Mineur isolé, j’ai vécu en famille d’accueil puis à la rue
Arrivé en France, je me suis rendu compte que tout est difficile. Je suis arrivé en train à Paris, j’étais seul, j’avais pas d’hébergement. Quelqu’un m’a accompagné à la Croix-Rouge, métro Couronnes. Je suis entré, ils m’ont tout de suite dit de sortir. J’ai essayé de parler avec eux, mais ils ont refusé. Je savais pas pourquoi.
Je ne savais pas quoi faire. J’avais pas de famille. Pendant deux semaines, je ne savais pas quoi faire. Je suis parti à Porte de la Chapelle. Pour chercher à manger et un endroit où dormir. Quelqu’un m’a donné une tente.
J’ai rencontré une fille après deux semaines. Elle m’a demandé si j’avais mangé, elle était juste en train de passer. Elle m’a apporté à manger. J’ai commencé à discuter. Elle m’a demandé beaucoup de choses. Pourquoi je suis venu en France. Je lui ai tout expliqué. Elle a pris mon numéro, j’avais un petit téléphone.
Deux jours après, elle m’a appelé. Elle est venue me chercher et m’a emmené dans un hôtel. C’est elle qui a payé. Elle m’a présenté à sa famille. Ils m’ont proposé d’aller en vacances avec eux en Bretagne pendant deux semaines. Ils ont dit : « À notre retour, on va t’aider. » On est rentrés. Ils m’ont demandé si c’était possible de parler avec ma famille. Je leur ai donné les numéros. Elle a appelé, j’ai parlé avec ma mère. Je lui ai expliqué que j’étais avec une famille d’accueil, je lui ai tout expliqué.
Le juge a dit qu’il allait m’appeler dans les deux semaines
Ils lui ont dit d’envoyer mon extrait de naissance. Que c’était très important. C’est eux qui ont payé pour qu’elle l’envoie. Quand je l’ai reçu, ils m’ont dit de repartir à Paris, pour le recours. Au tribunal. Au juge des enfants.
Ça prend beaucoup de temps. Ils te donnent deux ou trois rendez-vous. Le premier, ils te demandent si t’as reçu ton extrait. Le deuxième, c’est pour déposer l’extrait. Ils te demandent pourquoi t’es venu en France. Dans une petite salle, avant de voir le juge. Ça prend beaucoup de temps. Ils te demandent si t’as été à la Croix-Rouge, qui t’a dit de venir au tribunal. Le troisième rendez-vous, c’est pour voir le juge. Il te redemande la même chose. Certains, ils ont un hébergement direct. D’autres, un autre rendez-vous.
Moi, j’ai eu un autre rendez-vous. Le juge m’a dit qu’il allait m’appeler dans les deux semaines. J’ai attendu trois mois ! Ils m’ont rappelé, j’y suis retourné et là, ils m’ont logé, dans un foyer pour mineurs.
De la France, Amssi en rêvait depuis sa Côte d’Ivoire natale. Mais sitôt arrivé sur le sol français, il a vite déchanté. Faute de pouvoir trouver un endroit chaud où dormir, il a dû se contenter de la rue, des bords de Seine et du métro.
En attendant, j’étais à la fois avec la famille « d’accueil », des fois avec des associations, des fois à Porte de la Chapelle, dans la rue.
C’est pas normal. Les gens savent que t’as pas de logement et ils te font attendre, sans savoir si tu manges ou pas. Si tu dors ou pas. C’est pas normal.
Mamadou B., 17 ans, lycéen
Crédit photo Hans Lucas // © Rose Lecat (série de photos « Les campements d’Ile-de-France pendant l’hiver »)
Lamentable, comment l’état français peut-il jouer ainsi avec des enfants mineurs qui n’ont ni lieu où vivre, ni se soucier si cet enfant a à manger ou autre. Honte à la France. Je souhaite à ce jeune homme d’être accueilli chez des bonnes personnes au grand cœur et qu’il soit considéré comme leur propre enfant…