Jasmine C. 19/11/2024

Prendre soin les uns des autres à Lourdes

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En 2023, le sanctuaire Notre-Dame de Lourdes a accueilli 3,1 millions de visiteurs. Parmi eux, de nombreuses personnes malades ou en situation de handicap qui partent en pèlerinage avec leur diocèse. Certaines pour se recueillir, d’autres pour sortir de l’isolement. Parfois en espérant un miracle. Jasmine a été accompagnatrice bénévole pour un de ces séjours. Elle raconte.

Nous sommes partis un dimanche, à 4 heures du matin, avec ma professeure principale et six autres élèves de ma classe de terminale, volontaires comme moi. Nous avons pris un car spécial. Il venait tout droit de Lourdes, là où nous allions vivre des moments intenses en émotions.

Ce car médicalisé permet aux malades de voyager dans les meilleures conditions possibles en fonction de leurs pathologies. Nous accompagnons des personnes âgées qui viennent d’Ehpad ou des adultes en foyer de vie. Il y a des personnes atteintes de cancers ou d’autres maladies, et d’autres en situation de handicap. Ce sont tous des gens croyants. Ils vont à Lourdes pour se recueillir, espérer un miracle et peut-être guérir. Moi je suis baptisée catholique, mais pas pratiquante.

Quand je voyais des témoignages de bénévoles à la télé, je me disais toujours : « Waouh, j’aimerais trop faire ça. » Je ne me suis jamais lancée, jusqu’à ce qu’on me propose, à mon arrivée en bac pro Services aux personnes et aux territoires (SAPAT), d’être bénévole pour un séjour à Lourdes. C’était l’occasion rêvée de sauter le pas. J’avais vraiment hâte de partir, mais quand même des appréhensions. Je ne savais pas si j’allais savoir me débrouiller avec les personnes en situation de handicap.

Aux petits soins dans le bus

Dans le car, on est dans le bain direct, on n’a pas le temps de réfléchir ! Le lien se crée directement avec les autres bénévoles et les malades. Il y a très peu de jeunes dans les bénévoles, donc tout le monde est très sympa avec nous.

Notre bac pro nous aide bien. On apprend aux autres quelques techniques de base pour aider les personnes dans leur vie quotidienne, notamment sur l’ergonomie, les positions adaptées pour mettre les personnes au lit sans leur faire mal, et pour les aider à faire leur toilette et prendre leurs douches.

Je me souviens notamment de cette dame qui souffre d’un handicap dont je m’occupe durant les neuf heures de route. Et des nombreux allers-retours en plein milieu de la nuit dans l’allée du car pour amener les personnes aux toilettes.

De vraies responsabilités

À l’arrivée à Lourdes, les gens chantent des chants religieux joyeux. Les premiers jours se passent et nous apprenons à tous nous connaître. Du matin au soir, on s’occupe des gens. On les sort du lit, on fait leur toilette, on les habille, on les emmène au petit-déjeuner… On les accompagne dans tous leurs déplacements extérieurs, dans le domaine du sanctuaire, lors de la messe dans les basiliques…

J’ai 16 ans et, pour la première fois, j’ai de vraies responsabilités. Ce n’est pas comme en stage en Ehpad ou en crèche où on a toujours quelqu’un qui nous supervise. Là, on fait tout de A à Z. On nous prend au sérieux. Ça me donne confiance en moi. Des fois, c’est quand même la course mais il y a beaucoup d’entraide.

Prendre la parole en direct à la télé

Les journées sont bien organisées et bien remplies. Un soir à 21 heures, dans la nuit, il y a une procession aux flambeaux. Les participants, équipés de leurs flambeaux, suivent la statue de Notre-Dame de Lourdes en l’accompagnant de leurs chants et prières tout autour du sanctuaire. C’est le moment qui me marque le plus du pèlerinage.

Cet endroit me fait tellement me sentir en confiance, apaisée, que je dépasse la timidité qui m’empêche d’être pleinement moi-même et épanouie. Lors d’une messe à la grotte, je prends la parole au micro accompagnée d’autres bénévoles et de malades du diocèse devant une centaine de personnes, pour un événement filmé et diffusé en direct à la télé. Au début, ça me fait très peur. C’est impressionnant. Je n’aurais jamais pensé en être capable. Pourtant, là, j’ose.

Lorsque le moment vient de monter dans le car pour rentrer, je n’en ai pas envie. Je me sens grandie, et avec qu’une seule envie : y retourner.

Jasmine, 18 ans, étudiante, Brest

 

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