Maëlys F. 26/04/2023

1/5 Soigner mon apparence, c’était « naturel »

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Lisseur, parfum, mascara… Au début de l’adolescence, Maëlys s’est entourée d’objets pour se sentir belle. Petit à petit, et sans contraintes.

Les femmes doivent prendre soin de leur apparence pour être des femmes, la société a décidé ça. À la télé, toutes les pubs de maquillage et de parfum, c’est pour les femmes. Vers mes 10 ans, on m’a offert un coffret Nocibé avec un gel douche, un parfum, un savon, une crème pour les mains, un baume à lèvres. Vu que c’est comme ça inconsciemment dans la tête de tout le monde, tout le monde trouve ça normal.

Ma pote m’avait fait essayer son lisseur. J’en ai ensuite voulu un, que j’ai reçu un peu plus tard, à la fin de la cinquième. J’ai vu que c’était bien plus facile (ça va plus vite que de m’occuper de mes cheveux) et bien plus beau. Je me suis laissée tenter.

Je me lissais les cheveux tous les matins, ça me prenait dix à quinze minutes. Mes cheveux au naturel sont ondulés donc quand je les brosse, ils gonflent et je ne trouve pas ça beau. Et puis tout le monde le faisait.

Ne pas sortir du lot

J’ai commencé à me préoccuper de mon apparence au milieu du collège, mes copines aussi. Il fallait faire comme les autres pour ne pas être bizarre et sortir du lot. J’ai un peu suivi le mouvement des autres, à vouloir me trouver belle. C’est bête mais pour moi, celles qui s’en foutaient de comment elles étaient et celles qui n’essayaient pas de prendre soin de leur apparence, je les trouvais bizarres et pas normales.

Je commençais juste à me maquiller un peu les yeux avec du mascara, à mettre un peu de gloss ou du parfum. Le parfum, je l’avais eu à Noël. Le reste, soit je le prenais à ma mère, soit je me les commandais avec des cartes cadeaux Sephora, soit je me les achetais avec mon argent (mais moins souvent). Je me suis aussi achetée des produits pour les cheveux comme des masques, des crèmes contre la chaleur…

Ma « morning routine »

En quatrième, j’ai commencé une petite « morning routine », que j’ai un peu gardée aujourd’hui. Quand je me réveillais, une fois que j’étais habillée et que j’avais mangé, je commençais à me maquiller. Je mettais ma crème à boutons, ma crème de jour, et ensuite la poudre pour ne pas avoir un effet « transpirant ». Quelquefois, je mettais un peu de fond de teint sur mes boutons, mais j’ai vite abandonné ce truc-là, parce que je me disais que tout le monde avait des boutons et que c’était normal. Je n’avais pas à les cacher, surtout que je n’en avais vraiment pas beaucoup. Ensuite, je mettais du mascara.

SÉRIE 2/5 – Enfant, Amandine surveillait déjà son poids et comptait les calories. Puis, un jour, elle n’est plus sortie de chez elle sans se maquiller.

Capture d'écran de l'article : "Je voulais être « la plus belle ». Il est illustré par un dessin représentant une jeune fille en train de mesurer son tour de taille.

Je n’étais pas non plus dépendante au maquillage, puisque j’avais des périodes où je n’avais juste pas envie et je venais sans rien. Je me trouvais quand même un peu naturelle parce que je ne me recourbais pas les cils, je ne mettais pas de faux cils, de rouge à lèvres, d’eyeliner, de fard à paupières… J’essayais quand même de rester moi-même et de pas forcément faire tout comme les autres.

Au lycée, j’ai directement senti le changement d’ambiance de classe. Les gens sont plus gentils, peut-être un peu plus matures en ce qui concerne l’apparence. Je me sens plus à l’aise. J’essaie de m’accepter avec de petites choses simples, en venant avec mes cheveux naturels ou pas maquillée. Et en voyant des filles comme moi s’accepter sur les réseaux. Je continue à me maquiller, mais pour moi cette fois-ci. J’essaie de changer de coiffure tous les jours, cheveux aux naturels, lissés, bouclés… Je trouve plein d’inspi sur les réseaux ou sur Pinterest. J’ai un tout petit peu changé ma routine.

