Mon objectif : parler un français parfait
Je viens d’un village en Guinée où tout le monde ne va pas à l’école. Seuls ceux dont les parents ont les moyens y vont. D’autres envoient juste leurs enfants à l’école coranique. Moi, j’ai eu la chance d’apprendre le français à l’école en Guinée pendant six ans.
Dans mon école, le prof nous forçait à parler français. J’avais parfois honte parce que j’avais l’impression que je ne le parlais pas bien. Mes amis se moquaient de moi et de mon accent quand j’étais interrogé. Je ne savais pas non plus lire correctement, la lecture et la dictée me fatiguaient trop. Souvent, les mots ne s’écrivaient pas de la même façon dont ils se prononçaient, j’étais perdu. C’était tellement dur d’apprendre cette langue.
Parler français, ça aide dans la vie
À l’école, nos cours se faisaient en français. Le prof nous répétait que, pour devenir quelqu’un, être un grand responsable, il fallait savoir parler français, qu’on ne pouvait pas réussir dans la vie sans parler cette langue. Dès que le prof quittait la salle, on se mettait tous à parler dans notre langue maternelle, le peul [une des langues parlées en Afrique de l’Ouest, ndlr]. Tout le monde ne parle pas peul, certains parlent malinké, soussou, mais tout le monde se comprend. Moi je parle quatre langues : le peul, le malinké, le soussou et le français. Il n’y a qu’en français où j’ai honte.
Ma mère me forçait tout le temps à réviser mes leçons, prendre mes cahiers, lire. Elle m’a beaucoup chicoté, parce que souvent, dès qu’elle quittait la maison, je prenais mon vélo pour rejoindre mes amis. C’était important pour elle, parce que, dans mon village, les gens qui parlent français sont respectés et aimés, ça aide dans la vie ! Ma mère me disait qu’elle n’avait pas eu la chance d’aller à l’école. Elle voulait tellement étudier, mais elle n’a pas pu.
Le choc de la ville et de la langue
Mon premier jour en France, c’était tellement difficile pour moi ! Je ne comprenais pas bien quand les gens parlaient. Je trouve que les Français ont un accent, ils parlent dans leur gorge et trop vite. Ils n’articulent pas certains mots, ils prononcent des mots que je n’entends même pas ! J’avais peur de m’approcher des gens, de leur parler. J’avais l’impression que je m’exprimais mal.
Pour moi, j’étais dans un autre monde ! J’étais impressionné par la ville, les gens dans les rues, j’étais perdu. En plus, comme je ne m’exprime pas bien en français, personne ne m’écoutait. À Paris, il y a des grands bâtiments, des trains et des métros. Je n’en avais jamais vu dans mon petit village de naissance, ça a été un grand choc pour moi. Dans mon village, il y a des cases, pas de routes ni de transports.
J’avais beaucoup de difficultés au début, notamment dans le métro. C’était la première fois que je voyais un tunnel comme ça ! Mais surtout, tout le monde regardait les panneaux d’affichage, et moi je ne maîtrisais pas du tout ça. Ça m’est arrivé plusieurs fois de dépasser ma station et de devoir faire demi-tour. Si je voyais les passagers descendre, moi aussi je descendais. Vraiment, c’était compliqué pour moi.
Les cours de français : ma priorité
Quand j’ai été pris en charge par France Terre d’Asile, la vie a commencé à être plus simple. Maintenant, je peux prendre le métro seul.
Ils m’aident aussi à apprendre le français. J’apprends à bien lire, à communiquer. J’ai fait beaucoup de progrès. Je veux ensuite aller à l’école pour avoir une très bonne formation et pouvoir m’intégrer dans la société. Je veux faire ma vie en France. Pour avoir une famille, travailler, me faire des amis, c’est indispensable que je parle français ! C’est ma priorité.
Quand Tabish est arrivé en France, il a dû apprendre le français, et vite.
En plus j’aime beaucoup cette langue, elle me plaît. J’ai encore des difficultés en grammaire mais, avec mes efforts et l’encouragement de mes profs, j’y arrive petit à petit.
Amadou, 16 ans, en formation, Paris
Crédit photo Pexels // CC cottonbro