1/5 Un jour, peut-être, j’oserai
Une fois, en allant à l’école, j’ai vu dans le métro en face de moi une femme voilée. À côté d’elle se trouvait un homme, entre 45 et 50 ans, qui la regardait en mode dégoût. Au début, je ne comprenais pas. Elle avait son masque. Elle était assise correctement. Bref, elle était normale et ne méritait pas des regards comme ça.
J’ai ensuite fait le lien : le voile. L’homme a changé de place, mais ses regards étaient toujours présents. Il s’est posé en face de moi et a continué à la regarder comme si elle avait fait quelque chose de mal. Je me suis mise à en faire autant. À regarder l’homme avec insistance en me disant que peut-être, si je le regardais de la même manière, il prendrait conscience que son geste était déplacé. Mais il est descendu, et l’histoire s’est finie.
Plus tard, aux informations, j’ai entendu une autre histoire. Une femme qui s’est fait poignardée parce qu’elle était voilée. J’en ai donc conclu que le voile était un problème très sérieux en France et que tout ça pouvait aller vraiment loin.
Mais moi, le voile… j’ai toujours rêvé de le porter. Je voudrais le mettre pour prouver ma foi à mon dieu. Le voile n’est pourtant qu’un vêtement traditionnel qui consiste à cacher ses cheveux ou une partie du visage. Mais j’ai peur de me sentir rejetée en le portant. Le fait qu’il y ait de plus en plus d’islamophobie me bloque. J’ai peur de me fermer des portes et de ne pas pouvoir travailler.
J’ai pourtant essayé de le mettre plusieurs fois, mais je n’ai pas réussi. Peut-être par manque de courage ou par peur du regard des gens. Je l’ai déjà porté chez moi mais lorsqu’il s’agit de franchir le pas de la porte, je n’ose pas le garder.
J’ai peur de ce que les gens penseront
Quand je vois ma mère acheter de nouveaux foulards, je les essaie pour voir et ça me plaît tellement. Je me sens si proche de mon créateur. Je me sens comme protégée. J’en ai parlé à ma mère. Elle m’a dit de faire comme je le sentais. Que si je me sentais vraiment prête, je pouvais le mettre. Mais, aujourd’hui, j’ai toujours cette crainte dans ma tête.
La crainte que les gens pensent que mes croyances me privent de mes libertés, et que j’ai été forcée par mes parents. Alors que ma religion est fondée sur la paix. Les personnes voilées que je connais le portent, toutes, de leur plein gré.
SÉRIE 2/5 – Myriam a longtemps refusé de porter le voile, malgré les pressions de son père. En se documentant sur sa religion, elle a changé d’avis.
J’ai vu plusieurs témoignages de femmes voilées sur les réseaux ou encore à la télé qui racontaient leurs mauvaises expériences avec le voile. Par exemple, des jeunes femmes ne trouvaient pas de travail.
Mais j’ai aussi trouvé des vidéos de femmes qui se sont mises à le porter. Elles avaient l’air si épanouies. Cela m’a procuré un grand sentiment joyeux. Je me disais dans ma tête : « Pourquoi pas essayer si elles ont sauté le pas ? Pourquoi ne pas tenter moi aussi ? » Un jour, peut-être, j’y arriverai…
Alia, 16 ans, lycéenne, Villeurbanne
Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)
Peut-on porter le voile en entreprise ?
Les agentes du service public ne peuvent pas porter de foulard sur leur lieu de travail au nom de la neutralité. Mais, dans le privé, c’est plus compliqué. Une entreprise ne peut pas interdire le port du voile, sauf si le patron a fait rajouter une clause spécifique dans son règlement intérieur (pour des questions d’hygiène ou de sécurité, par exemple).
Sur YouTube, Safaa et toi donne des conseils à celles qui portent le hijab et qui cherchent du travail.
Et à l’école ?
De l’école au lycée public, les élèves n’ont pas le droit de porter le foulard, ni un autre signe religieux, depuis 2004. Dans le privé, ça dépend du règlement de chaque établissement. Dans l’enseignement supérieur, les étudiant·es sont considéré·es comme des adultes et sont donc libres de leurs tenues, n’en déplaise à quelques politiques et enseignant·es.
Comment se défendre ?
Refuser d’embaucher quelqu’un à cause de sa religion ou de son foulard, c’est illégal mais ça ne veut pas dire que les patrons ne le font pas. Si tu estimes être victime de discrimination au travail comme ailleurs, les juristes de la plateforme antidiscriminations.fr proposent une aide gratuite pour te défendre et être accompagné·e par le Défenseur des droits.