Demba S. 07/04/2021

Ma première maraude ne sera pas la dernière

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J’ai découvert ce qu’était une maraude en y participant. En aidant des gens en difficulté, j’ai surtout réalisé la chance que j’avais.

Il était 18 h 30, j’étais avec une dizaine de potes. Mamadou et Karima, les animateurs du quartier des Courtillières nous avaient demandé de venir au siège de leur association. C’était la deuxième fois que j’allais là-bas. Des fois, ils organisent des sorties et, d’autres fois, on y va pour faire des réunions. Bref, ce jour-là, on était venus pour une sortie un peu particulière. Les animateurs nous emmenaient faire une maraude. Au début, je ne savais pas ce que c’était. Ils nous avaient juste expliqué qu’on allait faire une sortie pour aider des gens.

J’avais mis un vieux pantalon et un manteau chaud. La veille, ils nous avaient dit de ramener des affaires sales sur nous, car nous devions aller dans un endroit où il y aurait de la boue. Et d’autres que nous n’utilisons plus afin de les donner aux personnes que l’on allait rencontrer.

Sur le périph’, des centaines de tentes et de la boue

L’un d’entre eux nous a expliqué que les gens seraient un peu violents, car il y a peu de gens qui viennent les aider, ils n’ont pas l’habitude. Au début, j’étais un peu craintif, j’avais peur qu’un SDF me frappe pour prendre mes affaires, mais j’étais rassuré que les animateurs viennent avec nous.

À Orléans, un ancien Ehpad accueille des SDF positif·ve·s à la Covid-19 avec des symptômes légers. Cette initiative leur permet de respecter l’isolement de sept jours. Une solution d’hébergement peut aussi leur être proposée à leur sortie.

À 18 h 30, nous sommes donc partis du siège pour aller sur le périph’ dans deux voitures différentes chargées de repas et d’affaires. Arrivés Porte d’Aubervilliers, au bord de la route, j’ai vu des centaines de tentes et de la boue. Et des gens autour qui faisaient des feux parce qu’il faisait froid, c’était l’hiver. Ils avaient des chaussures et des vêtements noirs, et ce n’était pas de la marque ! À côté, il y avait une station-service. Sur le coup, je me suis demandé s’ils dormaient vraiment là, sans toit et sans toilettes.

Les gens savaient que nous étions là pour une maraude

J’ai été choqué par les conditions dans lesquelles ces gens vivaient : à côté du periph’, dans la boue, le froid, l’odeur. Il y en avait de mon âge, des plus petits, et même des vieilles personnes. C’était comme une sorte de guerre, il y avait des Soudanais, des Syriens, des Palestiniens…

Quand nous sommes arrivés sur place pour leur donner des vêtements, une masse de personnes s’est approchée : ils nous avaient déjà remarqués et savaient pourquoi nous étions là. L’association avait l’habitude de faire des maraudes dans plusieurs endroits, dont ce campement-là.

Nous leur avons donné des vêtements de marque ou pas de marque, ils prenaient de tout, sans réfléchir. J’ai pris conscience de la chance que j’avais de pouvoir choisir la façon dont je m’habille. Je me suis dit que la manière de s’habiller n’avait pas d’importance, que le plus important c’est juste de porter des vêtements.

Ces gens étaient contents de nous voir, ils nous remerciaient en anglais.

Moi j’ai un toit, d’autres dorment dehors

Quand nous sommes partis, j’ai pensé au fait que nous rentrions chez nous et qu’eux, ils étaient dehors dans le froid, sous des tentes, et que surtout, nous étions en hiver ! Si c’était à refaire, je le referais sans hésiter.

Cette expérience m’a fait changer d’avis sur le monde dans lequel nous vivons. Moi j’ai un toit, d’autres dorment dehors.

Camille a rencontré Bob, sans-abri, près de chez elle. Cette amitié lui a beaucoup appris sur la condition des sans-abris, elle a pu déconstruire les idées reçues.

Ça m’a fait plaisir d’aider. Avec mes potes, on a dit aux animateurs qu’on pouvait revenir n’importe quand. C’était la première fois que je faisais une maraude et ce ne sera pas la dernière.

 

Demba, 14 ans, collégien, Pantin

Crédit photo Unsplash // CC Joël Muniz

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