2/4 TPMP et les streamers, mon déclic politique
La première fois que j’ai entendu parler de politique, c’était à la télé en 2017. Pour savoir si Marine Le Pen allait être présidente. Puis le vide, pendant presque cinq ans. Chez moi, la politique n’existait pas. Je ne m’y intéressais pas. Mon père et ma mère ne votent pas. On ne parle jamais de ça à la maison.
Il a fallu attendre que des morceaux de débats apparaissent sur TikTok pour que je m’y intéresse. La première fois, c’était des extraits de « Touche pas à mon poste ! » (TPMP) avec Jean Messiha. Il se faisait clasher. Les débats, j’aime bien quand ils sont organisés sur TPMP.
Sur TPMP, ça peut partir en clash à tout moment
Le plateau est grand et bleu, avec plein de lumières et de bruitages. Les spectateurs applaudissent. Les gens rigolent. Il y a une dizaine de personnes qui donnent leurs avis avec le chef de l’émission, Cyril Hanouna. Lui, il fait juste le show. Tu sens que ce n’est pas sa vraie personnalité. Il fait semblant de rigoler. Souvent, les gens qui viennent ce sont des personnes qui s’étaient déjà embrouillées sur internet. J’y ai vu des chanteurs comme Booba, des acteurs, mais aussi des Gilets jaunes. C’était hyper intéressant. Ils avaient des histoires atypiques à raconter.
Sur TPMP, les débats sont drôles. Ils ont du rythme. Ce n’est pas aussi encadré que sur TF1. J’ai l’impression que les gens sont plus libres de leur parole. Sur les autres chaînes, on a l’impression que les discours sont écrits. Que tout est préparé à l’avance alors qu’à TPMP, à tout moment ça peut rigoler, mais ça peut aussi partir en clash. Ce que je préfère largement ! Et puis les gens qui viennent sont décontractés. Ils ne sont pas toujours en costards avec des petites vestes. Ils ont des joggings, comme moi.
Le debrief des streamers
Puis, il y a eu le débat entre Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon. Tout le monde en parlait sur Twitter. Du coup, je l’ai vu en direct sur BFM. Mon premier vrai débat. C’était trop encadré avec les temps de paroles, les sujets, les questions, mais j’ai tout regardé pour bien comprendre qui est qui. En gros, j’ai vu Éric Zemmour comme un personnage raciste. Une personne qui n’avait pas de cœur et qui est contre l’immigration et les personnes noires et arabes. Jean-Luc Mélenchon, c’est plus quelqu’un qui est pour l’égalité, pour venir en aide aux personnes les plus démunies. Il ne se place pas religieusement, il est juste pour que tout le monde puisse pratiquer sa religion tranquillement.
Série 3/4 – Désespéré face à la situation des jeunes pendant le Covid, Alexandre a retrouvé espoir en participant à un mouvement citoyen.
Pour encore mieux comprendre, j’ai regardé ensuite les debriefs de l’émission avec les streamers Amaru et Medja. Ils faisaient des blagues et tout. C’était marrant car j’ai vu le débat sous une autre forme. Ça m’a donné envie de suivre l’élection cette année. De regarder les grands débats, pour suivre les debriefs des streamers derrière.
Sofiane, 15 ans, collégien, Aulnay-sous-Bois
Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)
Abstentionnistes mais pas dépolitisé·e·s
Le vote n’est plus un réflexe
L’abstention atteint 72 % chez les 18-34 ans et les jeunes rejettent une partie des institutions traditionnelles. 90 % des 18-30 ans n’ont plus confiance dans les partis pour agir contre le réchauffement climatique, alors que sept jeunes sur dix se déclarent « très engagés » en matière d’environnement.
Des actions concrètes et solidaires
Ils et elles sont attiré·e·s par des formes d’engagement qui leur paraissent plus directes. 43 % des jeunes de 18 à 30 ans ont signé une pétition ou défendu une cause sur internet, un blog, ou un réseau social, 36 % ont participé aux activités d’une association et 15 % à une manifestation, une grève ou à une occupation de lieux.
La colère gronde
Le retrait vis-à-vis de la politique traditionnelle s’accompagne aussi d’une colère. 52 % des jeunes pensent que seule une certaine forme de violence peut permettre de faire bouger les choses et 34 % adhèrent par exemple à l’idée que l’armée puisse diriger le pays. Tourné en mai 2017, le documentaire Demain le Feu rend audible la colère sourde de plusieurs personnes, jeunes et moins jeunes, partout en France.