Amine K. 11/01/2021

Je ne peux pas choisir entre mes deux cultures !

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D’origine franco-tunisienne, le métissage d’Amine est une richesse autant qu’un dilemme. Alors il essaie d’en tirer le meilleur de chacune de ses origines.

Je suis métis, né d’une mère blanche et d’un père d’origine tunisienne. La double-culture apporte de la richesse, mais aussi quelques difficultés imprévues. L’une d’elles, c’est le mélange des langues. Lors de mon enfance de mes 1 an à mes 3 ans, dans notre foyer on parlait uniquement arabe. J’ai donc appris puis parlé arabe durant la majorité de mon enfance. En effet, mon père a jugé bon de m’éduquer en arabe car j’allais apprendre le français à l’école, de toute façon.

Aujourd’hui, je vois cela comme une idée de génie puisque grâce à lui, je suis bilingue ! Mais le problème, c’est que des fois mon cerveau « bug » et je commence à mélanger les deux langues. Et alors je peux dire : « Belar la porte » à la place de : « Ferme la porte. » Ou : « Où sont les mfeteh ? » À la place de : « Où sont les clefs ? »

La seconde difficulté, c’est le mix des cultures. À la maison, la culture arabe vient se mélanger à la culture française. Par exemple, nous ne fêtons ni Noël ni Pâques, et toute la viande que nous mangeons est « hallal », c’est-à-dire préparée selon le rite musulman. À cause de ces particularités, mes camarades me posent souvent des questions qui ont pour moi des allures de dilemmes insolubles. Du type : « S’il y a un match de football entre la France et ton pays d’origine, t’es pour qui ? » Compliqué ! Mes parents et ma famille sont pour la Tunisie, mais tous mes potes sont pour la France… Mais Dieu merci, ce match fatal n’a jamais eu lieu pour le moment.

« Amine, tu renies tes origines… »

Une version plus compliquée des questions que peuvent me poser mes amis, c’est celle-ci : « Si c’est la guerre entre les deux pays, tu t’engages pour qui ? » Bien sûr, impossible pour moi de choisir entre mon pays d’origine, la Tunisie, et la France qui m’a accueilli et éduqué… Donc si la guerre venait à se déclarer, il y a de fortes chances pour que je fuie loin (par exemple en Inde) pour que personne ne vienne me retrouver.

La troisième difficulté, c’est la pire : trouver un « juste-milieu » entre les deux cultures. J’ai l’impression qu’il ne faut pas se comporter de façon « trop africaine » pour ne pas être trop mal vu par les profs et les autres personnes. Sinon, on peut être accusés d’être « mal intégrés », par exemple si on porte un maillot de l’équipe du bled.

Mais il ne faut pas être non plus trop « français », sinon ce seront vos semblables qui vous le feront remarquer. Moi, j’ai déjà entendu ça par exemple : « Amine, il est marron de l’extérieur et blanc de l’intérieur, c’est une noix de coco ! » Ma mère m’a aussi dit : « Amine, tu renies tes origines… » Simplement parce que je venais de refuser un couscous ! C’était sur le ton de l’humour évidemment, mais ces phrases sont mémorables pour moi, parce que je suis à un âge où le jugement des autres est quelque chose de très important.

En clair, il faut réussir à trouver le juste-milieu pour ne pas être considéré ni comme un communautariste, ni comme un fruit (enfin, une « noix de coco » en l’occurrence…) Face à ces difficultés, j’en conclus que le mieux à faire, c’est d’essayer de garder le meilleur des deux cultures. Les gens dans mon cas se prendront toujours des remarques mais avec le temps, on peut changer les a priori des autres. Bref, le temps, c’est le meilleur allié.

 

Amine, 15 ans, lycéen, Gardanne

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