Apolline H. 13/03/2023

2/4 J’ai arrêté la gym à cause de la pression

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Apolline a commencé la gym pour le plaisir. Pas pour les compétitions. Blessures et manque de bienveillance, elle a décidé d’arrêter.

Tant qu’on ne réussissait pas, il fallait refaire l’enchaînement qu’on préparait pour la compétition. Entre trois et cinq fois. Moi, si je faisais deux fois de suite des figures sur les barres asymétriques, j’étais fatiguée. Les entraîneuses nous engueulaient : « Faut qu’on aille en compète ! » Elles nous mettaient trop de pression, alors qu’on avait 8 ans.

J’ai dû arrêter la gym en compétition. J’adore toujours ce sport, mais je ne peux pas y retourner. On ne s’amusait pas. C’était comme une obligation, je n’y prenais plus de plaisir.

J’ai fait de la gym du CP jusqu’au milieu CE2. Je participais aux compétitions départementales, et aux régionales si on ne se faisait pas éliminer avant. On en faisait à peu près tous les deux mois. On pouvait gagner des médailles individuelles et des médailles d’équipe. En équipe, on a été troisième en régional.

J’avais forcé pendant longtemps avec ma mère pour commencer. La gym pour moi, c’était les figures. Je voulais faire ça. J’aime bien l’aérienne ! J’aime aussi faire des figures sur les barres asymétriques, comme tourner autour de la barre. J’avais choisi la compétition, parce qu’en gym loisirs, les entraîneuses ne nous calculent pas : on y fait des choses qu’on peut faire en cours de sport à l’école, comme des roulades, et moins des « vraies » figures, comme de la voltige, des figures sur des barres…

Au début je m’amusais

Les entraînements duraient deux heures. Le mardi et le vendredi, de 17 à 19 heures, en intensif. On s’échauffait avec les loisirs et, après, on faisait les enchaînements : poutre, barres asymétriques, sol… On devait recommencer, faire les chorées… J’avais l’impression qu’il y avait beaucoup de compétition entre nous. Il y avait benjamines, cadettes, etc., mais on s’entraînait toutes ensemble. Les plus grandes n’étaient pas très gentilles et ne s’occupaient pas de nous. Elles restaient entre elles et, si on avait des questions, elles ne nous répondaient pas forcément, ou froidement, même quand on attendait juste que les autres passent.

Les journées de compétition, c’était moins stressant. Les entraîneuses relâchaient la pression sur nous. On partait en voiture avec elles, il y avait une bonne ambiance. Elles étaient plus calmes. C’était cool, on s’entendait bien ! Mon entraîneuse était aussi TAP [animatrice sur les temps d’activités périscolaires, ndlr] à mon école primaire, et elle était plus gentille à l’école.

Le stress a pris le dessus

En CM1, j’ai commencé à avoir toujours mal à la tête et au ventre. On est allés voir des médecins et faire des IRM, mais je n’avais rien. Comme je me faisais harceler à l’école, mon corps l’exprimait comme ça. Du coup, parfois, je ne venais pas aux entraînements. Je faisais presque une crise de larmes pour ne pas y aller. Comme je n’étais pas très bien, être encore plus mal à cause de la gym, ce n’était pas ce dont j’avais besoin. Mais les entraîneuses, quand je ne venais pas, me demandaient de venir plus.

SÉRIE 3/4 – L’esprit de compétition, Pierre ne savait pas ce que c’était. Jusqu’à ce qu’il découvre le lancer de poids, et un entraîneur intransigeant.

Capture d’écran de l’article "En athlé, seule ma performance comptait" illustré par un dessin graphique sur fond violet : au milieu de l'image, on voit 4 personnes se faire une accolade. Chaque personnes est d'une couleur différente : rouge, kaki, bleu et bordeaux.

 

J’avais aussi souvent mal à la cheville. Je retombais mal après les figures et je me la tordais. Je suis très laxe des chevilles, donc je me les tords souvent sans raison. Elles regardaient vite fait, mettaient de la glace à la limite, mais on continuait. Elles disaient : « Si ça va mieux, tu peux continuer, fais comme tu peux. » Et je continuais quand même. Je me sentais « obligée », parce que sinon elles allaient nous engueuler encore plus.

C’est ma mère qui m’a obligée à arrêter. Elle voyait que je ne voulais plus y aller et que ça me rendait malade. La gym est encore très importante pour moi. J’apprécie d’en faire au collège, alors que mes amies « détestent ». J’aimerais en reprendre en club : faire ce qu’on fait en compétition… mais ne plus faire de compétition.

Apolline, 13 ans, collégienne, Yvelines

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)

 

 

Podium ou santé mentale ?

Un tabou brisé

« Je sais que je ne le montre pas, que je fais comme si la pression ne m’affecte pas, mais putain, des fois c’est dur ! » C’est ce qu’a déclaré la gymnaste Simone Biles sur Instagram, durant les JO de Tokyo de 2021. Elle a annoncé se retirer de certaines épreuves pour prendre soin de sa santé mentale.

 

Un phénomène répandu 

Comme elle, nombreuses et nombreux sont les sportives et sportifs à souffrir de problèmes psychologiques. Selon une étude de la FIFPro (Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels), 38 % des footballeuses et footballeurs professionnel·les sont déjà passé·es par une phase de dépression. C’est beaucoup : en comparaison, seul·es 13,5 % des Français·es ont vécu un état dépressif.

 

Adolescence, relations et pression 

La carrière d’un·e sportif ou sportive de haut niveau commence réellement à l’adolescence. C’est une phase sensible et importante pour le développement de soi, où le risque de dépression est important. Pour autant, la famille, l’école et les relations ne font pas partie de leur quotidien. À long terme, ajouté à la pression des compétitions, cela peut mener à des addictions, des troubles de l’humeur et des comportements dépressifs.

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