Ma minorité refusée, je vis grâce aux associations
C’est grâce aux associations que j’ai une vie en France. Ce sont les bénévoles qui me donnent à manger, des vêtements, qui m’aident à trouver un lycée… et qui m’hébergent pour ne pas que je sois dans la rue le soir.
Je suis arrivé fin juillet en France et je n’avais nulle part où aller. Je me suis mis à demander à des gens pour trouver un endroit où je pourrais manger et me laver. Personne ne me dirigeait ou me guidait. Je suis alors allé voir un groupe de frères noirs qui étaient à la gare et qui m’ont dirigé vers Château Rouge. Il y avait une association qui donnait à manger aux gens chaque soir. Du coup, je me suis rendu là-bas.
Ma minorité refusée par le juge
À mon arrivée, je les ai vus donner de quoi manger et des tentes pour dormir. J’ai passé un mois et demi comme ça, dans la rue. Sur ce même lieu où on dormait, j’ai rencontré un ami qui m’a parlé de la Croix-Rouge. Je me suis donc rendu là-bas pour pouvoir me déclarer. La Croix-Rouge nous a hébergés dans un hôtel, et quelques jours plus tard on m’a interviewé. On m’a demandé mes documents de naissance pour savoir si vraiment c’était mon âge réel. J’ai tout envoyé, et après on m’a demandé d’envoyer un document biométrique sur lequel se trouve ma photo. Malheureusement, je n’avais pas de passeport à ce moment-là.
Vu que ma minorité a été reconnue par la Croix-Rouge, j’ai été placé à l’hôtel pour pouvoir attendre mon transfert. J’ai été transféré à Angers et j’ai continué mes études. Pendant ce temps, je dormais dans un hôtel à la disposition du département. J’aimais cette ville. J’étais au lycée David-d’Angers, où j’ai fait ma formation d’apprentissage en boulangerie-pâtisserie avec la MLDS (mission de lutte contre le décrochage scolaire). Le chef était satisfait de mon travail. Il était d’accord pour signer un contrat avec moi. Mais, malheureusement, ça s’est mal passé avec le département. On a dû faire une autre interview. Ils m’ont proposé un jugement au tribunal, et le juge a finalement contesté ma minorité. Je n’ai pas fait de test osseux parce qu’on ne me l’a pas proposé. Et je me suis retrouvé à nouveau à la rue.
Entouré de bénévoles
J’étais vraiment démoralisé parce que mon rêve venait d’être brisé. Je n’avais nulle part où aller, et je ne savais pas quoi faire. C’est à partir de là que je suis revenu sur la ville de Paris, à la gare du Nord. Je suis retourné à la Croix-Rouge de Couronnes pour leur expliquer la situation. Mais ils m’ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire pour moi. C’est là que des jeunes de mon âge m’ont parlé d’une association, les Midis du MIE, qui se trouvent au jardin des Couronnes.
À 17 ans, Bocar n’a pas non plus été reconnu par la France comme mineur isolé. Après deux mois à la rue, il attend maintenant la décision d’un·e juge.
Ils donnent à manger à des jeunes qui sont en difficulté. Ils m’ont montré leur gentillesse, ils m’ont nourri et m’ont logé dans un hôtel. Nous étions entourés de personnes de bon cœur. Les bénévoles étaient sympas, gentils, tous souriants. Ils nous motivaient, nous consolaient, nous réconfortaient jusqu’à ce qu’on devienne une famille et des amis proches. Je ne regrette pas de les avoir rencontrés, surtout notre très chère maman Agathe.
Garder espoir pour l’avenir
Avec leur aide, j’ai trouvé un lycée à Saint-Denis où je vais pouvoir étudier les vendredis. Pour que je puisse aller au lycée même si je ne suis pas considéré comme mineur, l’association a collaboré avec une dame pour montrer que je suis hébergé chez elle. J’aurai des cours de français, de maths, d’histoire-géo, etc. au lycée Paul-Éluard. Et du lundi au jeudi, avec une autre association, j’aurai des formations pour trouver un stage et un métier.
Ce n’est pas facile mais je ne peux pas perdre espoir car il y a des gens qui peuvent m’aider à réaliser mon rêve, avoir un boulot et avoir un titre de séjour. Je remercie abondamment toutes ces associations qui nous viennent en aide.
Lama, 17 ans, lycéen, Paris
Crédit photo Hans Lucas // © Rose Lecat