Yoann P. 17/10/2022

Deux pères, pas un à la hauteur

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Yoann a grandi avec un père peu présent. Au divorce de ses parents, il pensait qu'avec son beau-père, ça allait changer. Il a vite été déçu.

Les problèmes ont commencé alors que je n’étais même pas né. Ça faisait huit mois que j’étais dans le ventre de ma mère quand elle a perdu les eaux. Une précocité due à une « bourde » de mon père, un soir de tempête. Deux jours après, les médecins étaient obligés de provoquer l’accouchement.

C’est ma mère qui s’est occupée de moi. Partout où elle allait, je la suivais. Mon père s’en fichait. Le bain, le biberon, ce n’était pas son truc. Ils géraient un restaurant à cette époque, mais il était au nom de ma mère. C’est elle qui se levait tous les matins à 6 heures pour m’emmener chez la nounou, ouvrir le restaurant, préparer la salle… Ce n’est que vers 10 heures que mon père la rejoignait pour commencer à cuisiner.

Chacun sa maison

Un jour, le restaurant a fermé pour des problèmes financiers. C’est ma mère, seule, qui a dû éponger les dettes. Mon père n’a jamais donné un centime. Malgré tout, elle l’aimait.

Ils ont fini par se séparer alors que j’avais 4 ans. À partir de là, chacun était dans sa maison. Chez ma mère, je me levais tôt. J’étais toujours le premier à la garderie de l’école. Premier arrivé, mais aussi dernier parti : ma mère avait quasiment deux heures de route pour aller travailler chaque jour.

Mon père me prenait des fois le week-end, seulement quand ça l’arrangeait. Je n’aimais pas trop aller chez lui. D’un autre côté, ça m’a forcé à devenir plus autonome : je devais prendre le petit-déjeuner et ma douche seul parce que mon père dormait. J’ai vécu comme ça pendant deux ans.

Nouveau départ sans mon père

Ma mère a fini par rencontrer un autre homme. On va l’appeler Ben. On passait quelques moments ensemble, même si au fond, à 7 ans, je m’en fichais un peu. Du moment qu’elle était heureuse…

Il faut se souvenir de ce Ben, car il aura un rôle important plus tard. En attendant, c’était l’époque d’un nouveau déménagement, car ma mère avait réussi un concours. C’est à ce moment-là que j’arrive dans le village dans lequel je vis toujours aujourd’hui, dans le Rhône.

Mon père passait me prendre de temps en temps, mais de moins en moins. Petit à petit, je me suis fait de nouveaux amis. Ma mère ne voyait plus trop Ben à cette époque, jusqu’à ce qu’il la rappelle un jour.

Un nouvel appartement on a déménagé dans la rue d’en face, Ben qui s’installe avec nous, et le juge qui décide de donner la garde exclusive à ma maman après quelques passages douloureux au tribunal… On avait l’impression que tout allait enfin aller mieux.

Le whisky et les coups de Ben

Malheureusement, ça ne s’est pas passé comme ça. Ben était violent avec moi. Il me tapait pour « rigoler », pour créer un lien. Mais moi, j’avais mal. Il m’insultait aussi, pour « rigoler ». Un jour, alors que j’avais des idées sombres, j’ai décidé d’en parler à ma maîtresse. Ben a vite arrêté, j’ai compris que c’était vraiment pour s’amuser, même si j’ai dû aller voir un psy pendant plusieurs mois pour me libérer la tête.

Ils se sont mariés au bout d’un an. C’était un peu trop rapide, je trouve. Et pour moi, l’enfer a recommencé. Ben s’est mis à boire beaucoup plus qu’avant le mariage. Tous les soirs, c’était jusqu’à cinq verres de whisky. Ça se terminait souvent par une dispute et ma mère en pleurs. Lisie, la fille de Ben, ne voulait même plus venir à la maison.

Six ans ont passé. Je suis à l’internat depuis cette année, en seconde professionnelle, alors ma mère se retrouve seule avec Ben. Les disputes continuent. Pendant longtemps, ma mère parlait de divorce sans oser. Ils sont enfin d’accord, mais au moment où j’écris ce texte, je ne sais pas s’ils vont vraiment divorcer et encore moins comment ça va se finir.

J’ai au moins appris une chose : je n’accorderai plus ma confiance aussi facilement, je me méfierai de tout le monde et surtout des mecs.

Yoann, 15 ans, lycéen, Lyon

Crédit photo Pexels // CC cottonbro

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