5/5 Tiktokeur, ce travail à temps plein
Une pote m’a dit qu’elle ne savait pas comment sélectionner des produits pas chers et bons pour sa peau. Alors, je suis allé au supermarché à côté de chez moi, un Carrefour, et j’ai fait une vidéo sur les produits de beauté à acheter ou ne pas acheter. Premier soir, première vidéo, 2 000 vues. En quelques jours, je suis passé de 0 à 1 000 abonnés et j’ai continué à créer du contenu. En un mois, j’avais 10 K. Puis, 50. Et, aujourd’hui, j’ai une communauté de presque 500 K sur TikTok.
J’ai découvert TikTok pendant les premiers confinements. Je n’étais pas du tout consommateur, je n’avais même pas l’appli sur mon téléphone. Les cosmétiques, c’est vraiment ma passion, surtout le soin de la peau. Au départ, je voulais plutôt ouvrir ma chaîne Youtube, mais je ne savais pas du tout faire de montage. En plus, je n’étais pas un grand consommateur de cette plateforme. Alors à quoi bon créer des vidéos si toi-même tu n’en consommes pas ?
Mon premier client TikTok était mon employeur de l’époque !
Sur Youtube ou Instagram, le soin de la peau était raconté de manière scientifique. Ça manquait d’un côté fun ! Alors, j’ai décidé d’ouvrir mon compte TikTok : @skincarebylouisoff ! Puis, il a fallu trouver un ton. Ma première vidéo en magasin ne nécessitait pas de me créer un personnage. Mais très vite il a fallu que j’intègre les codes TikTok. C’est devenu une vraie mise en scène. Quand je me filmais, il fallait que ça me fasse rire, sinon je ne la publiais pas.
J’ai donc commencé en janvier 2021 et ça a été assez rapide. À l’époque, je bossais chez Sephora. Ils ont vu que je créais du contenu et m’ont contacté pour que j’en crée pour eux ! J’en ai fait juste une, et j’ai animé un live aussi ! À ce moment-là, quand on me parlait d’entrepreneuriat, ce n’était pas du tout mon truc. J’ai toujours voulu travailler dans un bureau, avoir un poste chef de projet formation… Puis, très vite, une marque de cosmétique a voulu m’embaucher.
« Louis, tu vas vraiment cumuler un taff + TikTok ? »
Je me réveillais tous les matins à 7 h 30, je réfléchissais au sujet que je voulais traiter, et je préparais la vidéo pour pouvoir la tourner le soir après le travail. Puis, j’allais bosser. De 9 h 30 à 18 heures, j’étais chez Sephora et, à 18 heures, je tournais la vidéo que je publiais à 20 heures avant de passer en live à 21 h 30. Tous les soirs, pendant trois mois. Quand on te dit qu’un influenceur ne bosse pas… Pour en arriver à ce stade, il faut charbonner, il n’y a pas de secret !
Du coup, j’ai passé l’entretien pour cette boîte. C’était un super poste avec un très bon salaire mais, après avoir accepté le job, je me suis dit : « Louis, tu vas vraiment cumuler un taff + TikTok ? » J’avais vraiment peur de laisser passer ma chance. C’est une plateforme qui demande de la constance, il faut y être tous les jours. Alors, après y avoir mûrement réfléchi, à 24 ans, j’ai officiellement dit non à mon premier CDI.
Au mois d’avril, les marques commençaient déjà à me contacter pour des collaborations rémunérées et j’ai eu la chance d’être épaulé par des tiktokeurs qui m’ont expliqué comment ça fonctionnait. T’as vite fait de te faire avoir par les marques, car elles sont très regardantes sur leurs budgets ! Au tout début, une agence m’avait proposé trois vidéos pour un prix vraiment dérisoire… J’avais accepté car c’était ma première collaboration et je ne connaissais pas encore assez bien les prix du marché.
« Tu n’as pas besoin de talent » ; « Il faut être beau » ; « Ce n’est pas un métier stable »… Beaucoup de clichés persistent sur les influenceurs·euses. Certain·e·s ont participé à l’émission Étiquette de France.tv Slash pour y répondre :
Depuis, je reçois des dizaines de mail par jour pour des demandes de partenariat, mais j’ai des critères de sélection. Je fais très attention à ce que je mets sur ma peau. J’ai des règles d’or. Par exemple, je ne recommande pas des produits qui contiennent de l’alcool. Je peux faire quelques exceptions en fonction du produit et de sa formulation, mais je suis intransigeant. C’est aussi pour ça que j’ai une grosse communauté ! Les gens me font confiance. Ce sont mon métier et ma communauté qui me font vivre, alors je me dois d’être ultra transparent.
Mes semaines, c’est du 7 jours sur 7
Être tiktokeur, ce n’est pas que créer du contenu. Les vidéos c’est deux–trois heures par jour et, le reste du temps, c’est ouvrir des mails ou relire des contrats. Une partie juridique assez intense et complexe. Encore une fois, j’ai la chance d’être épaulé là-dessus ! Certains tiktokeurs préfèrent entrer en agence pour déléguer toute cette partie administrative et de négociations. Les agences prennent 20 à 30 % de ton chiffre. Ces commissions sont monstrueuses… on est loin de la série Dix pour cent !
Du coup, mes semaines, c’est du sept jours sur sept. Je n’ai pas de jour de repos, mais c’est parce que j’adore ce que je fais ! Je pourrais mieux m’organiser, mais TikTok c’est une plateforme où tu as des nouvelles vidéos, challenges, musiques tout le temps. Des buzzs auxquels tu te dois de répondre au quotidien. Suivre les tendances, c’est le meilleur moyen pour grimper !
Série 1/5 – Anaïs suit des tiktokeurs qui lui ressemblent : des lycéen·ne·s, de banlieue, fier·e·s de leurs origines. Leur réussite lui donne envie d’être célèbre.
Bien sûr, tout tiktokeur est dépendant de la qualité de ses vidéos, et on est accro au résultat ! En ce moment, j’essaie de développer de nouveaux services comme le coaching de peau. On ne sait pas comment le réseau va évoluer. Si ça fait comme Youtube, on sera là pour longtemps. Par contre, si c’est comme Vine, t’es là un an et c’est fini ! Mais quoi qu’il arrive, ça aura été une expérience pro incroyable. Même si ça reste du virtuel, monter une communauté de 500 K, c’est quand même un truc de fou !
Louis, 24 ans, entrepreneur, Hauts-de-France
Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)