Les garçons virils et les filles gracieuses
Lorsque j’avais 8 ans, j’ai sauté le pas : j’ai décidé de m’inscrire à la gymnastique artistique. Depuis petite, je suis passionnée par ce sport. Je regardais les épreuves de Simone Biles et des séries comme Que la meilleure gagne ! ou L’École de gym : Une seconde chance.
Lors de mon premier cours non mixte, les garçons étaient avec un professeur et les filles avec une professeure. J’étais très excitée à l’idée de commencer la gym, mais également stressée. Au final c’était génial. Je me suis bien amusée.
Dans la salle, il y avait un grand tatami sur lequel plusieurs groupes s’entraînaient au même moment. J’ai observé les garçons à côté de nous. J’ai remarqué que l’on ne faisait pas les mêmes choses. Ils faisaient des exercices plus basés sur la force, comme des tractions. Les nôtres étaient basés sur la souplesse, tels que le grand écart et les ponts.
Les garçons faisaient des exercices on va dire « virils », et les filles des exercices de souplesse plus gracieux. J’ai trouvé cela dommage. Je ne voulais pas particulièrement être mélangée avec eux, mais j’aurais aussi aimé faire du renforcement musculaire et des exercices avec les anneaux.
Comparaisons et rivalités
Durant les cours, il y avait aussi une sorte de rivalité entre les filles. Parce qu’on n’avait pas toutes le même niveau ni la même morphologie. La professeure faisait du favoritisme avec les filles plus minces et plus souples.
Certaines avaient commencé dès l’âge de 3 ans. Elles avaient un niveau plus avancé que les autres. La professeure les mettait plus en avant et nous comparait de temps en temps avec elles. Cela créait de la compétition entre nous, alors qu’on était toutes venues pour apprendre.
Aujourd’hui, quand j’y pense, je trouve cela assez rabaissant. On devrait toutes êtres traitées de la même façon, sans être comparées. Cela ne m’a pas empêchée de continuer la gymnastique car c’était ma passion. Mais je pense que j’aurais dû parler de ce qui me dérangeait à ma professeure ou à mes coéquipières.
Retrouver le goût du sport
En 2019, j’ai arrêté la gym. En juin 2023, je me suis motivée et j’ai décidé de reprendre. Lors de mon premier cours, j’ai vu que rien n’avait changé. Il n’y avait pas de cours mixte, mais cela ne me dérangeait pas. J’aurais trouvé embarrassant de me mélanger avec eux. Mais les exercices étaient les mêmes qu’avant. La rivalité entre les filles était toujours présente. Notre professeure n’avait pas changé non plus. Elle nous comparait à celles avec un plus haut niveau.
J’ai finalement décidé de me désinscrire définitivement. Je ne ressentais plus de sentiment d’excitation quand j’allais à la gym. Cela me fatiguait plus qu’autre chose.
Aujourd’hui, cette prise de conscience me permet de prendre du recul, de réfléchir aux inégalités entre les filles et les garçons et aux préjugés sur le physique. À la rentrée 2024, je me suis lancée dans un nouveau sport : le volleyball. Je suis toujours enjouée d’y aller. Il y a une bonne ambiance. Tout le monde s’entraide, que tu aies un niveau supérieur ou non. C’est beaucoup mieux qu’avant.
Ilana, 14 ans, collégienne, Paris
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