Au moins, je suis venu tôt, ça peut devenir plus dangereux. »

Des groupes Snap pour s’organiser

De retour chez moi, j’ai regardé TikTok. Il n’y avait que des vidéos des émeutes. Le cortège avait vachement grossi, ça explosait de partout. Et il y avait le RAID sur les vidéos.

Ça a duré comme ça plusieurs jours. Ça faisait des groupes sur Snapchat pour s’organiser. Tous les jours, ça donnait rendez-vous sur les réseaux : « 18 heures tous au Vieux-Port » ; « 19 heures tous à Grand Littoral. » Grand Littoral, c’est un centre commercial des quartiers Nord. Mais moi, j’ai quitté tous les groupes, parce que ça pouvait être dangereux. Genre avec la police et tout. Je n’avais rien à voir avec tout ça.

J’ai trouvé que les gens ont abusé pendant ces émeutes, mais qu’en même temps c’était normal. Parce que la police a fait un geste qu’il ne fallait pas faire. Elle a été trop violente.

Jule, 14 ans, collégien, Marseille

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