Maëlys, 16 ans, lycéenne, Île-de-France

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)

 

Miroir, dis-moi qui est la plus belle

Dans le cadre d’une campagne pub sur l’estime de soi et les réseaux sociaux, Dove a fait appel à un institut de sondage pour interroger 600 enfants belges. Les résultats, même s’ils sont partiels, montrent une tendance :

Entre 13 et 15 ans, le nombre de filles qui ont honte de leur apparence triple,

60 % des filles de plus de 13 ans se servent de filtres,

– Une jeune fille prend 8,5 selfies avant d’en trouver un « digne » d’être partagé.

Bien dans son corps, bien dans sa tête

Sur les réseaux sociaux, le sort réservé aux personnes qui ne correspondent pas à ces canons de beauté truqués a fait naître une inquiétante mise au pilori. C’est ce qu’on appelle le body shaming. Pour faire simple, c’est le fait de subir des remarques désobligeantes et des moqueries à propos de son corps ou de son apparence. Cela concernerait un·e Français·e sur trois. Ce chiffre monterait à environ 85 % chez les moins de 18 ans.

Ce sont les filles qui en sont les premières victimes : 23,9 % d’entre elles sont victimes d’intimidation en ligne, contre 18,5 % pour les garçons. Tout comme le cyberharcèlement : 1 fille sur 5, âgée de 12 à 15 ans, rapporte avoir été insultée en ligne sur son apparence physique.

Les médias, eux aussi, ont leur part de responsabilité : les silhouettes élancées surplombent les supports marketing, les publicités quant à elles vendent du régime minceur miraculeux à tous les étages. Le message transmis semble clair : pour être beau ou belle, il faut être mince. Quand on est en pleine croissance, comment s’y retrouver dans tout cela ?

Partout dans le monde, des femmes brisent le tabou. En France, la blogueuse Gaëlle Prudencio revendique à haute voix ses formes et les apprécie. À l’aide de son premier livre Fière d’être moi-même, elle veut libérer la parole des femmes sur l’acceptation de leurs corps tels qu’ils sont. Militante du body positive, elle a notamment conçu la marque Ibilola, consacrée aux femmes rondes.

Chacun·e ses poils, chacun·e ses choix

Jambes poilues, sourcils fournis, moustaches dévêtues… Désormais, les femmes sont de plus en plus nombreuses à vouloir laisser la nature reprendre ses droits. Selon l’Ifop, la proportion de femmes qui ne s’épilent pas ou plus du tout a nettement augmenté. 28 % en 2021, pour 15 % seulement en 2013. Un phénomène accentué par les confinements successifs et la baisse des interactions sociales.

C’est le cas d’Eldina Jaganjac. Sur son compte Instagram, elle affiche naturellement son monosourcil, sa moustache, et montre son évolution pileuse. Pour Eldina, s’épiler, c’est une perte de temps et d’argent.

 

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Cette tendance a un nom : le No Shave. Le concept ? Inciter les femmes à laisser pousser leurs poils. Mais il ne s’agit pas du seul mouvement qui pousse à les assumer : #Januhairy, #LesPrincessesOntDesPoils, #BodyHairDay… En 2019, la mannequin Emily Ratajkowski avait fait sensation en lançant le #FreeTheArmpitHair. La raison ? Une photo d’elle avec les aisselles non épilées sur Instagram.

 

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Une publication partagée par Emily Ratajkowski (@emrata)

Malgré sa popularité, cette pratique n’en reste pas moins socialement dérangeante : « Pas féminins », « pas hygiéniques », « pas jolis »… les critiques et les stéréotypes de genre persistent.

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