Kamila M. 19/04/2023

Déter pour devenir avocate

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Le métier de Kamila, ce sera de lutter contre les injustices. Consciente que ses origines peuvent la freiner, elle ne lâchera rien.

Plus tard, je veux être avocate. Je suis sûre de mon choix, sûre que c’est ce que je veux faire de ma vie. Ça a été comme une révélation. Depuis petite, je prends toujours la défense de ceux qui en ont besoin. Tellement que je me suis attiré des problèmes… Mais c’était plus fort que moi. Partout, des personnes qui n’ont rien demandé, rien fait à personne, vivent des moments horribles. Il y a de grosses injustices. J’ai envie d’aider le maximum de personnes à surmonter tout ça. Les avocats représentent la justice et le respect. Je les admire tellement.

Tout a commencé quand mes parents se disputaient toutes les semaines. Ça devenait vraiment horrible à la maison. Les repas ne se faisaient même plus en famille. Pour eux, c’était impossible de se retrouver dans la même pièce. Il y avait sans cesse cette tension. La maison était silencieuse : moi dans ma chambre, ma mère dans la sienne, mon père dehors, et mes sœurs dans le salon. C’est comme si nous n’étions même plus une famille. Je l’ai vécu tellement mal. Mais je suis une personne qui n’aime pas laisser paraître ses émotions. Alors, je faisais comme si de rien n’était. Je passais pour la fille insensible et sans cœur. Ma mère pleurait tous les jours, pendant les repas, la nuit dans sa chambre, et moi je l’entendais chaque soir, les yeux ouverts, dans mon lit.

Je ne parvenais plus à dormir. C’est quand je me retrouvais seule que je pouvais pleurer et extérioriser toute cette peine pour ma mère. Je n’ai jamais voulu me positionner. Mais voir mon père lâcher des insultes, remettre en cause l’éducation que ma mère nous donne… et la voir s’effondrer et s’éteindre à petit feu chaque jour… ça m’a vraiment détruite. Si j’avais été avocate, j’aurais pu aider mes parents à se séparer !

Pas la pire situation au monde

Aujourd’hui, mes parents sont en cours de divorce, mais d’autres personnes ont beaucoup plus souffert que moi. Il y en a qui n’ont aucun souvenir heureux de leur famille. Moi, j’en ai plein ! Quand je suis triste, je me rappelle qu’il ne faut pas que je sois égoïste.

Je me suis renseignée. Pour devenir avocat, il faut faire quatre ans de droit, plus deux ans de formation. En gros, c’est un bac +6. C’est vraiment long, mais je pense en être capable. Je serai peut-être avocate dans le droit familial, pour m’occuper des divorces, défendre les personnes comme ma mère. Je pourrais aussi être avocate d’affaires et m’occuper des grandes entreprises. C’est un peu tôt pour choisir, après tout je ne suis qu’en troisième !

La seule chose dont j’ai peur… ce sont mes origines arabes. Certaines personnes vont sûrement être rebutées par ça. Il y aura toujours des gens qui vont juger non pas sur les capacités et les parcours, mais plutôt sur la couleur de peau, les origines, le sexe… Peut-être que le fait de m’appeler Kamila, d’être d’origine algérienne, marocaine et italienne, peut me freiner dans la recherche d’un emploi. Si je m’appelais Chloé ou Julie, si j’étais « totalement » française, ce serait sûrement plus simple.

Se battre pour obtenir des choses

Je m’en suis rendu compte récemment. En début d’année, je m’y suis prise super tôt pour la recherche de stage. Parce que je voulais vraiment le faire dans un cabinet d’avocats. Dès le mois de septembre, j’ai préparé une très bonne lettre de motivation. J’y ai passé énormément de temps. J’ai arpenté le centre de Brive pendant au moins deux heures, en allant voir les avocats. J’ai enchaîné les refus, pour un stage de troisième ! Les rares qui m’ont laissé la petite chance d’envoyer un mail… ne m’ont jamais répondu.

Or, j’ai une voisine, Clara. Elle s’y est prise beaucoup plus tard que moi… et devinez quoi ? Elle a été acceptée dans un des cabinets où je m’étais présentée. C’est vraiment injuste… Au final, j’ai effectué mon stage dans un domaine qui n’a rien à voir avec mon projet. C’était tout de même intéressant, mais je suis déçue. Pour moi, c’est de la discrimination.

Maintenant, je suis prévenue, il me faudra prouver tout ce dont je suis capable. Je veux montrer à tous ceux qui n’ont pas cru en moi que je suis à la hauteur. Que je peux faire ce métier, même si c’est dur. Tout donner, malgré les hauts et les bas que je pourrais rencontrer. Même si le parcours sera long et difficile, je saurai rebondir, faire preuve de courage pour réaliser mes rêves.

Pourquoi je n’en aurais pas le droit ?

Je suis humaine comme tout le monde, j’ai des qualités et des défauts certes, mais je ressens des émotions, j’ai un cœur et des rêves comme toute autre personne. Il ne faut pas que je laisse les autres me juger pour mes origines ou ma religion, mais plutôt pour qui je suis. Ces origines sont quand même une partie de ce que je suis, elles font ma force. Pour tout cela, je veux faire ce métier : pour aider des femmes comme ma mère à se reconstruire, aider des personnes à surmonter des épreuves comme les discriminations.

Aya est arrivée en France en 2016. Inscrite en licence de droit, elle compte bien devenir avocate… et défendre les droits de l’Homme !

Capture d’écran de l’article "Réfugiée syrienne, je deviendrai avocate en France !" illustré par une photo : un amphithéâtre est rempli d'étudiants. Il est composé de plusieurs statuts. Les étudiants écrivent sur leur ordinateur, ou bien sur un cahier. Devant eux, on aperçoit un homme derrière son bureau, avec beaucoup de feuilles, en train de parler. Derrière lui, il y a un écran blanc de projection.

 

Plus tard, je m’imagine dans une grande ville, peut-être en France, mais pourquoi pas aussi au Canada. Je m’imagine avocate dans un grand cabinet avec mon nom gravé sur une plaque dorée ; heureuse, une femme forte et courageuse. Je sais que mes parents seront fiers de moi, même s’ils ne sont pas ensemble. Je m’imagine. Et je saurai que ce qui m’a rendue ainsi : toutes ces épreuves, surmontées en gardant la tête haute et en n’ayant aucun regret. J’espère pouvoir changer l’opinion de certaines personnes, victimes de jugements hâtifs et de discriminations. Leur montrer que leurs différences font leur force. Quand j’imagine tout ça, je me dis « Inshallah » (si Dieu le veut).

Kamila, 14 ans, collégienne, Brive-la-Gaillarde

Crédit photo Pexels // CC Zura Modebadze

 

 

 

Plus facile de faire des études quand on a un nom bien français ?

C’est la question posée par trois chercheurs, qui ont mené une enquête en utilisant la technique du testing. On t’explique…

Ils ont envoyé des demandes d’informations aux responsables de 607 masters partout en France.

Dans ces mails, ils n’ont pas révélé leurs véritables identités : ils se sont fait passer pour des étudiants, avec le même niveau, le même profil. Leur différence ? L’un avait un nom à consonance maghrébine, l’autre pas. Le résultat est sans appel : le premier candidat a reçu nettement moins de réponses que le deuxième.

Selon leurs calculs, un·e candidat·e portant un nom à consonance maghrébine a 12 % de chances en moins de recevoir une réponse à sa question. Plus les formations sont prestigieuses, plus les résultats sont édifiants.

Pour le droit par exemple, 33 % des responsables de masters ignorent la question du jeune perçu comme maghrébin.

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