Zélie S. 02/06/2022

En tant que femme, j’ai peur

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Traumatisée par ce qu’elle entend dans son entourage ou dans les médias, Zélie redoute les agressions des hommes, dans la rue, dans le bus, et même dans sa famille.

Quand je pars au collège à pied et qu’il fait encore nuit, je regarde plusieurs fois derrière moi si quelqu’un me suit. Je regarde devant s’il n’y a personne qui va surgir de nulle part, et constamment autour de moi, au cas où. Je le reconnais, je suis parfois un peu dans la parano. Ce qui me fait peur à ce point, c’est tout ce que je lis ou vois dans les journaux. Les kidnappings, les meurtres de petites filles, les viols et les agressions. Tout ça renforce mon sentiment de peur.

Mes stratégies pour calmer l’angoisse

Le matin, il n’y a pas grand monde qui marche dans la rue. Quand je n’ai pas le choix, je mets mes écouteurs pour me rassurer. Je me répète en boucle que ce n’est pas aujourd’hui qu’il va se passer quelque chose, et que je connais ce chemin.

Pour éviter le supplice de la marche à pied, j’essaie d’arriver dix minutes avant le passage du bus. Comme ça je suis sûre de ne pas le louper !

Dans le bus quand il reste une place, si c’est à côté d’un garçon je reste debout. Si c’est à côté d’une femme, je m’assois, ça ne me dérange pas. Sinon, je me mets seule sur un siège mais il faut qu’il y ait assez de monde dans le bus et que je ne sois pas isolée.

Le soir, toujours accompagnée

J’ai peur, mais ma mère m’a appris à me protéger en faisant beaucoup de prévention. Par exemple s’il y a quelqu’un qui veut m’emmener, je crie.

Quand je rentre tard le soir, je ne suis jamais seule. On me raccompagne toujours à pied, à deux pas de chez moi, pour que je sois en sécurité. Mais le plus souvent je rentre avec ma mère ou ma cousine quand elle est là. Je préfère ne pas sortir trop tard. Quand il fait nuit, je rentre. Donc l’hiver, je rentre très tôt !

Les origines de ma peur

Je pense que le fait que je sois aussi inquiète vient probablement des expériences des autres femmes de ma famille. Ma tante par exemple, ou ma mère, ont vécu des tentatives de relation sexuelle avec des hommes de leurs familles. Bien sûr, elles n’étaient pas consentantes. J’ai peur aussi car des amies à moi ont déjà été suivies dans la rue.

J’ai l’impression que les femmes doivent beaucoup se protéger, même quand ce n’est pas forcément utile. Chez moi, par exemple, je ne suis pas à l’aise avec les hommes de ma famille. Même si j’en apprécie énormément, pour certains, je suis obligée de rester froide avec eux. Je suis distante alors qu’il ne s’est rien passé. J’ai juste peur et je me protège. Car en quelques secondes, tout peut arriver.

Zélie, 15 ans, collégienne, Creuse

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