« France : une jeunesse oubliée ? »
A 22 ans, déjà trop vieille pour le monde de la coiffure
Un des reportages nous propose de suivre Jessica, Kévin et Suzie, des jeunes chômeurs qui ont entre 18 et 25 ans et qui peinent à s’insérer sur le marché du travail.
Leurs parcours mettent en évidence les problématiques et les paradoxes de notre société qui ne veut même pas «donner une première chance» à ses jeunes qui sont pourtant déterminés à travailler.
On découvre l’histoire de Jessica qui a cumulé les petits boulots avant de découvrir sa vocation : la coiffure. Jessica cherche un contrat en apprentissage depuis des mois sans n’avoir jamais obtenu une seule réponse positive. La raison est purement économique. A 22 ans, elle est n’est pas assez rentable pour les employeurs qui préfèrent recruter des jeunes de moins de dix-huit ans afin de bénéficier de réductions d’impôts. Jessica est déjà trop vieille pour le monde de la coiffure. Une situation aberrante qui me pose la question suivante : qu’est-ce qu’on en fait alors de ces jeunes qui ne sont pas assez rentables pour les entreprises ? L’apprentissage est aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs moyens pour accéder à l’emploi. Si, maintenant, il exclut une partie des jeunes pour des motifs purement économiques comme c’est le cas pour Jessica, alors il y a un problème.
« Il faut se créer nos propres places »
« Ce qui met la haine, c’est que quand on ne vous donne pas votre chance, on ne peut pas avoir d’expérience. »
A 25 ans, Kévin survit grâce au dispositif de la garantie jeune qui lui verse 460 euros par mois. Il vit dans un logement hlm avec quatre de ses amis qu’ils vont devoir quitter prochainement. Ses recherches de logement sont stériles en raison de ses faibles revenus et de sa situation précaire. Aucun propriétaire ne veut prendre le risque de lui louer un appartement. Kévin a arrêté ses études au collège et n’a jamais trouvé un emploi stable, il travaille en moyenne deux mois par an. Cette situation est pesante pour le jeune homme qui met en cause les politiques de recrutement des entreprises qui exigent constamment d’avoir une expérience professionnelle, or «(…) quand on ne vous donne pas votre chance, on ne peut pas avoir d’expérience». Un constat que partage Suzie qui, après avoir obtenu un DUT de graphiste, n’a pu effectuer qu’un seul stage en entreprise. Elle cherche un emploi depuis deux ans et vit avec moins de 500 euros par mois d’aides versées par l’Etat.
Pour Suzie, les rêves ont laissé place à la dure réalité : «Il n’y a pas assez de place pour tous alors il faut se créer nos places, qu’on les invente parce qu’elles n’existent pas.» Sans travail ni logement, Suzie est hébergée chez son copain le temps de trouver une situation stable.
Pourquoi ce pays nous coupe ainsi les ailes ?
Je bouillonnais en regardant ce reportage. Je repensais à quelques-uns de mes amis qui sont diplômés depuis des mois voire des années et qui n’ont toujours pas trouvé de premier emploi en raison d’un «manque d’expérience professionnelle». Pourtant, ils ont fait leur partie du contrat, ils ont étudié, certains sont surdiplômés, ils ont même travaillé à côté de leurs études en se disant que de toute façon, cette situation allait finir par changer, qu’un jour ils auraient le métier de leur rêve. Aujourd’hui, ils sont au chômage, essuyant jour après jour les refus d’embauche. Alors je veux comprendre.
Pourquoi ce pays nous coupe ainsi les ailes ? Pourquoi on ne nous donne pas cette fameuse première chance qui nous permettra d’acquérir cette fameuse expérience professionnelle tant désirée par les employeurs ? Pourquoi, en 2016, des jeunes ne peuvent même pas se payer un ticket de bus ?
Réveille-toi ma France. Réveille-toi.
Hawa, 23 ans, étudiante et blogueuse, Ile-de-France
Crédit photo Camille Cohendy